En Normandie, un éleveur de bovins et une entreprise spécialisée dans l'agrivoltaïque vont observer pendant neuf ans la cohabitation entre élevage et ferme solaire.
Les panneaux photovoltaïques peuvent être installés un peu partout : dans les déserts, sur les toits des immeubles, sur les voitures, et même sur les murs de soutènement. Les possibilités sont infinies et l'imagination semble être l'un des rares facteurs limitants.
Cependant, les projets de moyenne et grande envergure ont besoin de beaucoup d'espace pour capter au maximum la lumière de notre étoile. C'est un atout que les agriculteurs peuvent offrir, mais est-il vraiment possible d'associer fermes solaires et exploitations agricoles ?
Paître sous des panneaux solaires
À première vue, troupeaux de vaches et panneaux photovoltaïques ne font pas bon ménage. Lorsqu'ils ne sont pas placés sur des bâtiments, ces derniers sont généralement posés à proximité du sol, ce qui est peu compatible avec les pâturages. C'est pourtant l'option choisie par Yoann Bizet, agriculteur dans le Calvados.
Il s'est associé à TSE, une entreprise niçoise spécialisée dans l'agrivoltaïque, pour installer plus de 5 500 panneaux sur une parcelle de près de trois hectares. Pour ne pas perturber l'activité de l'agriculteur, ils sont montés à plus de 5 mètres de haut sur des tiges métalliques, réduisant ainsi au maximum la surface occupée au sol.
Ainsi, si l'agriculteur peut toujours faire circuler ses machines agricoles sous cette canopée artificielle, ses 350 bovins pourront également y paître dès le printemps prochain, tout en bénéficiant d'un peu d'ombre. Pour Yoann Bizet, l'intérêt de l'installation ne réside pas seulement dans la production d'électricité : « Cela fait dix ans que mes vaches préfèrent rester dans les bâtiments plutôt que d’être dehors en raison des fortes chaleurs », explique-t-il. « Dès 23 °C, les bovins souffrent des températures. »
Cela devrait aussi permettre à la végétation de résister un peu mieux aux périodes de sécheresse, qui se multiplient depuis quelques années.
Un avenir radieux pour l'énergie solaire au sein des exploitations agricoles ?
Cependant, il n'est pas question pour l'agriculteur normand et TSE de faire n'importe quoi. Des études seront menées sur l'exploitation pendant neuf ans par l'Institut de l'élevage (Idele). « La moitié du troupeau va être sous le parc et l’autre moitié dans une parcelle témoin sans panneau », souligne M. Bizet. « On va mesurer et comparer le comportement des troupeaux : le temps de pâturage, la qualité du lait, les champs magnétiques, le bien-être animal… »
D'autres projets similaires ont été développés par l'entreprise niçoise en France, eux aussi surveillés de près. Et, elle n'est pas la seule, puisque les idées pour lier énergie solaire et agriculture fleurissent un peu partout dans le monde, à l'image de ce vignoble californien que nous évoquions en début d'année. Les arbres fruitiers, en particulier, peuvent particulièrement bénéficier de ce type d'installation, car ils ont souvent besoin d'ombre pendant une partie de la journée.
Après l'énergie éolienne et les installations de méthanisation, le solaire est-il en train de devenir la nouvelle coqueluche des agriculteurs ? Selon EDF, ce serait bien le cas, comme l'explique l'entreprise sur son site web : « Au total, le secteur agricole représente 13 % de la production d’électricité photovoltaïque de France, avec plus de 50 000 exploitations équipées ».
Pour ce qui est de notre expérience normande, elle devrait générer assez d'électricité pour alimenter 1 600 foyers, tout en apportant plusieurs bénéfices à Yoann Bizet. « Nous louons la parcelle de Yoann pour y monter nos infrastructures », déclare Rodéric Longuépé, référent agricole de TSE. « Cela lui apporte un complément de revenu. »