Les PME françaises adeptes de la VoIP ?
Les solutions de VoIP professionnelles développées par les équipementiers réseau (Cisco, Alcatel-Lucent, Nortel, Nokia Siemens Networks, Ericsson, Avaya, 3Com...), les éditeurs de logiciels (IBM, Microsoft, Broadsoft, Comverse...) et les opérateurs (France Telecom, Neuf Cegetel, BT, Telecom Italia...) ne sont plus réservées aux grands comptes. D'après l'Idate, début 2008, 46% des PME françaises ont souscrit un abonnement de téléphonie fixe basé sur des services de VoIP, contre 7% en 2006. Selon Guillaume Goudard, chef de projet au sein de la société d'études, « en 2011, environ 75% des lignes fonctionneront sur des ports IP et des accès data, et 25% encore en TDM (Time Division Multiplexing) », solutions traditionnelles de téléphonie.
Par ailleurs, comme les particuliers, les petites et moyennes entreprises utilisatrices de la VoIP plébiscitent les solutions multiservices des opérateurs. Celles-ci permettent, via une 'box' (modem/routeur) de combiner accès internet haut débit et téléphonie par internet. Ainsi, selon l'Idate, 73% des PME françaises adeptes de la VoIP utiliseraient ce type de service à l'heure actuelle. Cependant, à partir de 50 salariés, les multiplexeurs téléphoniques privés, PABX (Private Automatic Branch eXchange) et IPBX (Internet Protocol Private Branch eXchange), sont privilégiés. D'après l'Idate, 93% des entreprises de 50 à 250 salariés disposeraient d'un PABX, parmi elles 23% auraient opté pour un IPBX ou un PBX hybride. L'institut conclut : « à moyen terme, ce type de solution devrait devenir majoritaire pour les PME multisites ».
A nous les softphones !
Les particuliers connectés par ADSL ou par câble à l'internet haut débit se sont intéressés à la VoIP avec le lancement, dans les années 2004-2005, de softphones, dont Skype qui permet d'appeler gratuitement de PC à PC, et Jajah, service de call back. Les clients de messagerie instantanée avec fonction de VoIP, comme Windows Live Messenger, Yahoo Messenger, Google Talk ou encore Nimbuzz dans la VoIP mobile, participent également à l'engouement des internautes pour la VoIP. D'autres solutions, telles que Wengo, Ekiga et le Gizmo Project, utilisent le standard ouvert SIP (Session Initiation Protocol).
Skypemania
Entreprise fondée en 2003 par le suédois Niklas Zennström et le danois Janus Friis, rachetée par le groupe américain eBay pour la somme de 2,6 milliards de dollars en 2005, Skype est rapidement devenue la référence internationale en matière de softphone.
Logiciel de VoIP basé sur une technologie P2P, Skype est proposé en 28 langues, dont le français. Outre la fonction gratuite d'appel entre utilisateurs de Skype (logiciel à télécharger sous Windows, Mac OS X ou Linux), la société du même nom propose des services payants, dont SkypeOut pour passer des appels à tarif réduit depuis Skype vers des téléphones fixes et mobiles, SkypeIn pour être appelé d'un téléphone fixe ou mobile sur Skype, Skype to Go (abonnement mensuel) pour passer des appels internationaux depuis n'importe quel téléphone (numéro spécifique depuis un mobile ou fixe). L'engouement du grand public pour ses solutions, a amené Skype à adapter son offre à l'attention des professionnels et des entreprises (solutions PBX, partage et intégration avec des logiciels d'entreprise, dont Salesforce.com...) Skype estime que plus de 30% des appels effectués via sa technologie émanent de petites et moyennes entreprises.
Parallèlement, après avoir annoncé la disponibilité de Skype sur console PSP de Sony, la société a annoncé en avril 2008 la compatibilité de son offre avec un nombre élargi de terminaux cellulaires. Désormais en plus des propres terminaux commercialisés par Skype et des smartphones sous Windows Mobile, une version mobile Java du programme est disponible en version bêta en téléchargement pour une utilisation sous Symbian. Au printemps 2008, Skype a déclaré avoir franchi le cap des 300 millions d'utilisateurs de son logiciel de VoIP.
Les acteurs du logiciel menacent-ils l'industrie des télécoms ?
La menace reste limitée en France, selon les estimations de l'Idate. Qu'ils soient spécialistes de la messagerie instantanée ou du softphone, les éditeurs de logiciels et de services web « n'ont réellement pris des positions fortes que sur le trafic international (40% du trafic de Skype), que ce soit autour du trafic gratuit ou payant », déclarait l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep) l'an dernier.
