Frédéric Tassy bonjour, HTC a été la première société à lancer des smartphones Android sur le marché. Depuis, Samsung, Sony Ericsson, LG ou même Motorola envisagent à leur tour d'en faire de même. Cela risque-t-il de menacer la suprématie de HTC dans le domaine ?
Je reste perplexe par rapport aux nouveaux acteurs qui vont proposer des smartphones Android. Cela fait plus de deux ans que nous travaillons étroitement avec Google au sujet d'Android et cela ne peut être remis en cause en quelques semaines. On a eu beaucoup d'annonces de mobiles Android et je pense qu'il va vraiment falloir vérifier les produits qui seront mis sur le marché, à la fois en terme d'intégration et de commercialisation de la GMS (Google Mobile Suite). La valeur ajoutée d'Android est son côté open-source mais également le fait que la GMS, qui réunit tous les logiciels mobiles de Google, soit intégrée convenablement. Et à notre connaissance, ce ne sont pas les nouveaux entrants qui vont pouvoir du jour au lendemain commercialiser la GMS et apporter des solutions tout-en-un associées. Soit ils n'ont pas la compétence immédiate pour y parvenir, soit ils s'y prennent trop tard.
Pour notre part, nous avons déjà deux smartphones lancés en partenariat avec Google et plusieurs opérateurs mobiles. Et cela fonctionne plutôt bien. C'est ce qui nous a permis de nous prémunir de la crise. Je tiens d'ailleurs à préciser qu'aujourd'hui, nos deux terminaux Android - les HTC Dream et HTC Magic - disposent de la même expérience en terme d'interface et d'accès aux services « Google » proposés en standard. Le seul point différenciant de ces derniers est leur design.
Pourtant, à sa sortie, le HTC Dream d'Orange ne permettait ni d'enregistrer des vidéos ni de synchroniser ses contacts via Gmail contrairement au HTC Magic de SFR. De plus, le clavier du HTC Dream ne comporte pas de touche « apostrophe ». Une erreur de jeunesse ?
Les HTC Dream et HTC Magic intègrent désormais la même mise à jour logicielle. Nous devions respecter une stratégie de time to market qui a été choisie par l'opérateur, ce qui pouvait expliquer les différences de fonctions qui étaient présentes en standard. Mais les deux smartphones disposent désormais du même système Android avec une synchronisation possible des calendriers, des contacts et des flux RSS. Google Talk a également été ajouté, de même que Google Latitude. En revanche, nous n'envisageons pas de lancer de nouvelle version du HTC Dream qui pourrait comporter sur son clavier une touche « apostrophe ». Nous avons déjà corrigé le problème de façon logicielle.
Peut-on dire finalement que 2009 est l'année du décollage d'Android en France ou faudra-t-il patienter l'année prochaine ?
Pour HTC, 2009 est l'année du décollage du système Android. D'ici à la fin de l'année, nous resterons un acteur fort de ce marché. Pour les autres marques, il y aura je pense beaucoup de bluff avec des produits qui ont de fortes chances d'être retardés. Nous aurons de plus toujours des produits phare sous Windows Mobile. Notre meilleure vente de smartphone en Europe reste d'ailleurs le HTC Touch HD sous Windows Mobile.
Que pensez-vous de la fin de l'exclusivité d'Orange sur l'iPhone décidée dernièrement par le Conseil de la concurrence ?
Cela défige la situation et ré ouvre le débat, notamment avec les opérateurs. Certes, les opérateurs mobiles et l'iPhone d'Apple tirent vers le haut le marché des smartphones mais cela occupe tous les esprits et le grand public n'a pas le temps de s'intéresser à d'autres produits. Mais je pense que sur la fin d'année, l'iPhone va devenir un produit comme un autre. Pour avoir discuté depuis de nombreux mois avec les opérateurs mobiles, je peux vous assurer qu'ils attendent désormais autre chose.
