Talon, un robot qui fait partie du SFPD (© U.S. Army photo by Sgt. Lorie Jewell x Clubic)
Talon, un robot qui fait partie du SFPD (© U.S. Army photo by Sgt. Lorie Jewell x Clubic)

Le département de police de San Francisco milite auprès du conseil de surveillance de la ville pour donner à ses robots le pouvoir de tuer des suspects.

La lecture du titre et du chapô de cet article pourrait vous donner un sourire ironique et vous faire penser qu'il se cache un loup derrière cette actualité, mais non, il n'y a rien de plus sérieux. Depuis le début de l'année, le San Francisco Board of Supervisors (le conseil de surveillance de la ville) étudie la requête de la police locale, le SFPD, qui veut que ses robots puissent obtenir un permis de tuer.

La très faible opposition des autorités locales

Parmi les éléments de la nouvelle politique de la police de San Francisco, qui doit préciser comment elle peut être autorisée à utiliser des armes de type militaire, le recours à la force robotique est plus que présent. Et l'insistance est de mise.

Dans un premier temps, l'un des trois superviseurs du comité du conseil de surveillance de la ville, Aaron Peskin, a ajouté une mention précisant que « les robots ne doivent pas être utilisés comme recours à la force contre qui que ce soit. » Sauf que dès la semaine suivante, le SFPD a renvoyé une nouvelle version du texte, barrant d'un épais trait rouge la modification précédemment apportée par M. Peskin, doyen du conseil de surveillance.

Dans sa version actuelle donc, le texte prévoit que « les robots ne seront utilisés comme une option de force mortelle que lorsque le risque de mort pour des citoyens ou des officiers est imminent et l'emporte sur toute autre option de force disponible ».

Des robots déjà prêts à entrer en action

En d'autres termes, le projet étudié par la municipalité de la City by the Bay attribue bien aux robots une autorisation de donner la mort. Même Peskin, un temps frondeur, a décidé de se ranger du côté de la police, sous prétexte qu'« il pourrait y avoir des scénarios où le déploiement d'une force létale constituerait la seule option ».

San Francisco et son célèbre cable car (© Alexandre Boero)
San Francisco et son célèbre cable car (© Alexandre Boero)

Le comité des règles de San Francisco a approuvé à l'unanimité le texte, désormais dans les mains du conseil de surveillance de la ville, qui en discutera dans quelques jours, le 29 novembre. Si Aaron Peskin s'est laissé convaincre, ce n'est pas le cas des opposants à la militarisation de la police. « Ce n'est pas normal. Aucun professionnel du droit ou résident ordinaire ne devrait continuer comme si c'était normal », s'offusque Tifanei Moyer, avocate principale du Lawyers's Committee for Civil Rights of the San Francisco Bay Arena, un organisme à but non lucratif.

Aujourd'hui, le SFPD dispose d'une flotte de 17 robots télépilotés, dont 12 sont pleinement fonctionnels. Ils n'ont encore jamais été utilisés pour attaquer qui que ce soit, même si certains modèles Remotec possèdent il est vrai un système d'armes en option, et que d'autres peuvent charger un fusil de chasse de calibre 12. Habituellement, ils sont télécommandés pour enquêter et désamorcer des bombes potentielles, ou alors pour remplacer les agents sur des terrains de surveillance trop difficiles d'accès.

La nouvelle politique qui fait tant débat prévoit, en plus de donner le droit de tuer, d'autoriser les robots à être utilisés durant des formations ou simulations, mais aussi en cas d'arrestations criminelles, pendant l'exécution d'un mandat ou pour évaluer la dangerosité d'appareils suspects. Si la police de San Francisco essaie de minimiser au maximum la potentielle utilisation mortelle d'un robot, le fait de franchir ce cap, d'un point de vue légal, est tout de même assez inquiétant.