Le lanceur Electron restait sur une longue série de succès... Crédits : Rocket Lab/NASA
Le lanceur Electron restait sur une longue série de succès... Crédits : Rocket Lab/NASA

Ce 19 septembre au matin, la fusée Electron de Rocket Lab décollait pour la 41e fois… mais la routine est une terrible ennemie : après la séparation du premier étage, la fusée a subi un échec et n’a pu rejoindre l’orbite. Le satellite radar de Capella Space qu’elle transportait est perdu, et l’enquête commence.

Avec le décalage horaire, les équipes néo-zélandaises de Rocket Lab passent une très mauvaise soirée. La petite fusée Electron a décollé ce 19 septembre 2023 à 8 h 55, après un petit report de quelques minutes. Lorsque les flammes ont illuminé la péninsule de Mahia, tout s’est passé normalement, et le lanceur s’est rapidement élancé vers le ciel. Pour les équipes sur place, c’est devenu une habitude, car l’opérateur a réussi à améliorer ses cadences pour dépasser un tir par mois… À tel point que, dans le hangar d’intégration, une autre fusée Electron est déjà presque prête à décoller. Mais elle devra rester au sol plus longtemps que prévu, car le lancement de ce matin s’est soldé par un échec.

Un étage et une gueule de bois

Si elle s’est arrachée correctement du sol pour quitter la côte néo-zélandaise, Electron n’a malheureusement pas fait long feu. Après 2 minutes et 30 secondes de vol, le premier étage et ses neuf moteurs avait terminé son action, et s’est séparé du deuxième. Mais au moment de l’allumage de son unique moteur rutherford adapté au vide, le flux vidéo s’est brutalement interrompu, tandis que la télémesure montrait que le lanceur continuait de ralentir… Soit il ne s’est pas allumé, soit cette action a brisé quelque chose et il s’est immédiatement arrêté.

Quoi qu’il en soit, l’étage n’a pas atteint l’espace (ni l’orbite) et il est retombé en mer, au sein de la zone d’exclusion maritime délimitée par les autorités. Le client du jour, Capella Space, qui déployait un troisième satellite radar « Acadia » avec Rocket Lab, va devoir faire jouer son assurance pour obtenir un remboursement.

Une photo (basse résolution) du satellite perdu ce 19 septembre. Crédits : Rocket Lab
Une photo (basse résolution) du satellite perdu ce 19 septembre. Crédits : Rocket Lab

Pour Electron, c’est un coup d’arrêt, car une enquête est en cours pour déterminer les causes de l’échec, il est donc peu probable que la fusée puisse repartir dans les semaines ou mois qui viennent. Au 40e vol, ce n’est pas un problème de design du moteur. S’il s’agit d’un problème de matériel, il faut identifier l’erreur et s’assurer qu’elle ne se reproduira pas, et s’il y a plutôt erreur humaine, il faut travailler sur les procédés, y compris au contrôle qualité, pour que la situation ne se présente plus. Space is hard

Une réputation à tenir

Des échecs, Rocket Lab en a déjà eu. Celui-ci est le quatrième avec Electron, après 2017, 2020 et 2021. Mais cela faisait 20 tirs (sur 41 en tout) que l’entreprise n’avait plus eu à connaître l’embarras d’une perte sèche associée à une enquête sur le lanceur. Voilà qui est particulièrement ennuyeux, surtout lorsque Rocket Lab tente d’engranger enfin des profits (c’est une firme publique cotée en Bourse). Et que l’objectif de l’année était d’augmenter les cadences en utilisant au maximum les deux sites de lancement disponibles en Virginie et en Nouvelle-Zélande.

Tant pis, il faudra revoir la copie, d’autant plus que récemment, Rocket Lab a reçu plusieurs contrats de vols orbitaux et suborbitaux (projet HASTE). Quatre échecs en 41 vols, ce n’est pas désespérant, mais cela va mettre l’entreprise sous pression, alors que certains concurrents commencent enfin à connaître le goût du succès, comme Firefly. Chance pour eux, la congestion actuelle sur les services de lancement leur donne des marges de manœuvre pour revenir sur le devant de la scène.

Celle de droite a raté sa mission... Celle de gauche pourra-t-elle décoller, ou devra-t-elle retourner à l'usine ? Crédits : Rocket Lab

Un retour d'ici décembre ?

En réalité, cela pourrait être « rapidement » réglé : lors de son dernier accident en vol avec le lanceur Electron, Rocket Lab avait rendu les conclusions de son enquête en seulement 70 jours… Ce qui, dans les standards du monde spatial, est très serré ! À titre d’exemple, le lanceur Vega C qui a eu un incident en décembre dernier ne revolera pas en 2023.

Toutefois, le quatrième trimestre risque d’être plus difficile que prévu pour Rocket Lab, qui visait cette échéance pour tenter de faire des profits !