À l'heure de l'intelligence artificielle, le Numérique est-il dénigré par le gouvernement ? Jeudi, l'Élysée a rétrogradé la discipline d'un ministre délégué à une simple secrétaire d'État.
Officiellement passé d'une petite quinzaines à 34 membres, le gouvernement n'est plus franchement resserré et comporte plus de personnalités qu'un Olympique de Marseille en fin de mercato, c'est dire ! Néanmoins, une chose est à relever : la place « accordée » au Numérique. Si, depuis 2022, le Numérique pouvait se vanter d'avoir un ministre délégué pour la première fois depuis 2014, Emmanuel Macron et Gabriel Attal ont confirmé un retour en arrière, avec la nomination de Marina Ferrari comme secrétaire d'État, ce jeudi 8 février 2024.
Un simple secrétariat d'État pour le Numérique, « un très mauvais signal »
Si elle est une illustre inconnue aux yeux du grand public, Marina Ferrari est néanmoins citée pour avoir contribué au développement de TousAntiCovid, une application qui, espérons-le, appartient définitivement au passé. Mais sans dénigrer ses compétences, le CV de l'élue et député Modem de Savoie, accessoirement ancienne présidente de l'Institut national de l'Énergie solaire, ne fait franchement pas rêver, en tout cas pour ce poste.
Mais ce qui agace d'autant plus l'avocat spécialisé en droit des nouvelles technologies, maître Constantin Pavléas, c'est la rétrogradation de la discipline du numérique. Pour lui, il s'agit d'une « erreur majeure » d'Emmanuel Macron et de Gabriel Attal.
« Cette décision est un très mauvais signal, un très mauvais signal envoyé aux acteurs du numérique, aux acteurs économiques en général, aux jeunes générations et à nos partenaires européens et aux autres pays », déplore l'avocat. Et celui-ci d'ajouter : « Elle démontre un décalage inouï par rapport aux enjeux de notre temps ». Le constat est dur, mais est-il si éloigné que ça de la réalité ?
Le Numérique a du mal à se faire une place au sommet de l'État
Constantin Pavléas a raison de le rappeler : la France est à la croisée des chemins dans la discipline numérique, avec l'impasse du stockage des données de santé, qui vont être confiées à Microsoft pour les trois prochaines années, et une intelligence artificielle générative qui inquiète jusque chez les membres de l'Autorité de la concurrence.
L'Union européenne, qui vient unanimement d'adopter un règlement sur l'IA, a ouvert la voie pour la France, qui s'est dotée d'un Comité de l'IA générative il y a quelques mois. Mais ces pas en avant semblent être aujourd'hui freinés par un manque de considération politique au sommet de l'État, qui bien qu'adepte des réseaux sociaux et autres outils numériques, ne semble pas avoir encore pris la mesure de l'importance du numérique dans notre société moderne.
La rétrogradation, couplée à un manque d'incarnation des derniers représentants français des nouvelles technologies, n'est en effet pas un bon signal envoyé aux investisseurs, aux start-up et aux profils français et européens. Espérons tout de même ne pas être à l'abri d'une bonne surprise.