La longévité n’est pas le point fort des jeux mobiles : plus de huit sur dix ne survivent pas plus de trois ans. De fait, trois titres sur quatre génèrent leur pic de recettes au cours de la première année de parution.
La massification de l’usage des smartphones à travers le monde a fortement chamboulé le secteur du jeu vidéo, élargissant le panel de prospects à tous ceux ayant un téléphone portable. Rien qu’en France par exemple, presque trois Français sur dix jouent quotidiennement à des jeux vidéo, soit environ 17 millions de personnes. Forcément, ce gros gâteau suscite la convoitise et représente une importante manne financière ; et s’il y a énormément de candidats, peu survivent sur ce marché ultra-concurrentiel.
Des jeux abandonnés donc délaissés ou est-ce l’inverse ?
C’est la tendance dégagée par une étude d’Atomik Research pour SuperScale. Celle-ci rapporte que dans le développement de jeux mobiles, 83 % des productions disparaissent de la circulation au bout de seulement trois ans. De plus, 43 % des projets n’aboutissent même pas à la parution d’un titre.
Il n’est sans doute pas inutile de préciser que les jeux mobiles dégagent le chiffre d’affaires mondial le plus important du secteur : environ 93 milliards de dollars selon les données de Statista. C’est beaucoup plus que le segment des consoles, dont le CA atteint 56 milliards selon le même portail des statistiques. Quant au marché PC, il pèse 37 milliards d’euros par an environ.
Pour en revenir à la publication, elle précise que 76 % des titres génèrent le plus de revenus au cours de leur première année de parution ; ils sont 4 % à leur faire la deuxième année. En outre, la plupart des jeux sont rapidement abandonnés (à peine 5 % bénéficient d'un soutien au-delà de sept ans).
Sur mobile, l’absence de suivi sur le long terme est un phénomène d’ampleur : si 37 % des studios mettent à jour leurs productions les plus rentables chaque semaine, moins de la moitié proposent des mises à jour au moins mensuelles ; pas vraiment le meilleur moyen de maintenir l’intérêt sur le long terme…
Des développeurs sous pression
Le rapport se penche aussi sur les conséquences financières et humaines du taux d'échec élevé des jeux mobiles. Un tiers des studios a dû procéder à des licenciements au cours de 12 derniers mois, tandis que 40 % ont opté pour l'externalisation des tâches de développement au cours de la même période.
Pour les développeurs, cette situation se matérialise bien sûr par une insécurité directe en lien avec leur emploi, mais aussi par une baisse de motivation et une minimisation des risques au profit de l’aspect purement commercial.
De plus, tandis que 78 % préfèrent travailler sur de nouveaux titres, l’annulation des jeux (43 %, donc pas loin d’un sur deux) suscite de l'insatisfaction chez 30 % d'entre eux. La même proportion pense qu’il est très difficile de réussir dans les conditions actuelles du marché et considère que le secteur est trop concurrentiel.
Des joueurs mobiles moins prompts à sortir la CB ?
Le livre blanc de 18 pages au titre explicite de Good Games Don't Die (« Les bons jeux ne meurent pas ») suggère qu’il est possible de monétiser un jeu sur la durée et de conserver l’attrait des consommateurs malgré les années. Les auteurs parlent de Legacy Game Management, un « processus de rajeunissement des jeux qui semblent avoir connu leurs meilleurs jours ».
Le P.-D.G. du groupe, Ivan Trancik, soutient que la première baisse de dépenses par les joueurs relevée l’année dernière (- 5 % sur un an) marque un signal d’alarme pour l'industrie des jeux mobiles. Il rappelle que « les jeux mobiles les plus performants sont soutenus pendant des années » et argue que l’étude – basée sur des entretiens réalisés auprès de 500 développeurs de jeux au Royaume-Uni et aux États-Unis – donne les clefs pour comprendre l’avenir du marché et tirer son épingle du jeu.
Il n’allait bien sûr pas prétendre le contraire. Et si la volonté de proposer des jeux mieux suivis est sans doute louable, reste à savoir s’il existe une recette du jeu au succès intemporel capable de captiver, et surtout de soutirer les deniers de ses joueurs, pendant plusieurs années. De fait, certains titres perdurent et restent lucratifs malgré leur âge alors que les abonnements et autres achats in-app restent la vache à lait du secteur.
Sources : SuperScale, Statista