Pendant qu'à l'Assemblée nationale se joue le sort de la controversée Loppsi, le Sénat se penche cette semaine sur le projet de loi de finances rectificative pour 2010. Dans le cadre de cet examen préliminaire, la Commission des Finances du Sénat a adopté mercredi un amendement déposé par le rapporteur général, Philippe Marini (UMP), qui propose l'instauration d'une taxe sur la publicité en ligne. La proposition a immédiatement suscité l'ire des éditeurs de services en ligne, qui craignent que la taxation des recettes émanant de la publicité en ligne fragilise le développement des acteurs français, dans l'Hexagone comme à l'international.
Surnommée « taxe Google », en référence aux milliards de dollars réalisés chaque trimestre par le numéro un mondial des moteurs de recherche, l'imposition ainsi proposée part du principe que de nombreuses sociétés fiscalisées à l'étranger réalisent sur le sol français d'importantes opérations publicitaires, conduisant de fait à une captation de marché préjudiciable.
La Commission des finances a donc adopté le principe d'une taxe qui frapperait tout hébergeur de site Internet établi dans l'Union européenne et fournissant un service en France, assise sur le montant hors taxe des sommes versées par les annonceurs français et européens pour la diffusion en France de leurs réclames. Soumise au même régime déclaratoire que la TVA intracommunautaire, elle serait calculée sur la base d'un taux de 1%.
Selon Philippe Marini, le marché concerné représenterait 2,1 milliards d'euros. La taxe aurait donc un rendement de l'ordre de 20 millions d'euros, qui pourrait être utilisé pour financer les différentes mesures visant à développer l'offre culturelle en ligne, à partir notamment des recommandations de la mission Zelnik.
Le rapporteur tempère toutefois la portée immédiate de la décision de la Commission des Finances, en indiquant que cet amendement « d'appel » est destiné à faire entrer l'idée de cette taxation des recettes publicitaires dans le débat. Il pourrait d'ailleurs selon lui être retiré d'ici lundi.
Les représentants du Web français n'ont toutefois pas attendu cet éventuel retrait pour monter au créneau. Par l'intermédiaire d'un communiqué, émis jeudi matin, l'Asic (Association des Services Internet Communautaires) indique qu'une telle taxation rendrait, selon ses membres, « le territoire français hostile aux investissements des acteurs internationaux du numérique et pénaliserait lourdement le développement des acteurs français, potentiels champions internationaux ».
« C'est en s'appuyant sur les opportunités permises par le numérique - et non en s'y opposant - que la création française sera aux avant-postes de la Toile et trouvera le rayonnement qu'elle mérite ! », y indique encore Giuseppe de Martino, co-président de l'Asic et directeur juridique de Dailymotion.