Après avoir participé à différents projets éditoriaux, des premiers pas dans la PQR à l'aventure LePost.fr, Antoine Daccord a intégré LeFigaro.fr en tant que community manager. Dans cet entretien, le journaliste s'exprime avec enthousiasme sur la politique d'animation de la communauté de lecteurs du quotidien en ligne.
AB - Antoine Daccord, bonjour. LeFigaro.fr a préféré le titre de community manager à celui d'animateur de communauté pour désigner votre fonction. Pour quelles raisons ?
AD - Nous avons opté pour le titre le plus répandu à ce jour. C'est un choix délibéré. Il est vrai que ces termes sont le plus souvent associés au rôle d'un chargé de communication ou d'un chef de produit. Sur le web, dans un média qui plus est, les choses évoluent. Au Figaro.fr, le community manager est journaliste et ne dépend pas du service marketing, mais de l'opérationnel. Pourquoi ? Pour rester en phase avec notre lectorat, des internautes très informés et cultivés.
AB - Quel a été votre parcours avant d'intégrer l'équipe du Figaro.fr ?
AD - Au départ, j'ai complété un DEUG de sociologie par une formation à l'IPJ (Institut pratique de journalisme) avec un contrat de professionnalisation. En 2002, j'ai travaillé dans la PQR (presse quotidienne régionale) en tant que reporter. J'ai également été pigiste et chef de projet pour une agence web. Parallèlement, j'ai poursuivi des activités musicales. Le groupe (Glow) a trouvé son public par le web uniquement, avec une communauté d'environ 4000 fans actifs.
J'ai rejoint Liberation.fr en tant que rédacteur en 2006. L'année suivante, avec Thomas Doduik, j'ai travaillé au Monde Interactif et on a lancé LePost.fr. En 2008, j'ai intégré Elephant at Work, producteur de contenus multimédias pour entreprises. Enfin, en janvier 2009, j'ai rejoint LeFigaro.fr, à l'heure où la direction des nouveaux médias du groupe décidait de réorganiser ses équipes. Avant mon arrivée, l'animation de communauté était dans les mains du marketing, elle est désormais placée sous la direction des opérations chapeautée par Thomas.
AB - Qu'attendent la direction du Figaro et les internautes d'un animateur ?
AD - L'animation (rires) ! En fait, la direction me laisse assez libre là dessus. Quant à l'internaute, il est demandeur de services et d'outils. Ma mission consiste à ouvrir la discussion sur LeFigaro.fr et à animer Mon Figaro (depuis son lancement, en décembre 2008, plus de 100.000 comptes ont été créés) ainsi que la blogosphère éditoriale du Figaro.fr.
AB - Rencontrez-vous des réticences au sein du Figaro.fr ?
AD - Il n'y a pas eu de résistance au niveau de la direction des opérations, au contraire. En revanche, certains journalistes et responsables de sites se sont interrogés. Aujourd'hui, on ne peut plus se permettre de donner une info et penser 'la messe est dite'. Je ne dis pas que tout le monde peut être journaliste (un métier qui consiste à enquêter, à croiser les sources, à sélectionner l'information), mais que tout le monde peut proposer et mettre en ligne une information. Le journalisme change avec le web. C'est une mutation logique de la presse et des médias.
AB - Comment se compose l'équipe d'animation du Figaro.fr ?
AD - L'équipe est en cours de constitution. A ce jour, je travaille au côté d'un community manager junior, chargé des réseaux externes (Twitter, Facebook, forums spécialisées, etc.) et d'un journaliste web, chargé de remonter les contributions des internautes. J'ai également sous ma responsabilité une équipe de modération en externe.
A ce propos, j'ai demandé à ce que l'on ouvre les vannes, à ce que l'on passe d'une approche de type 'tenue correcte exigée' à 'tout ce qui n'est pas hors la loi peut être publié'. L'internaute peut critiquer un article, être un peu hors sujet, s'impliquer, s'opposer, soutenir... Avec Luc de Barochez, directeur de la rédaction du Figaro.fr, nous envisageons de mettre en avant certains contenus des membres de la communauté. Nous voulons donner plus de visibilité aux internautes impliqués, sans pour autant refuser les brèves de comptoir.
AB - Votre travail est-il influencé par les succès de réseaux comme Facebook et Twitter ?
AD - Oui, absolument. La communauté du Figaro ne doit pas être limitée au journal, nous devons lui permettre de s'exprimer et d'échanger sur de multiples plateformes. Nous nous inscrivons dans le mouvement de dématérialisation des médias.
AB - Ne craignez-vous pas de creuser un fossé entre les amateurs de l'édition imprimée du journal Le Figaro et la communauté Web ?
AD - Il est vrai que les membres actifs de la communauté ne font pas forcément partie du lectorat historique du Figaro. La moyenne d'âge des membres de la communauté est moins élevée (j'ai moi-même 26 ans) que celle des lecteurs privilégiant la version papier du quotidien. Quoi qu'il en soit, la politique d'animation de la communauté en ligne ne fera pas perdre au Figaro son identité.
AB - Antoine Daccord, je vous remercie.