Matériau « miracle », utilisé à presque toutes les sauces marketing, le graphène ouvre des perspectives dans tous les secteurs.
L'une des plus sérieuses pistes actuellement prend place dans le domaine du transport d'informations ; elle permettrait de dépasser, d'une certaine façon, les conjectures de Moore, plus vraiment d'actualité.
La mécanique du spin
Un groupe de chercheur de Manchester a publié récemment une étude sur le développement de la spintronique dans l'informatique, et plus précisément de l'utilisation du graphène dans le traitement de l'information. Mais reprenons un peu les bases.
La spintronique n'est pas forcément un domaine connu, mais se retrouve pourtant appliquée dans les disques dur et quelques SSD modernes. Sous ce nom étrange se cache l'alliance de l'électronique classique, portée par la charge des électrons, et du spin, propriété intrinsèque de l'électron difficilement explicable, car se jouant à un niveau quantique et n'ayant pas d'équivalent macroscopique.
Pour essayer de faire simple, le spin désigne le phénomène de rotation de l'électron sur son axe, dans un sens ou dans un autre, ces deux sens donnant des moments magnétiques inverse et par conséquent un « courant magnétique » se transmettant dans un sens ou dans l'autre dans des matériaux ferromagnétiques.
Le phénomène de spin est théorisé depuis le début de la physique quantique, mais ne fut véritablement développé qu'à partir des années 90 et l'essor des nanotechnologies, l'exploitations des propriétés spintroniques n'étant possible que sur des matériaux d'épaisseur infime, au mieux de quelques nanomètres, et si possible bidimensionnels.
L'intérêt de la spintronique se retrouve dans une de ses propriétés intrinsèque, la magnétorésistance géante, se caractérisant par la modification de la résistance électrique d'un ensemble sous l'effet d'un champ magnétique (externe).
En prenant par exemple une couche de métal non-magnétique en sandwich entre deux couches de métal ferromagnétique (du fer par exemple), il est possible de faire énormément varier la résistance électrique de l'ensemble sous l'effet d'un champ magnétique. Ce champ magnétique externe joue ici sur le spin des électrons dans les deux couches ferromagnétiques, modifiant le parallélisme de l'aimantation de l'un par rapport à l'autre, ce qui permet de créer cet effet de magnétorésistance géante.
Ce principe fut tout d'abord appliqué sur les têtes de lecture de disque de la fin des années 90, permettant de grandement augmenter le facteur de stockage, ou plutôt la sensibilité de cette tête de lecture. Des applications type capteurs, directement dérivées de ce principe, furent également développées et sont encore utilisées aujourd'hui.
Mais la magnétorésistance a également permis d'aller un peu plus loin en développant le technologie de la MRAM, ne stockant plus la mémoire sous forme de charge électrique (très volatile) mais sous forme d'orientation magnétique (non-volatile) en modifiant le spin des électron par effet tunnel (un effet à l'échelle quantique que nous ne développerons pas ici). La MRAM est annoncée de longue date, mais n'est apparue sur des SSD que très récemment et reste encore un stockage d'avenir.
Du stockage à la transmission
Stockage et transmission sont deux choses différentes, et c'est là le sujet d'étude développé par les chercheurs.
Leur réflexion porte sur le graphène et ses propriétés révolutionnaires pour imaginer un transport de l'information allant plus loin que la simple interaction électrique, en exploitant aussi la spintronique. Rappelons que le graphène est un matériau bidimensionnel, alignement particulier d'une seule couche d'atomes de carbone.
Ici, l'un des principes serait d'exploiter la structure du graphène, en la modifiant ou non (perte d'un atome de carbone à tel ou tel endroit précis
par exemple), afin de créer des réseaux logiques, soit des sortes de transistors virtuels crées par effet spintronique. Sur le papier, cela permettrait de totalement contourner la limite de gravure des transistors, de plus en plus difficile à dépasser, et de réduire considérablement les effets de dissipations thermiques.
Si l’étude précise que le contrôle du spin dans le graphène et autres matériaux bidimensionnels est de plus en plus prometteuse, elle montre
également que nous n'en sommes qu'aux balbutiements, et que la technique pour arriver à ces structures logiques n'est pas encore bien définie.
Une chose semble sûre néanmoins, le matériau est clairement ce qui existe de plus prometteur pour le futur de l'informatique.
Source : sciencedaily