Après deux semaines intenses pour ouvrir et examiner le caisson qui contient les échantillons de la mission OSIRIS-REx, les équipes ont à peine entrouvert la boite de pandore. Mais déjà, les premiers résultats viennent récompenser les années d'efforts : beaucoup de molécules carbonées et de l'eau !
Avec l'atterrissage impeccable de la capsule le 24 septembre dernier, la mission OSIRIS-REx s'est terminée sur un sans-faute, sept ans après son décollage. Mais pour les équipes qui attendaient les échantillons, ce n'est évidemment que le début de l'aventure. Après avoir isolé la capsule et l'avoir placée dans un caisson particulier, elle a pris un avion jusqu'au centre spatial Johnson. Mais une fois le bouclier thermique retiré et la capsule ouverte, les scientifiques ont été surpris de constater qu'il y avait déjà beaucoup de poussière et de morceaux d'astéroïdes, même sur les bords du collecteur. Les premières analyses n'ont pas tardé.
Ça déborde de découvertes
Lors d'une conférence en grande pompe mercredi 11 octobre, les équipes ont présenté leurs premiers résultats, sur des échantillons collectés sur les bords du collecteur : de très grandes quantités de molécules carbonées et des argiles saturées d'eau ! C'est une bonne nouvelle, parce que c'est directement ce que la mission OSIRIS-REx allait chercher sur Bennu (qui, pour rappel, est de type C – carboné). Les matériaux étudiés sont particulièrement précieux, car ils naviguent dans le Système solaire depuis sa création il y a 4,5 milliards d'années. Et, peut-être même certaines poussières datent-elles d'avant l'accrétion et la fusion de notre Soleil. L'objectif global de la mission était de ramener 60 grammes de récolte ! Or il y en a beaucoup plus, une quantité pas encore totalement déterminée, autour de 250 grammes et probablement un peu plus. En réalité, ce n'est pas facile à estimer, car le collecteur n'a pas encore pu être ouvert. Il y a tellement à découvrir et à étudier sur ses bords que les équipes vont prendre le temps. Chaque grain de matière est précieux !
Il va falloir faire du tri
« Ces échantillons de la mission OSIRIS-REx sont les plus imposants morceaux riches en carbone ramenés sur Terre, et ils vont aider l'équipe scientifique à déterminer les origines de la vie sur notre propre planète pour les prochaines générations », a expliqué Bill Nelson, l'administrateur de la NASA. Le responsable scientifique de la mission Dante Loretta a pour sa part rappelé qu'il faudrait environ deux ans pour examiner, classer, identifier chaque échantillon ramené par la mission avant que des examens plus poussés soient menés. Patience donc, même si plusieurs poussières et grains de matière ont déjà été observés au microscope électronique, ce qui a permis d'y découvrir des inclusions métalliques, ainsi que les premières compositions chimiques. Un morceau de 2mm de long a également été scanné aux rayons X, révélant sa composition interne et produisant un modèle 3D.
Impossible à observer sur place
Cela permet aussi de se constater à quel point l'échelle de l'étude de ces échantillons est différente de ce qu'il est possible de faire avec une mission embarquée. Les sondes et véhicules que l'on envoie ont beau parfois être de petits laboratoires, leurs capacités sont limitées en comparaison des instruments disponibles sur Terre. Il y a une véritable armada de laboratoires (y compris en France, avec des capacités uniques) qui attendent de recevoir des échantillons de Bennu. Et même quelques grains, quelques microgrammes, peuvent suffire à retracer à la fois le passé de l'astéroïde, mais aussi celui d'une partie de notre Système solaire. « Ce trésor de matériel riche en carbone, et les argiles hydratées, c'est juste la partie immergée de cet iceberg cosmique. Ces découvertes viennent récompenser des années de collaboration à la pointe de la science, et elles vont nous emmener dans un voyage pour comprendre non seulement notre environnement céleste, mais aussi le potentiel début de la vie sur Terre ».
La NASA n'utilisera qu'une partie des échantillons de Bennu. Environ 60 à 70 % seront laissés de côté en atmosphère protégée et dans des containers étanches, pour être ouverts au compte-goutte dans les décennies à venir : il y a de toute façon assez de matériel pour que des générations de thésards et de chercheurs les étudient, tout en attendant des techniques qui ne sont pas encore au point. Enfin, il ne faut pas oublier la collaboration internationale : environ 10 à 15 % des échantillons rapportés partiront au Japon, dans le cadre d'un partenariat avec les équipes de la mission Hayabusa2. Ces dernières avaient rapporté environ 5 grammes d'astéroïde Ryugu en décembre 2020, et une partie a été transférée pour étude aux États-Unis.