En France, Netflix a vu son chiffre d'affaires exploser en 2021. Pourtant, l'entreprise paie toujours un maigre impôt au fisc.
D'un point de vue fiscal, on peut dire qu'il y a du mieux du côté de Netflix, si l'on doit tirer un bilan de ses activités menées en 2021 en France. Pourtant, derrière les efforts, on retrouve encore des données disproportionnées entre ce que gagne réellement la firme de Reed Hastings en France, et ce qu'elle paie comme impôts sur les bénéfices à l'administration fiscale locale. Entrons dans les détails.
Un chiffre d'affaires enfin supérieur au milliard d'euros en France
Ce n'est évidemment pas encore suffisant, mais Netflix rentre doucement dans le rang de ce qu'attendent les Français en matière de fiscalité : c'est-à-dire l'égalité entre toutes les entreprises. Pour l'année 2020 par exemple, la société n'avait déposé sur sa feuille d'impôt que 56 millions d'euros de chiffre d'affaires pour son service de streaming. En 2021, celle-ci a déclaré 1,2 milliard (oui oui, vous lisez bien « milliard ») d'euros de revenus en France. Mais qu'est-ce qui explique un tel écart ?
En 2020, lorsque vous souscriviez un abonnement au service, le contrat était géré par Netflix International BV, une entité néerlandaise. Depuis 2021, c'est l'entreprise de droit français Netflix Services France SAS qui s'en occupe. D'où l'explosion du chiffre d'affaires, avec des données transmises par nos confrères de Capital. Le chiffre réel serait même de 1,32 milliard d'euros, avec la mise à jour du nombre d'abonnés, qui a dépassé les 10 millions dans le pays.
Évidemment, il y a encore un hic. Le chiffre d'affaires est un peu plus conforme à la réalité désormais, mais pas les bénéfices. En 2021, la filiale française de Netflix a dégagé 22,3 millions d'euros de bénéfices opérationnels. Au niveau de la marge opérationnelle, on plonge à seulement 2 %, contre 20 % avant impôt aux États-Unis sur la même période.
Des impôts sur les bénéfices faibles grâce à une belle optimisation fiscale, certes, mais Netflix honore plusieurs autres charges
Au final donc, Netflix n'a payé que 6,5 millions d'euros d'impôts sur les bénéfices au titre des revenus générés en 2021. C'est beaucoup plus que pour l'année 2020 (728 033 euros d'impôts), mais cela reste dérisoire au regard des revenus globaux de la société californienne dans l'Hexagone. Deuxième question que vous pouvez vous poser : tout ceci est-il légal alors, nom de Zeus ?
Et la réponse est « oui », non sans une optimisation fiscale bien maîtrisée. Dans les faits, Netflix France reverse 85 % de son chiffre d'affaires à d'autres entités du groupe, comme la fameuse branche néerlandaise Netflix International BV. La filiale française n'est qu'une distributrice de service qui empoche une commission de distribution, qui serait décidée selon les principes de l'OCDE sur les prix de transfert appliqués entre sociétés issues du même groupe. La filiale néerlandaise, elle, n'œuvre que via un accord de licence, ce qui l'allège en impôts également.
Mais c'était encore pire avant, puisque jusqu'en 2019, toutes les activités internationales de Netflix transitaient par une société résidente fiscale aux îles Caïmans, bien que basée aux Pays-Bas. Depuis, les activités hors-US de la firme sont détenues par la maison-mère, à Los Gatos.
Bon, Netflix paie bien moins d'impôts sur les bénéfices qu'il devrait, mais le géant verse une TVA sur les services en ligne, à hauteur de 20 %, qui a pu rapporter 240 millions d'euros à l'État l'an dernier. On n'oublie pas non plus la taxe de 5,15 % sur son chiffre d'affaires offerte au Centre national du cinéma (CNC), pour financer le 7e art et ses acteurs, et les 200 millions d'euros investis chaque année dans des films et séries européens, au titre de la directive SMAD.