Comme les États-Unis en 2001, ira-t-on vers un "Patriot Act" ?

Thomas Pontiroli
Publié le 12 janvier 2015 à 18h22
Les communications téléphoniques et sur Internet sont des vecteurs parfois utilisés par les terroristes. Après l'attentat de la semaine dernière, la France pose la question du renforcement de la surveillance.

Sous l'émotion des attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis, l'administration Bush avait adopté, sept semaines plus tard, une loi d'exception. Elle renforçait les pouvoirs du FBI, de la CIA et de la fameuse NSA, afin de lutter plus efficacement contre le terrorisme. Prévue, initialement, pour une durée de quatre ans, elle fut reconduite plusieurs fois. En 2015, le « Patriot Act » existe encore, et pourrait faire un émule en France.


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Après l'attentat du 7 janvier contre Charlie Hebdo et les assassinats qui ont suivi, la classe politique française commence à formuler des propositions en ce sens. L'une des personnalités les plus unanimes sur le sujet est sans doute Valérie Pécresse, ministre UMP de l'Enseignement supérieur de 2007 à 2011. Sur Twitter, elle écrit ce lundi : « Il faudra bien entendu un Patriot Act à la française. Il faut une réponse ferme et globale ».

« Des mesures à prendre sur le Net »

En matière de renseignement, la surveillance des communications joue un rôle central. Alors que le suivi des frères Kouachi, suspectés d'avoir perpétré la tuerie à Charlie Hebdo, aurait connu un arrêt durant l'année 2014, le Premier ministre, Manuel Valls, considère qu'il y a une « faille » et appelle à « travailler à de nouveaux dispositifs pour être encore plus efficace ». Il suppose que des mesures seront prises pour combattre la diffusion de messages de « haine » sur Internet. « Il y a des mesures à prendre en plus sur le Net, car cela a un effet de contamination, de mimétisme », ajoute le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius.

Des prises de position rejointes par l'opposition. L'ancien chef de l'Etat, Nicolas Sarkozy, s'exprimant au sujet d'Internet, a demandé à « surveiller ce qu'il s'y passe ». « Ce n'est pas parce que c'est virtuel que l'on peut s'exonérer des règles que l'on a mis plusieurs siècles à établir », a-t-il poursuivi. Si les débats ont commencé cette semaine au niveau politique, ces pistes sécuritaires ont suscité des réactions sur les réseaux sociaux.

Un Patriot Act « serait un comble »

« Après 4 millions de Français dans la rue aux cris de "liberté !", on parle de PATRIOT Act à la française », dénonce par exemple « Maitre Eolas » sur Twitter. « Se réjouir de l'émergence d'un "Patriot Act à la française", c'est avaliser une altération programmée de la démocratie », estime pour sa part l'entrepreneur Gilles Babinet. Le blogueur Olivier Laurelli de rappeler que le Patriot Act tel que conçu aux Etats-Unis ne se limite pas à la surveillance des communications et qu'« on va pouvoir avoir un Guantanamo à la française ».

Interrogé par Petit Web, Benoit Thieulin, le président du Conseil national du numérique, estime que « ce serait un comble, après s'être opposé à la guerre en Irak et les révélations d'Edward Snowden » et souligne qu'Amedy Coulibaly, un des tueurs présumés, « ne disposait plus de smartphone depuis quelques temps déjà, afin d'éviter d'être tracé ». Mais au-delà de l'écoute des télécommunications, se pose enfin la question des prises de parole publiques sur les réseaux sociaux, telles que celle du polémiste Dieudonné ce lundi.

Sur sa page Facebook, il a affirmé se sentir « Charlie Coulibaly », détournant le slogan « Je suis Charlie » et l'associant au nom du tueur présumé. « Il ne faut pas confondre la liberté d'opinion avec l'antisémitisme, le racisme, le négationnisme », a aussitôt répliqué Manuel Valls à Dieudonné, au sujet duquel une enquête a été ouverte pour apologie d'actes de terrorisme. Bref, le débat sur le rôle d'Internet est loin d'être terminé.


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