Si des amateurs ne l'avaient pas suivi, ce serait probablement passé inaperçu.
Crash test
Le 11 février 2015, SpaceX envoyait la petite sonde DSCOVR hors de l'orbite terrestre, vers le Point de Lagrange Soleil-Terre L1, à 1.5 millions de kilomètres de notre planète. Le décollage était très important pour l'entreprise de Hawthorne, puisque c'était la première fois que la NASA et la NOAA confiaient à SpaceX une mission aussi lointaine… Et tout s'était bien passé. Depuis, la mission poursuit sa surveillance des éruptions solaires, et elle est très connue grâce à sa caméra Epic, tournée vers la Terre dont elle « voit » en permanence une demi-sphère. Et l'étage supérieur de Falcon 9 ? Il est sur une orbite autour de la Terre… Mais chaotique.
En effet depuis 2015, sa trajectoire a été influencée plusieurs fois par la Lune. Ce qui aurait très bien pu mener à l'éjecter de l'orbite terrestre… Mais mène finalement à ce qu'il aille s'écraser sur notre satellite naturel, le 4 mars. Le point d'impact est encore peu précis, et l'équipe (amateure) qui a fait cette découverte espère disposer d'une estimation plus fiable d'ici début février. Ce sera dans tous les cas sur la face cachée de la Lune, aussi n'espérez pas, comme sur certains visuels fantaisistes, voir un quelconque impact.
Il pleut des Falcon 9 (non)
Et même s'il était possible d'observer précisément l'impact de l'étage, ce dernier sera très limité. Ce bloc supérieur de Falcon 9 pèse 4 tonnes (essentiellement à cause de son unique moteur fusée), ce qui ne va rien changer à la surface lunaire, qui subit chaque année des centaines d'impacts de petits astéroïdes (tout comme la Terre d'ailleurs, même si pour nous ils sont consumés dans l'atmosphère). Il sera éventuellement possible, lorsque la trajectoire et le point d'impact seront affinés, que l'un des orbiteurs en fonction autour de la Lune soit capable de photographier, voire de filmer l'impact : Chandrayaan-2 (Inde) et Lunar Reconnaissance Orbiter (États-Unis) sont tous les deux capables de photographier la surface avec une précision supérieure à 50 cm/pixel.
Restent les annonces sensationnalistes de certains. Il est abusif de dire que l'étage est « hors de contrôle », il est tout simplement inerte et ne risque pas de tourner par surprise. Tout aussi fantaisistes, les articles qui s'inquiètent pour les orbiteurs (imaginez le degré de malchance pour un impact, compte tenu des volumes évoqués) ou pour les missions au sol (il n'y en a qu'une sur la face cachée, proche du pôle Sud). La palme est peut-être à donner au site Wion, qui illustre son article avec un véhicule… Qui s'est lui-même crashé sur la Lune.
Courez pour vos vies !
Car oui, crasher des véhicules sur la Lune n'est pas si rare que cela. Il y a eu bien sûr des missions ratées, comme Vikram ou Beresheet récemment, mais aussi des étages volontairement envoyés vers la Lune comme en 2007 (étage d'Atlas V) ou lors des missions Apollo. Cela n'en fait pas une « poubelle » comme certains titres le regrettent, même s'il y a quelques dizaines de tonnes de métaux en pièces, sur une surface de la taille de l'Asie. Sans compter enfin qu'il y a peu à polluer sur place : pas d'atmosphère, et une surface inerte soumise au travail de l'érosion solaire depuis des centaines de millions d'années. Falcon 9 ne va rien révéler… Et ce n'est pas la dernière fois que des pièces vont se briser sur place.
Source : SPACE