Déjà trois décollages de satellites Starlink et 180 satellites supplémentaires au sein de la constellation en ce mois de mars. SpaceX profite de la réutilisation de ses lanceurs pour accélérer et déployer son service. Les craintes se font de plus en plus grandes quant à la gestion du trafic en orbite.
Il faut cependant noter qu'aucune collision n'a encore eu lieu.
Si ça marche immobile…
Après une première phase de connectivité au sol pour l'habitat, SpaceX rendra-t-il la constellation Starlink disponible pour les véhicules ? Au début du mois, l'entreprise a déposé une demande en ce sens à la puissante autorité de gestion des télécommunications américaines, la FCC (même si Elon Musk a ensuite indiqué qu'il ne pensait pas rendre le service disponible au sein des modèles Tesla).
Une nouvelle demande jeudi dernier précise un premier contexte : les capacités de la constellation seront testées avec un véhicule en déplacement, ainsi qu'un avion en vol. Cette demande n'est pas désintéressée, CNBC révèle qu'il s'agit d'une campagne de tests au service de l'US Air Force, avec un partenaire industriel déjà identifié (Ball Aerospace) pour produire des antennes adaptées aux armées américaines.
La bêta « Mieux que rien » se porte bien
Les actualités autour de la constellation Starlink se multiplient. La semaine dernière, SpaceX annonçait que la phase de déploiement en « bêta-test » était étendue à une partie de l'Allemagne, à une nouvelle zone en Angleterre et en Australie. L'entreprise annonçait avoir dépassé les 10 000 utilisateurs pour la version « Better Than Nothing » début février, et ce sont probablement quelques milliers de testeurs supplémentaires qui ont reçu depuis leur antenne à 500 dollars (411,60 euros).
Le service n'offre cependant pas une couverture optimale pour le moment, avec des coupures malgré les débits qui promettent d'être « doublés » cette année (objectif 300 Mbit/s et 20 ms de latence). Depuis le 18 février, Starlink dispose d'une autorisation de déploiement en France.
Toujours plus de satellites
Sur le plan satellitaire aussi, SpaceX met la gomme. Six décollages depuis le début de l'année au service de Starlink, trois depuis début mars ! Le nombre total de satellites envoyés en orbite dépasse les 1 200 unités, même si toutes ne sont pas encore actives (et le premier lot de 60 prototypes est essentiellement désorbité à l'heure qu'il est). Environ 850 à 900 satellites sont aujourd'hui actifs dans le « maillage » de Starlink autour de la planète (les autres sont en attente ou transit), y compris 10 d'entre eux en expérimentation en orbite polaire.
Ce déploiement à marche forcée semble être uniquement dépendant des capacités de lancement de l'entreprise : étant donné les dernières annonces sur les cadences à venir, le site de production, à Redmond près de Seattle, peut produire au moins trois ou quatre satellites par jour sur de longues durées.
Pour assurer les décollages de ses « grappes » de 60 satellites et continuer de prendre de l'avance sur sa future concurrence (OneWeb et ses 110 satellites, Telesat et la future constellation Kuiper d'Amazon), SpaceX utilise et réutilise ses boosters de fusée. Une opération rodée depuis mars 2017 et la première réutilisation d'un étage de Falcon 9, que les équipes continuent d'affiner.
L'intervalle de temps entre deux vols est tombé à moins de deux mois en ce début 2021, tandis que les pas de tirs ont à peine le temps de refroidir : 10 jours d'écart seulement entre les deux derniers décollages depuis le LC-39A au Centre Spatial Kennedy ! Les barges de l'entreprise qui récupèrent les étages au large n'ont pas passé beaucoup de temps au port. Résultat concomitant, SpaceX accumule beaucoup d'expérience et de savoir-faire dans le domaine de la réutilisation. Le décollage du lot Starlink-21 dimanche 14 mars utilisait pour la première fois un étage réutilisé huit fois (son neuvième vol, donc), un record.
Vers des milliers de « survols proches » chaque semaine ?
En plus de la communauté astronomique qui continue de tirer la sonnette d'alarme face aux difficultés d'observations liées à Starlink, mais aussi aux autres constellations, plusieurs experts alertent sur les risques de collisions présents et futurs que pose la constellation. Il s'agit en effet de la plus grande flotte de satellites jamais opérée, et Starlink représentera à elle seule près de la moitié des satellites actifs en orbite de la Terre d'ici la fin de l'année.
SpaceX utilise un algorithme « intelligent » pour éviter les collisions entre ses unités, et a fait appel à la PME Leolabs pour surveiller la trajectoire de ses satellites comme des débris qui gravitent autour, mais cela risque de ne pas suffire. En effet, le catalogue du réseau SOCRATES a permis d'étudier le nombre de « passages proches » (moins d'1 km d'écart) impliquant les satellites Starlink entre mi-2019 et février 2021.
Ce sont ainsi entre 900 et 1 000 événements chaque semaine qui sont d'ores et déjà générés par la constellation, dont plus de 200 concernent les satellites Starlink avec d'autres objets identifiés (autres satellites actifs ou inactifs, débris). Un chiffre en constante augmentation ces six derniers mois au fur et à mesure que l'entreprise accélère son déploiement. Cela représente déjà 40 % des « passages proches » enregistrés entre les objets suivis en orbite basse en 2021.
À noter que la distance lors de ces approches peut varier, et ne représente pas systématiquement un danger pour les objets concernés… mais cette limite est utilisée pour souligner le nombre grandissant (et pour plusieurs experts, inquiétant) de croisements dans une population croissante en orbite basse.
Sources : Spaceflightnow, CNBC