Les offres de type 'box'
Les offres multiservices d'opérateurs, xDSL ou câble, qui intègrent une fonction de téléphonie sur IP et nécessitent un combiné associé à un modem/routeur, ont le vent en poupe. En France, Free (Iliad) a longtemps été le moteur de l'innovation avec une offre triple play (accès internet, télévision et téléphonie sur IP) facturée 29,99 euros par mois, associée à la fameuse Freebox (modem/routeur ADSL WiFi). Depuis, Neuf Cegetel, le premier à s'être lancé au niveau national dans le 'quadruple play' avec le Twin, un smartphone hybride pour réseaux Wifi et cellulaires, et Orange avec son Unik, ont affuté leurs « boxes ». Dans ce cadre, les communications voix vers les fixes au niveau national et de multiples destinations à l'international sont, le plus souvent, gratuites.
D'après l'Arcep, à la fin 2007 le nombre d'abonnements à internet était de 17,1 millions en France (+11,8% sur un an), dont 15,6 millions à haut débit (+22,5% sur un an), et près de 15 millions par ADSL. En valeur, le revenu du haut débit en France a atteint 1,1 milliard d'euros au quatrième trimestre 2007 (+25,8% sur un an), ce qui représente 91% de l'ensemble du revenu internet.
Par ailleurs, à la fin du quatrième trimestre 2007, le nombre d'abonnements à un service de voix sur large bande en France (essentiellement des abonnements en IP sur xDSL, les fournisseurs de services VoIP n'entrant pas dans le champ de l'enquête du régulateur) a atteint 10,8 millions, soit 27,4% de l'ensemble des abonnements téléphoniques. Sur un an, leur nombre a crû de 64% au rythme d'un million supplémentaire chaque trimestre. Quant à la part des communications IP dans le trafic au départ des postes fixes, elle est passée de 23% fin 2006 à 38% fin 2007. « Ce développement très rapide du trafic au départ des accès IP a permis de compenser largement la baisse du trafic sur le RTC (réseau téléphonique commuté) », a indiqué l'Arcep.
VoIP Business : des perspectives mobiles
La diffusion des formules forfaitaires multiservices, packagées fixe/internet, se généralise. La demande pour des offres de convergence fixe/mobile/internet émerge également. Pour les entreprises de taille moyenne, comme pour les foyers, l'élément décisif à l'adoption de la VoIP réside dans l'économie réalisée sur la facture téléphonique. Les PME, si l'on en croit l'Idate, sont également sensibles à la réduction du nombre de prestataires (un même opérateur IP pour l'internet et la téléphonie fixe) et l'accès à des fonctionnalités supplémentaires comme les communications unifiées (UC) et le travail collaboratif. Un frein au changement ? La méconnaissance, voire la défiance, vis-à-vis des solutions existantes de VoIP.
En valeur, à l'échelle mondiale, la société d'études JupiterResearch a évalué le marché global de la VoIP à 18 milliards de dollars d'ici 2010. IDC, de son côté, estime la croissance annuelle du marché mondial de la VoIP à 23% jusqu'en 2009. Quant à l'institut Gartner, il table sur la montée en puissance des communications hybrides, traditionnelles et IP, dans les entreprises. Gartner estime que les organisations vont faire évoluer leurs réseaux sans fil internes pour supporter la voix et qu'elles utiliseront davantage, dans un proche avenir, les téléphones mobiles dual mode GSM/WiFi.
Enfin, la consolidation du marché « voix » devrait continuer jusqu'en 2010, avec une diminution du nombre d'acteurs de référence. Il y aura également des substitutions : les opérateurs mobiles offrant des solutions voix via leurs réseaux 3G, les fournisseurs de services IP Centrex (PABX hébergé et mutualisé) proposant un ensemble de nouveaux services et applications. « Cela signifie que la VoIP en entreprise va devenir très abordable, pratiquement gratuite vers 2015 », selon les termes de Steve Blood, analyste chez Gartner.
Du côté des particuliers, la part du trafic IP dans les communications au départ des réseaux fixes se développe, notamment vers les destinations internationales incluses dans les offres dites « illimitées » des forfaits multiplay. En France, selon l'Arcep, 39% des communications nationales et, surtout, 57% des communications vers l'international sont désormais émises au départ d'abonnements IP. En revanche, la part des minutes de communications fixes en IP vers les mobiles n'est, à ce jour, que de 15%. Il est probable que ce segment de marché, la VoIP mobile, monte en puissance à l'avenir.
