TF1 Molotov

Les groupes TF1 et M6 ne fusionneront pas. Le groupe Bouygues a fait savoir à l'Autorité de la concurrence qu'il se retirait du projet, vendredi après-midi.

Petit tremblement de terre dans le monde des médias. Juste avant de savourer un délicieux départ en week-end, v'là-t'y pas que l'Autorité de la concurrence met à mal nos plans pour nous prévenir que… TF1 et M6 ne fusionneront pas. Le groupe Bouygues, maison-mère de TF1, a en effet décidé de se retirer du projet d'acquisition du groupe Métropole Télévision (M6). Un revirement dont l'Autorité indique « prendre acte ». Mais pourquoi une telle bascule, face à une union qui s'annonçait prometteuse ?

TF1 et M6, un mariage qui n'aurait pas remis en cause la puissance de la télévision et de ses acteurs…

Cela faisait plus d'un an que TF1 et M6 discutaient de leur fusion potentielle, jusqu'à ce qu'on apprenne, cet été, qu'il y avait de l'eau dans le gaz et que le mariage pourrait ne pas avoir lieu. Cette crainte est devenue réalité, vendredi 16 septembre, avec l'annonce faite par le groupe Bouygues de retirer son projet d'acquisition, alors qu'il souhaitait prendre le contrôle exclusif du groupe Métropole Télévision.

L'opération visait à réunir, au sein du même groupe, par moins de sept chaînes de la TNT en clair, à savoir TF1, M6, TMC, Gulli, LCI et TF1 Séries Films. Les deux groupes s'étaient mis d'accord de céder les chaînes TFX (qui appartient à TF1) et 6ter (qui appartient à M6) au groupe Altice pour prévenir des risques de concentration du marché et ainsi obtenir le feu vert de l'Autorité de la concurrence. De même, les deux parties étaient prêtes à renoncer à la licence TNT de la chaîne Paris Première.

L'Autorité de la concurrence était entrée dans une phase dite d'examen approfondi de ce projet de fusion. Elle avait récemment confirmé que malgré les profondes mutations que connaît le monde de la télévision, celui-ci reste un média « très puissant auprès de la population française dans son ensemble », et notamment des cibles commerciales des annonceurs.

L'autorité administrative indépendante était même confiante en l'avenir, en ce qu'elle constate que le développement des services de vidéo à la demande par abonnement (VàDA) ne remet pas en cause, ni aujourd'hui ni à terme, la puissance de ce média, « dans la mesure où ces derniers ont vocation à rester des modèles payants », alors que la télévision reste en grande partie gratuite et accessible à tous les ménages. L'opération faisait tout de même peser un risque concurrentiel, en ce que TF1 et M6 auraient concentré une plus grande partie des revenus publicitaires du marché télévisuel et de la distribution de services de télévision en ligne.

…mais qui d'un point de vue publicitaire, semblait intenable

À eux deux et à l'issue de leur fusion, les groupes TF1 et M6 auraient récolté plus de 70 % des recettes publicitaires provenant de la télévision, et 35 % de l'audience. Partant de ce constat, l'Autorité de la concurrence a émis des doutes, avant de réclamer de lourdes concessions aux deux parties prenantes. Elle indiquait récemment que le futur groupe aurait disposé d'un pouvoir de négociation considérable vis-à-vis des annonceurs mais aussi des fournisseurs d'accès à Internet.

En outre, l'Autorité de la concurrence avait salué la proposition de séparer les régies publicitaires des chaînes TF1 et M6. « Les incitations de ces régies à se faire concurrence auraient toutefois été limitées par le contrôle que Bouygues aurait exercé sur elles », indiquait Benoît Cœuré. Et le président de l'Autorité d'ajouter que « le risque de hausse de prix n'aurait donc pas pu être écarté ».

TF1 et M6, qui estiment qu'en l'état, le projet « ne présentait plus aucune logique industrielle », déplorent le fait que l'Autorité de la concurrence « n'ait pas pris en compte l'ampleur et la vitesse des mutations du secteur de l'audiovisuel français » et restent convaincus que le mariage aurait apporté une concurrence de poids face aux grandes plateformes internationales.