Derrière l'élan philanthropique de Zuckerberg

Thomas Pontiroli
Publié le 02 décembre 2015 à 18h18
Quand Mark Zuckerberg, 31 ans et septième fortune mondiale, annonce qu'il va céder 99 % de sa fortune de 47 milliards de dollars environ, cela implique une petite mise en perspective.

Mark Zuckerberg a annoncé qu'il cèderait 99 % de sa fortune - à peu près 45 milliards de dollars - à une fondation qu'il crée lui-même, dans le but d'améliorer le futur des gens. Une annonce encore vague, et plus complexe que cela. En effet, la somme concernée n'existe pas vraiment : ce sont des actions Facebook qui, tant que le PDG ne dénouera pas sa position sur le marché, ne profiteront pas totalement à la fondation.

Dans un document remis au gendarme de la Bourse américain, Mark Zuckerberg précise en outre qu'il ne versera pas plus de 1 milliard de dollars par an d'ici les trois prochaines années. Beaucoup d'argent, mais là encore, on est extrêmement loin des 45 milliards qui, à ce rythme, demanderont 45 ans pour être perçus par la fondation. Et comme il s'agit d'actions, leur valeur est bien sûr amenée à fluctuer. Dans quel sens, ça...

Optimisation fiscale

Le site Buzzfeed a également noté que le statut de cette fondation était celui d'une société à responsabilité limitée (LLC, aux États-Unis), ce qui l'autorise à investir dans ce qu'il souhaite, et pas uniquement dans les œuvres de bienfaisance existantes. Mark Zuckerberg déclare vouloir soutenir la formation, la lutte contre les maladies ou le rapprochement entre les peuples... Bref, s'il décide que d'une façon ou d'une autre, Facebook contribue à ces missions, rien n'empêchera a priori le milliardaire d'investir dans ses propres affaires.


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Mark Zuckerberg en compagnie de sa femme, Priscilla Chan et de leur fille, Maxima - Crédit : Mark Zuckerberg.


Ce transfert de capitaux à sa fondation - alors qu'il garde l'entièreté de ses droits de votes - permet enfin à Mark Zuckerberg d'éviter de payer des taxes sur les plus-values et de pouvoir en léguer une partie, pourquoi pas, à sa fille (Maxima) qui vient de naître, en s'affranchissant des droits de succession. Enfin, comme le décrit le site Daily Beast, Facebook pourra déduire l'an prochain un tiers de ce « don » de ses impôts.

La démarche de Mark Zuckerberg semble être un savant mélange des genres entre philanthropie sincère, communication qui tombe à point nommé pour la naissance de sa fille et optimisation fiscale. Néanmoins, les capitaux qu'il compte engager n'en sont pas moins énormes, et aideront sans doute certaines causes.


Débat philosophique

La même logique prévaut avec la connexion à Internet satellitaire que Facebook teste depuis octobre avec Eutelsat. Derrière son discours humaniste, l'intérêt du géant américain est d'étendre sa domination sur le Web mondial, quitte à raccorder lui-même les régions qui n'ont pas, ou peu de connexion à Internet. D'un autre côté, ces zones pourront profiter de cette connectivité au Web pour autre chose que le réseau social.

Comme disait Adam Smith, l'un des pères du libéralisme économique, « ce n'est pas de la bienveillance du boucher, du brasseur ou du boulanger que nous attendons notre dîner, mais plutôt du soin qu'ils apportent à la recherche de leur intérêt. Nous ne nous en remettons pas à leur humanité, mais à leur égoïsme ».

En attendant que les milliards de Mark Zuckerberg affluent dans les hôpitaux et les écoles, que Facebook paie ses impôts dans les pays où il a une activité commerciale le ferait participer à l'effort de redistribution, et contribuer de façon plus concrète à atteindre le « monde plus égalitaire » qu'il appelle de ses souhaits.


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