Terrorisme : Archive.org dans le viseur

Alexandre Broutart
Publié le 15 janvier 2016 à 19h00
L'Etat islamique auto-proclamé d'Irak (EI) utilise le Web pour diffuser ses messages. En France, plusieurs organismes dont le centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N) tentent de limiter la propagande en ligne.

Les autorités pointent du doigt les sites de diffusion ou d'hébergement de contenus Archive.org et Cloudflare. Via des communications publiques ou des cyber-attaques, les hackers aussi (notamment les Anonymous) dénoncent régulièrement la complicité passive de ces plateformes, qui ne désindexent pas les appels au terrorisme et à la haine de l'Occident.

Une note de l'état-major des armées françaises révélée par Le Figaro s'insurgeait contre le laxisme volontaire de ces bibliothèques en ligne. Au centre de lutte contre les criminalités numériques de la Gendarmerie, le Colonel Duvinage confirme. Interrogé par nos soins, il explique : « Je n'ai aucune réticence à les citer ouvertement (Archive.org), ils ne collaborent pas avec nous. Pire : ils signalent aux utilisateurs faisant l'apologie du terrorisme que les autorités française s'intéressent un peu trop à eux. »

De leur côté, les sites concernés rétorquent que leur attachement à la liberté d'expression prime, et qu'il ne leur appartient pas d'exercer des jugements de valeur sur les contenus qu'ils abritent. Le PDG de Cloudflare, Matthew Prince, s'irrite contre ces accusations à son égard : « Après le 11 septembre, mes amis européens ont été prompts à critiquer le Patriot Act (...) Beaucoup de gens disaient alors qu'on ne pouvait plus faire confiance aux entreprises technologiques américaines à cause de cette mesure. J'ai l'impression que désormais, l'Europe a sa propre réaction réactionnaire. ».

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Enregistrement du religieux Muhammad Bazmul issu du site Archive.org : « est-ce que l'établissement de la religion va se faire par ceux qui l'ignorent et ne la connaissent pas ? Est-ce que le califat islamique s'établit sur base de rendre licite le sang ? Ceci est certes en contradiction avec la législation de la charia. »


Certains documents attestent toutefois que s'il existe sur Archive.org une très large diffusion des propos de l'EI (notamment via ses magazines Dabiq et Dar Al-Islam), place est aussi faite au contre-discours qui vise à désamorcer l'argumentaire fanatique en se référant de façon savante à la gnose musulmane.

« Ils ont leurs propres applications, codées, développées et diffusées par leurs soins »

Archive.org, cherche à mettre en avant sa vocation à protéger l'intégralité des contenus du Web, se voulant un peu la bibliothèque d'Alexandrie du 21ème siècle. Pour assurer la stabilité et la sécurité des données archivées, un site miroir fonctionnel d'Archive.org est conservé à la Bibliotheca Alexandrina en Égypte.

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Logiciel du centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N) à partir duquel un extrait de vidéo permet de retrouver les « primo-diffuseurs » (le premier site à avoir publié la vidéo)


De son côté, l'EI utilise les réseaux publics pour faire l'apologie de leurs crimes tout aussi bien que les réseaux anonymes pour commettre leurs méfaits. Pour communiquer, « ils ont leurs propres applications smartphones, codées, développées et diffusées par leurs soins » affirme le colonel Duvinage, qui nous révélera par la même occasion que des obstacles législatifs majeurs bloquent le travail de son équipe : « Le procureur refuse que j'ouvre une enquête sur un vendeur d'armes du Darknet, si je ne peux prouver l'existence du crime organisé, c'est la loi. Et de par la nature même du réseau anonyme, on ne peut jamais le prouver. »

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