Dans un entretien accordé à l'AFP, le patron d'Orange a fait part de ses craintes quant à la propagation de la fracture numérique, qui concerne aujourd'hui la moitié de l'humanité.
En début d'année prochaine, le président-directeur général d'Orange, Stéphane Richard, prendra la tête de l'association mondiale des opérateurs (GSMA), qui regroupe plusieurs centaines d'opérateurs de télécommunications du monde entier. Le dirigeant français, qui veut stopper la fracture numérique, a accordé cette semaine un entretien à l'AFP, alors qu'est sorti à la fin du mois de septembre son livre Human Web : engagés pour une humanité connectée. Selon lui, la fracture numérique pourrait se résorber en seulement quelques années, si elle est prise à bras-le-corps.
Près de 4 milliards de personnes n'ont toujours pas accès à l'Internet mobile
À l'échelle mondiale, la fracture numérique a tendance à se creuser et elle continuera en ce sens « si on ne fait rien », prévient Stéphane Richard. 3,9 milliards de personnes sont en effet privées de connexion à l'Internet mobile, dont 80 % de la population du continent africain.Ce chiffre témoigne de ce qui doit être un enjeu majeur de ces prochaines années. Car les conséquences ne sont pas minimes : « On voit par exemple apparaître une forme d'exode numérique, des populations ou des entreprises qui vont là où il y a un meilleur accès au numérique », rappelle le PDG d'Orange. Une meilleure connectivité numérique finirait mécaniquement par stabiliser ces situations de crise, c'est du moins l'argument que le dirigeant avance.
Quels acteurs pourraient résorber la fracture ?
« Les conditions ne permettent pas aux opérateurs d'assumer seuls un tel déploiement ». Au moins, Stéphane Richard a le mérite d'être clair, en clamant que le rôle d'un opérateur est de déployer ses services « là où se concentre la population ».Pour donner de l'épaisseur à ses propos, le patron de 57 ans prend l'exemple du New Deal mobile en France, le fameux accord signé entre le gouvernement et les opérateurs, sous l'œil avisé de l'ARCEP, pour mettre fin aux zones blanches ou grises sur le territoire. Selon le dirigeant, un « new deal d'ordre mondial » pourrait s'appliquer, à commencer par l'Afrique. Pour lui, le problème pourrait même se régler « en deux ou trois ans », prenant encore l'exemple de la France, où la 4G n'a pris que trois ans pour s'imposer dans tout l'Hexagone. Le devoir journalistique nous impose tout de même de préciser que de nombreuses zones, rurales notamment, sont toujours bloquées à la 3G, voire pire, et qu'Orange a déjà été rattrapé par la patrouille pour un mauvais entretien de son réseau ADSL, mais c'est un autre débat.
Stéphane Richard reste optimiste et compte mettre son mandat de deux ans de président du GSMA au service de cette cause. « Je vais en parler tout au long de l'année, lors de mes différentes interventions », prévient-il. Pour que ses propos aient une résonance, il a conscience de devoir convaincre les autres opérateurs, partout dans le monde, mais aussi les géants du numérique et les institutions internationales comme le FMI ou la Banque mondiale, pour que chacun apporte sa pierre à l'édifice. Pas si simple...