Les algorithmes complexes chargés de gérer l'évolution des prix en fonction de l'offre et de la demande dans l'univers du transport, ferroviaire ou aérien, pourraient également intégrer chez certaines compagnies un composant supplémentaire, chargé de mesurer l'attrait d'un voyage pour un internaute donné en fonction de ses recherches préalables. La technique, mise en lumière dans un article du Monde daté du 24 janvier, est surnommée IP Tracking (ou ciblage IP) : c'est en effet par son adresse IP que l'internaute serait identifié lors de ses premières simulations, l'objectif étant de favoriser le passage à l'acte d'achat en lui affichant des prix progressivement croissants.
Vraisemblablement interpellée par cet article, l'eurodéputée socialiste Françoise Castex a réclamé lundi l'ouverture d'une enquête à la Commission européenne par l'intermédiaire d'une question écrite, reproduite ci-dessous. « De plus en plus d'internautes européens, usagers de sites d'achat de billets en ligne, se disent victimes de l' "IP tracking" utilisé par les opérateurs de transport européens », constate-t-elle avant de demander : « La Commission européenne estime-t-elle que ces pratiques sont conformes au droit de l'Union européenne ? ».
L'efficacité de la méthode - généralisée chez les compagnies aériennes asiatiques selon un commentateur cité par le Monde - serait prouvée. Augmenter par petits paliers le prix laisse en effet penser à l'internaute que la disponibilité des places pour un trajet donné diminue, et constituerait donc un puissant levier incitatif.
Interrogées par le Monde, la SNCF et Air France assurent ne pas pratiquer l'IP Tracking : les variations subites de prix que peuvent parfois observer les clients entre deux simulations tiendraient selon elles aux « systèmes qui gèrent les disponibilités par tarif », lesquels fonctionnent en temps réel et peuvent donc afficher, à quelques minutes d'intervalle, des tarifs différents pour un même trajet. Un yield management dont l'opacité est encore accentuée, dans l'univers aérien, par les différentes classes de réservation appliquées sur une même catégorie de sièges, et qui peut rendre la lisibilité des tarifs bien difficile.
En attendant que la Commission européenne se saisisse du sujet, les plus suspicieux pourront partir du principe qu'il convient d'effectuer leurs simulations et leurs réservations depuis deux adresses IP différentes.