Les membres de la Commission Européenne, et plus particulièrement, Viviane Reding, commissaire chargée de la société de l'information et des médias, ont accusé le Royaume-Uni de ne pas avoir suffisamment protégé la vie privée des citoyens britanniques. En effet, en 2006, certains fournisseurs d'accès à Internet locaux ont en effet testé une redoutable plateforme publicitaire.
BT, mais également, Talk Talk et Virgin ont signé des accords avec la société américaine Phorm. Ces FAI ont ainsi implémenté un système de publicité comportementale baptisé WebWise et doté d'une technologie capable d'analyser les paquets transférés. Si Phorm expliquait qu'il s'agissait-là de données anonymes et même d'un système de protection contre les éventuelles menaces de phishing, plusieurs personnalités, à l'image de Tim Berners-Lee, condamnèrent ses pratiques. En effet, d'une part les clients de ces FAI n'avaient pas été mis au courant de ces pratiques, d'autres part, ils n'avaient aucun moyen de les bloquer. La Commission Européenne a ainsi engagé des actions judiciaires à l'encontre des prestataires de services entre 2006 et 2007.
La Commission Européenne a récemment envoyé une lettre au département de l'Intérieur du Royaume-Uni dans laquelle elle rappelle que selon les lois européennes, chaque état membre doit s'assurer de la confidentialité des communications électroniques de ses citoyens. « Dans l'univers numérique, la protection de la vie privée et l'intégrité des données à caractère personnel n'est pas seulement une question cruciale, c'est un droit protégé par la législation européenne. », explique Viviane Reding. Elle ajoute : « c'est pourquoi la Commission veille attentivement à la mise en place des règles et des droits de l'UE ». Mme Reding demande ainsi à ce que le Royaume-Uni conforme ses lois à celles mises en place par Bruxelles.
En effet, outre-Manche, la loi Regulation of Investigatory Powers Act (RIPA), votée en 2000, donne aux autorités le pouvoir d'intercepter les communications, non seulement lorsque la personne concernée aurait consenti à ces pratiques mais également lorsque la personne interceptant les communications « a suffisamment d'éléments pour estimer » que le consentement a été bien donné... Notons par ailleurs, qu'au Royaume-Uni, il n'existe pas d'autorité indépendante chargée de superviser les interceptions des communications ; une telle autorité est requise par les directives européennes ePrivacy et Data Protection.
Paradoxalement, suite aux attentats de Londres en 2005 une directive européenne, entrée en vigueur en avril dernier, avait obligé les fournisseurs d'accès à conserver pendant un an l'intégralité de l'historique de navigation des internautes ainsi que les appels en VOIP. Cette mesure fut vivement contestée et notamment par Jim Killock, directeur du groupe Open Right, qui soulignait « l'incompatibilité de cette directive avec les lois régissant les droits de l'homme ». Isabella Sankey, directrice de l'association Liberty, expliquait pour sa part : « le problème de ce régime c'est que ces informations ne seront pas seulement accessibles par la police mais par des centaines d'institutions publiques ».
Sans réaction de la part du Royaume-Uni au cours des deux prochains mois, la Commission pourrait porter l'affaire devant la Cour de justice des Communautés européennes.