Une innovation technologique d'IBM permet de multiplier par 80 les capacités de transmission des données entre les puces. Cela permettrait à la fois une accélération spectaculaire de l'entraînement des modèles d'IA et une réduction notable de la consommation énergétique des centres de données.
L'industrie des semi-conducteurs se heurte aujourd'hui aux limites physiques imposées par les connexions électriques traditionnelles. Dans les puces actuelles, les signaux transitent via des fils de cuivre microscopiques, où la densité croissante des composants engendre des problèmes de dissipation thermique et de perte de signal. Pour surmonter ces contraintes, IBM Research a développé une technologie de rupture : l'intégration de guides d'ondes optiques (voir la définition plus loin dans l'article) directement sur les puces.
Cette approche transpose les principes éprouvés de la fibre optique – où l'information voyage sous forme de photons plutôt que d'électrons - à l'échelle microscopique des processeurs. Le défi technique consiste à suffisamment miniaturiser et à densifier ces connexions optiques, pour permettre la transmission de données à la vitesse de la lumière entre les différents composants d'un système informatique. IBM l'a fait !
La fibre optique miniaturisée
La solution développée par
IBM Research repose sur un module optique d'une complexité remarquable. La prouesse de cette réalisation réside dans la conception d'une architecture photonique miniaturisée appelée guide d'ondes optique. Cette structure microscopique canalise et dirige les faisceaux lumineux avec une précision nanométrique et permet d'acheminer l'information. Les chercheurs d'IBM ont ainsi pu concentrer 51 canaux de transmission optique sur chaque millimètre de bordure de puce, soit une densité six fois supérieure aux technologies existantes. Résultat : des débits de transmission 80 fois supérieurs aux connexions électriques conventionnelles.
La technologie s'inspire directement des câbles sous-marins qui transportent les données du Web entre continents, mais la miniaturisation à l'échelle d'une puce – de la taille d'un ongle – représentait jusqu'alors un obstacle majeur. Pour Dan Hutcheson, analyste chez TechInsights, ce progrès est incroyable :
« IBM a mis à profit son expertise en conception et en assemblage, domaine dans lequel elle est leader depuis longtemps […] Pour ma part, c’est cette avancée qui marque un véritable tournant ».
Une technologie performante et efficiente
Le passage des connexions électriques aux liaisons optiques engendrerait une réduction de la consommation énergétique des systèmes informatiques, avec une diminution par cinq de la puissance requise pour les opérations de traitement intensif. Une meilleure efficience énergétique qui pourrait apporter une réponse concrète aux réoccupations environnementales liées à la multiplication des centres de données, véritables gouffres énergétiques dont la consommation électrique ne cesse de croître à l'échelle planétaire.
Les tests de fiabilité menés par IBM démontrent la robustesse de leur système dans des conditions extrêmes : humidité élevée et températures variant de -40° C à 125° C. Ces résultats laissent donc présager une intégration potentielle dans les environnements industriels les plus exigeants.
Nécessairement, l'industrie des semi-conducteurs observe attentivement les travaux d'IBM. Selon Hutcheson, les principaux fabricants pourraient rapidement chercher à obtenir des licences d'exploitation, conscients du potentiel transformateur de cette innovation dans le domaine du calcul haute performance (HPC) et de l'intelligence artificielle. Fiat lux !
Source : NewScientist