Alors que l'IA générative se démocratise, Fairly Trained veut mettre en avant les bons élèves. Plusieurs entreprises ont même déjà obtenu sa certification.
Les labels sont monnaie courante dans de nombreux secteurs : Appellation d'origine protégée (AOP) pour les produits alimentaires, Energy Star pour les appareils électroniques, Ecoprod pour le cinéma… Les exemples ne manquent pas et il suffit de regarder derrière n'importe quel emballage pour en trouver au moins un.
Alors, à l'heure où de nombreux artistes s'inquiètent de ce que des outils comme ChatGPT ou Midjourney font de leurs créations, et ce, sans aucune rétribution, un label de circonstance ne serait-il pas le bienvenu ?
Un label pour y voir plus clair
Il est difficile de savoir si une IA générative n'a pas été entraînée à l'aide de créations sous copyright et sans l'accord de leurs auteurs. Alors que les géants du secteur se considèrent en droit de le faire, d'autres entreprises tentent de suivre une voie plus « équitable » à l'égard des artistes et autres créateurs. Soit en respectant les droits des licences sous lesquelles leurs œuvres sont enregistrées, soit en se tournant exclusivement vers le domaine public ou vers du matériel sous licences libres.
Cependant, comment reconnaître les acteurs qui respectent ces principes ? C'est pour répondre à cette épineuse question que Fairly Trained a été créée. Cette organisation à but non lucratif a pour mission de contrôler les données d'entraînement des entreprises qui souhaitent obtenir son label. Celui-ci peut alors certifier qu'une IA a été « équitablement formée », permettant ainsi aux utilisateurs d'utiliser des outils correspondant à leurs valeurs, du moins s'ils le peuvent et s'ils le souhaitent.
À ce jour, neuf intelligences artificielles génératives – huit spécialisées dans l'audio et une dans l'image – ont réussi à obtenir la certification de l'organisation. Il s'agit de :
- Beatoven.AI ;
- Boomy, qui a eu quelques désaccords avec Spotify l'année dernière ;
- BRIA AI ;
- Endel
- LifeScore, que l'on retrouve dans l'application Zen de Deezer ;
- Rightsify ;
- Somms.ai ;
- Soundful ;
- Tuney.
Des « IA respectueuses du droit d'auteur », c'est possible ?
Les personnes à l'origine de Fairly Trained ne viennent pas de nulle part. Parmi ses conseillers figurent Maria Pallante, PDG de l'AAP (Association of American Publishers), Tom Gruber, cofondateur de Siri, et Max Richter, compositeur et pianiste très apprécié de Sam Altman, PDG d'OpenAI. Son créateur, Ed Newton-Rex, était quant à lui responsable du développement de Stable Audio au sein de Stability AI, l'entreprise à l'origine de Stable Diffusion.
Bien entendu, s'il en est là aujourd'hui, c'est parce qu'il a quitté son ancien employeur en novembre 2023. Selon lui, ce dernier « exploite les créateurs » en utilisant leurs œuvres pour entraîner ses produits. « Tant que les entreprises d'IA générative diront "Oui, c'est une utilisation équitable, nous pouvons récupérer tout ce que nous voulons", je pense qu'il y aura une bataille entre deux camps », avait alors affirmé Newton-Rex.
Un tel label sera-t-il vraiment utile ? Difficile d'imaginer que les géants de l'industrie chercheront à l'obtenir, alors même qu'ils défendent l'utilisation de toutes les œuvres, même celles soumises au droit d'auteur. Si plusieurs batailles juridiques portant sur ce sujet sont engagées à travers le monde, il faudra certainement une action politique plus forte que l'AI Act européen pour faire évoluer les choses.
Il y a plusieurs mois, une amie m'a demandé s'il était concevable qu'un jour, nous ayons des « IA respectueuses du droit d'auteur ». À l'époque, il me semblait encore difficile de répondre par l'affirmative, tant des outils comme ChatGPT ou encore Midjourney ont besoin d'une quantité colossale de données qualitatives pour être aussi performants. Ed Newton-Rex se montre toutefois encourageant : « Il existe un système mutuellement bénéfique qui fonctionne pour tout le monde ». Et, c'est justement ce que son label doit nous prouver.
Source : Bloomberg