Qu'arrive-t-il à Samsung ? Véritable puissance au niveau national, le géant coréen a adressé une missive à ses employés, clients et actionnaires ce 8 octobre. La direction de Samsung y présente notamment ses excuses, en raison de profits inférieurs aux espérances du groupe.
Dans une lettre officielle publiée cette nuit, Samsung a reconnu des erreurs stratégiques et des défaillances internes, tout en prenant l’entière responsabilité de la situation. Ce geste extrêmement rare pour une telle entreprise intervient à un moment critique où Samsung est sous pression face à des défis majeurs, notamment dans les domaines de l'intelligence artificielle et des semi-conducteurs.
Une crise qui a fortement bousculé Samsung
Le chaebol pèse lourd, très lourd, sur l'échiquier économique mondial. Pour cause, présent sur une multitude de secteurs, de l'électroménager en passant par les écrans et les semi-conducteurs, sa filiale Samsung Electronics est attendue au tournant. Avec un titre en déclin de près de 25 % cette année, le bénéfice d'exploitation de ce mastodonte de l'électronique n'atteindrait pas non plus la hausse espérée pour le troisième trimestre de l'année.
Premier fabricant mondial de puces et de smartphones, Samsung a annoncé avoir généré un profit opérationnel de 9 100 milliards de wons (environ 6,15 milliards d'euros) sur ce dernier trimestre, là où la perspective du groupe approchait les 10 300 milliards de wons selon les analystes. Suite à cette annonce, le titre du groupe a perdu 1,15 % de plus. Pour le dire plus clairement, la hausse du bénéfice d'exploitation de Samsung pour ce troisième trimestre est de 274,5 % par rapport à la même période l'année précédente, ce qui correspond à un décalage inférieur de 11,7 % par rapport aux prévisions des analystes et à une baisse de 3 % par rapport au trimestre précédent… Un écart qui semble peut-être dérisoire, mais qui témoigne des difficultés rencontrées par Samsung en 2024.
Des difficultés qui s'accumulent pour Samsung
Ces difficultés, la direction de Samsung les reconnait comme étant de son propre fait. Car, hormis les résultats trimestriels, ce sont surtout les erreurs stratégiques du groupe qui sont pointées du doigt. En cause notamment, des investissements conséquents qui ne lui ont pas permis de tenir la barre face à certains concurrents, notamment en matière de semi-conducteurs où TSMC, fabricant taïwanais, a connu une croissance de sa part de marché de 48 à 61 % entre 2019 et 2024, alors que Samsung accuse une baisse de 8 % avec une part de marché qui atteint 11 % désormais.
Surtout, Samsung commence à perdre du terrain sur un secteur sur lequel il est le leader mondial, on pense bien sûr à la mémoire. L'entreprise accuse en effet du retard sur le marché des mémoires HBM — High Bandwidth Memory ; le nerf de la guerre puisqu'il s'agit de puces de mémoires taillées pour l'intelligence artificielle et les LLM comme ceux d'OpenAI (ChatGPT) ou de Google (Gemini), et que l'on retrouve notamment dans les GPU H100, H200 et G200 chez Nvidia. Un marché remporté aujourd'hui en majorité par son grand concurrent sud-corréen en matière de mémoires, qui n'est autre que SK Hynix.
Deux autres points sont à considérer, d'abord avec les mouvements sociaux qu'a connus Samsung cette année, mais aussi en raison d'une situation inédite. En effet, les ventes de smartphones pourraient, pour la première fois dans l'histoire de Samsung, générer plus de profits que celles liées à son activité de semi-conducteurs. Une situation délicate pour Samsung car bien que ses résultats sur la série de Galaxy S24 soit satisfaisants, elle doit batailler avec une rude concurrence avec Apple d'un côté, et Huawei de l'autre, notamment sur le segment du smartphone pliable. Pour rappel, le Huawei Mate XT, premier smartphone pliable en trois pour le fabricant chinois, aurait dépassé les 5 millions de précommandes ! Chez Samsung, le Galaxy Z Fold 6 a connu un lancement en demi-teinte…
Des excuses pour regagner la confiance du marché ?
Ce contexte particulier et délicat pour Samsung a mené la direction à présenter ses excuses, par le biais de son vice-président, Yong-Hyun Jeon, en poste depuis peu. Destinée à ses investisseurs, ses clients et à ses employés, la lettre publiée ce jour ne passe pas par quatre chemins pour tenter de regagner la confiance du marché : " Nous n'avons pas répondu aux attentes du marché, ce qui a suscité des inquiétudes sur notre compétitivité technologique, mais aussi sur l’avenir de l’entreprise. De nombreuses personnes ont exprimé leur inquiétude face à la crise actuelle chez Samsung. En tant que dirigeants, nous en assumons l'entière responsabilité". Il ajoute tout faire pour "transformer cette crise en opportunité". Reste à savoir comment Samsung entend prendre ce virage et surmonter ses difficultés.
Source : Le Monde
