« L’usine du monde » commence à se vider de ses maîtres d’œuvre. Samsung, qui avait été parmi les premières entreprises à investir dans des usines en Chine en 2002, annonce aujourd’hui que ses usines dans le pays seront mises à l’arrêt dès la fin du mois d’août.
Seules des activités de recherche et développement seront maintenues dans l’Empire du Milieu. Les 1 700 employés de l’usine de Suzhou seront soit licenciés, soit relocalisés dans une autre base du constructeur, clarifie un porte-parole de Samsung.
Un climat commercial tendu
Cela n’aura échappé à personne : entre Washington et Pékin, ce n’est rien de moins qu’une nouvelle Guerre froide qui semble se profiler. D’un côté comme de l’autre du globe, les coups pleuvent et les accusations d’espionnage vont bon train. Mauvais pour les affaires, estime Samsung, qui devrait relocaliser la majorité de sa production au Vietnam, où il a massivement investi depuis 10 ans et qui le fait bénéficier d’une main d’œuvre moins coûteuse encore qu’en Chine.
Mais Samsung tente de faire de la fermeture de l’usine de Suzhou un non-événement détaché des tensions commerciales actuelles. Forte de plus de 6 000 ouvriers lors de son pic d’activité en 2012, l’usine de Suzhou avait progressivement perdu de sa pertinence, écrit le journal français Les Échos.
La part de marché du géant sud-coréen n’a fait que décroître depuis (au profit, notamment, de Huawei et Xiaomi), et l’usine en question n’exportait plus qu’un milliard de dollars de matériel informatique en 2018 contre plus de 4,3 milliards en 2012. Une fermeture presque logique, de ce point de vue, qui fait suite à celles de Shenzhen, Tianjin et Huizhou que Samsung a également fermé l’an passé pour des raisons similaires.
Samsung et le travail des Ouïghours
Que Samsung plie bagage de l’Empire du Milieu s’explique, on l’a vu, par les tensions commerciales entre Washington et Pékin auxquelles l’entreprise ne veut surtout pas prendre part. Mais un autre fait d’actualité peut également expliquer la restructuration soudaine du constructeur.
La semaine dernière, et après que le New York Times a publié un nouvel article relatant la politique d’effacement de la minorité Ouïghour en Chine, l’Australian Strategic Policy Institute (ASPI) a publié un rapport alarmant pointant du doigt 83 entreprises qui emploieraient, de force, et dans des conditions déplorables, des travailleurs Ouïghours dans leurs usines en Chine.
Vous l’aurez deviné, Samsung fait bien entendu partie du lot. Tout comme Apple, Huawei, Sony ou encore d’innombrables entreprises spécialisées dans le textile.
Un hasard du calendrier, sans doute, qui permet à Samsung de faire d’une pierre trois coups : se prémunir de devoir prendre parti dans la guerre commerciale opposant la Chine aux États-Unis, bénéficier d’une main d’œuvre moins coûteuse encore sur ses chaînes de production, et se mettre en retrait des accusations de travail forcé sur les communautés Ouïghours en quittant le pays concerné.
Via : Les Échos