Pourtant le HTC Dream reste une exclusivité Orange et le HTC Magic reste une exclusivité SFR. Quand allez-vous lancer un smartphone Android chez Bouygues Telecom ?
Nous discutons actuellement avec Bouygues Telecom qui est très intéressé par nos solutions Android. Je pense que Bouygues Telecom va rapidement étendre sa gamme de smartphones, à la fois sous Windows Mobile et sous Android. Affaire à suivre.
Dans le même ordre d'idée, des exclusivités logicielles de Google pourraient-elles voir le jour sous Android ?
C'est techniquement tout à fait possible d'autoriser certains constructeurs à utiliser des programmes spécifiques de Google en exclusivité pendant un temps donné. Mais cela dépend des négociations entre Google et ces mêmes constructeurs. Et je pense que Google est plus dans l'idée de lancer un système d'exploitation entier non modifié.
Et sera-t-il possible à terme d'acquérir un smartphone HTC sous Android hors pack opérateur ?
Nous travaillons actuellement sur le marché de l' « open market ». Google et HTC veulent rendre l'expérience utilisateur la plus aisée et intuitive possible. Au second semestre, nous aurons sans doute de telles solutions en catalogue mais rien n'est encore défini pour l'heure.
Nokia, RIM, Google ou même Orange et SFR ont récemment lancé des concours de développement pour encourager la création de nouveaux logiciels pour leurs smartphones respectifs. HTC pourrait-il en faire de même ?
Nous y réfléchissons sérieusement même si ce n'est pas notre cœur de métier. Un tel concours ne serait pas très compliqué à animer et aurait comme principal avantage d'améliorer l'expérience utilisateur des systèmes d'exploitation que nous utilisons sur nos produits. Nous nous devons donc d'être pionnier dans ce domaine.
Combien de nouveaux smartphones Android comptez-vous lancer d'ici la fin de l'année ?
C'est difficile à dire. Nous arriverons sur ce marché pas uniquement pour proposer des clones des smartphones Android que nous avons déjà lancé mais pour proposer des terminaux différents, à la fois en terme de design et de fonctionnalités, tout en conversant le même ADN de HTC.
Google pousse Android sur le marché des netbooks. Envisagez-vous de lancer un tel produit en marque HTC ?
HTC a toujours été précurseur et nous poussons toujours les éditeurs de logiciels dans leurs retranchements. Nous regardons donc dans cette direction mais pas forcément dans l'univers du netbook. Nous ne sommes pas convaincus de la niche des mini PC car nous préférons travailler sur les usages. Les ordinateurs portables continueront à s'améliorer et ont toute leur place dans le marché. De l'autre côté, nous avons des smartphones qui s'améliorent mais qui ne remplaceront pas non plus ces derniers. Le secteur des netbooks génère plus de bruit que de business, d'autant plus qu'il apporte un usage très dégradé de l'informatique. Ce n'est pas aussi puissant qu'un PC et pas aussi compact qu'un smartphone.
Au lancement d'Android, Google mettait en avant le fait que des smartphones « low cost » sans écran tactile allaient être mis sur le marché. Android ne serait-il finalement utilisable que sur des mobiles à écran tactile ?
Concernant le marché d'Android sur un écran non tactile et par rapport aux fonctionnalités proposées par la Google Mobile Suite (GMS), je ne pense pas que cela soit ce que compte développer Google aujourd'hui, préférant s'attacher principalement au secteur des smartphones à écran tactile. Il y a sans doute un marché de l'écran non tactile, mais pas forcément avec un système android. Nous ne pensons pas que concevoir des écrans tactiles d'une taille ridicule soit pertinent. Nous aurions pu mettre un écran tactile sur le « HTC Snap » mais cela n'aurait pas été pertinent.
A ma connaissance, le développement d'Android pour des smartpones à écran non tactile n'est donc pas prévu pour l'heure. Cela pourrait en revanche être remis en question, mais pas avant 6 à 8 mois.
Frédéric Tassy, je vous remercie.