Une cellule, un trou au milieu et une table garnie des mets les plus onctueux. C'est le point de départ de La Plateforme, le nouveau film exclusif Netflix qui ne vous fera plus regarder votre nourriture de la même manière.
Nous nous donnons 5 citations et 5 paragraphes pour vous convaincre.
La Plateforme (2020)
de Galder Gaztelu-Urrutia« La question est : qu'est-ce qu'on va manger ? »
La Plateforme est la dernière production proposée par la plate-forme de SVOD et fait sensation depuis sa mise en ligne, à en juger par le nombre de commentaires postés sur les réseaux sociaux.Le pitch ? On ne peut plus simple. Un homme, Goreng, se réveille dans une cellule avec un inconnu. Ils sont au 48ème étage d'une tour-prison. Au milieu de cette pièce, un trou d'où descend la fameuse plateforme du titre. Celle-ci descend du premier étage remplie de mets en tous genres. Chaque étage ne laisse que ses restes aux prisonniers suivants.
« Ceux du dessus, ils voudront pas discuter avec des communistes »
Posons les choses d'emblée, La Plateforme est un film-concept, qui pose son univers et sa situation dès le départ sans se poser de questions. Et, à mon sens, la plus grosse erreur que l'on puisse faire quand on appuie sur la touche lecture est : se creuser la tête pour chercher des justifications.Même si le film propose de rares flashbacks, ils permettent simplement d'en savoir plus sur le personnage principal, ses motivations et son entrée dans la fosse. Savoir pourquoi la prison existe, qui sont les gens responsables de cet endroit si particulier, au fond, on s'en fiche. La Plateforme exige de prendre la situation pour argent comptant et de se laisser porter par la narration.
« Pensez à votre survie et coopérez »
Je suis convaincu que les contraintes stimulent la créativité. Et en la matière, La Plateforme est presque un cas d'école. Un décor unique, quelques acteurs et un peu de lumière, c'est tout ce que le réalisateur a sous la main pour mettre en place et développer son récit.Et fort heureusement Galder Gaztelu-Urrutia est suffisamment malin pour tirer parti de ces maigres d'éléments. La mise en scène est très travaillée et crée une ambiance étouffante, parfois insoutenable. La musique joue également un rôle très important pour créer le malaise, avec un jeu de percussions et de nappes atmosphériques très inspiré du Millenium de David Fincher et joué en permanence durant le métrage.
Le film ne lésine pas sur la violence graphique, mais les explosions d'hémoglobine restent furtives. Ce qui m'a vraiment retourné l'estomac, ce sont ces scènes interminables montrant les prisonniers se goinfrer de nourriture. On ne compte plus les gros plans sur ses portions de bouffe prises à pleines mains et englouties jusqu'à la nausée.
Malgré le peu d'éléments à l'écran, le scénario arrive constamment à se renouveler et à trouver une astuce pour réveiller notre intérêt jusqu'à la scène finale.
« Madame, le changement n'arrive jamais de manière spontanée »
Vous l'aurez compris en lisant le synopsis, La Plateforme est aussi et surtout une gigantesque métaphore sur la société, avec les puissants, ou les premiers de cordée comme on les appelle aujourd'hui, qui ont la possibilité de se gaver au-dessus et de déféquer (littéralement) sur les miséreux, qui n'ont plus que les miettes à se partager quitte à s'entretuer pour cela.La démonstration est brute de décoffrage, un peu grossière aussi, mais La Plateforme nuance son propos en s'attardant sur sa galerie de personnages. Goreng sera enfermé avec plusieurs co-détenus qui lui apporteront leurs différents points de vue sur la fosse. Nihiliste, religieux, idéaliste ou sachant, chaque protagoniste, par ses mots ou par ses gestes, permet d'affiner sa réflexion comme celle de notre héros.
Essayer désespérément de s'en sortir, ou accepter la situation et se plier aux règles établies ? Individualisme ou solidarité ? Soumission ou libération ? Le film ne parle que de ça finalement, et propose une démonstration qui a peut-être la finesse d'un rhinocéros, mais parfois une image vaut mieux que mille mots.
« Le message, c'est la panna cota »
Le propos est profondément social et politique et a parfaitement fonctionné chez moi, malgré ses gros sabots. Si je ne jette pas l'argent par les fenêtres et la nourriture sur le sol en temps normal, le film m'aura suffisamment remué pour tenter de faire un peu mieux et de modifier mes habitudes de consommation.Et puis vient la fin, que beaucoup considèrent nébuleuse ou cryptique. J'avoue ne pas comprendre cette incompréhension tant le message est limpide. Sans déflorer quoique ce soit, tout est symbolique dans La Plateforme et c'est en analysant chaque élément comme tel que l'on arrive à une conclusion. Probablement qu'elle sera légèrement différente pour vous, selon votre ressenti, votre vécu ou vos opinions. Elle n'en sera pas moins pertinente.
J'ai vécu La Plateforme bien plus comme une expérience qu'un simple film de divertissement. C'est anxiogène, souvent très désagréable, mais le voyage, aussi éprouvant soit-il, vaut clairement le détour, si possible après être sorti de table.
La Plateforme est disponible à la demande sur Netflix