L'expérience LuGRE de la NASA et de l'Agence spatiale italienne a réussi à capter des signaux GPS sur la Lune le 3 mars 2025. Cette première historique ouvre la voie à des systèmes de navigation autonomes pour les futures missions lunaires, et permet aux astronautes de se déplacer avec précision sur notre satellite.

Représentation conceptuelle artistique de LuGRE à bord de l'atterrisseur lunaire Blue Ghost recevant des signaux des constellations GNSS de la Terre - © NASA/Dave Ryan
Représentation conceptuelle artistique de LuGRE à bord de l'atterrisseur lunaire Blue Ghost recevant des signaux des constellations GNSS de la Terre - © NASA/Dave Ryan

La navigation sur Terre s'appuie aujourd'hui largement sur les signaux du Système mondial de navigation par satellite (GNSS) qui alimentent des applications comme Google Maps ou Waze. Jusqu'à présent, personne ne savait si ces signaux pouvaient être captés et utilisés aussi loin que la Lune.

Jusqu'au 2 mars. Ce jour où l'atterrisseur Blue Ghost de Firefly Aerospace s'est posé dans la région Mare Crisium de la Lune, transportant avec lui dix charges utiles de la NASA, dont l'expérience de récepteur GNSS lunaire (LuGRE). Ce projet collaboratif entre la NASA et l'Agence spatiale italienne entendait démontrer la possibilité de recevoir et d'utiliser les signaux GNSS à la surface lunaire. Le matériel a été développé par l'Agence spatiale italienne et son partenaire industriel Qascom, soit la première technologie italienne à fonctionner sur la Lune.

Les signaux GPS ont été captés à 362 000 km de la Terre

Le 3 mars à 2 heures du matin (heure de l'Est), LuGRE a fait un grand pas pour l'Humanité en réussissant à acquérir et suivre des signaux de navigation à environ 362 102 kilomètres de la Terre. L'instrument a capté les signaux provenant de deux constellations de satellites : le système GPS américain et le système Galileo européen, grâe auquel 4 milliards d'objets sont aujourd'hui connectés. Ce succès ne représente pas une simple prouesse technique mais ouvre de nouvelles possibilités pour l'exploration spatiale.

« Sur Terre, nous pouvons utiliser les signaux GNSS pour naviguer dans tous les domaines, des smartphones aux avions », a déclaré Kevin Coggins, administrateur adjoint du programme Space Communications and Navigation (SCaN) de la NASA. « Aujourd'hui, LuGRE nous montre que nous pouvons acquérir et suivre avec succès les signaux GNSS sur la Lune. C'est une découverte très intéressante pour la navigation lunaire, et nous espérons exploiter cette capacité pour les missions futures », ajoute-t-il.

La performance de LuGRE a dépassé les attentes. Avant même d'atteindre la Lune, l'instrument avait déjà battu des records en captant des signaux GPS à 336 000 km de la Terre le 21 janvier, puis à 391 070 km lors de son entrée en orbite lunaire le 20 février. Ces résultats prouvent que les missions dans l'espace cislunaire (zone entre la Terre et la Lune) peuvent également utiliser le GNSS pour la navigation.

Les ingénieurs de la NASA suivaient traditionnellement les engins spatiaux grâce à une combinaison de capteurs embarqués et de stations de suivi terrestres, qui avaient besoin d'une intervention humaine constante. Les signaux GNSS, captés et utilisés de manière autonome, pourraient réduire cette dépendance.

L'atterrisseur Blue Ghost Mission One de Firefly Aerospace transporte 10 instruments scientifiques et technologiques de la NASA vers la Lune dans le cadre de l'initiative CLPS (Commercial Lunar Payload Services) de la NASA et de la campagne Artemis - © Firefly Aérospatiale
L'atterrisseur Blue Ghost Mission One de Firefly Aerospace transporte 10 instruments scientifiques et technologiques de la NASA vers la Lune dans le cadre de l'initiative CLPS (Commercial Lunar Payload Services) de la NASA et de la campagne Artemis - © Firefly Aérospatiale

Cette technologie représente une révolution pour l'exploration lunaire d'Artemis

Cette avancée technologique arrive à point nommé pour la campagne Artemis de la NASA, qui prévoit le retour des humains sur la Lune. La capacité à se positionner et naviguer précisément sur la surface lunaire n'est en effet pas une mince affaire pour les astronautes et les véhicules d'exploration.

« Ce projet ne concerne pas uniquement la NASA, a expliqué Lauren Konitzer, ingénieure en navigation et en conception de missions chez NASA Goddard. C'est quelque chose que nous faisons pour le bien de l'humanité. Nous travaillons pour prouver que le GNSS lunaire peut fonctionner et nous partageons nos découvertes avec le monde entier ».

Les données collectées par LuGRE seront d'ailleurs rendues publiques environ six mois après la fin des opérations. La NASA et l'Agence spatiale italienne souhaitent élargir l'accès à la recherche sur le GNSS lunaire pour toutes les missions futures, qu'elles soient gouvernementales ou commerciales.

À l'heure actuelle, l'équipe de LuGRE continue de collecter des données en mode quasi continu jusqu'au 16 mars. L'atterrisseur Blue Ghost qui s'est posé tranquillement le 3 mars dernier, sera opérationnel pendant 14 jours lunaires. Il va permettre aux chercheurs d'obtenir des informations précieuses sur le fonctionnement des signaux GNSS dans l'environnement lunaire.

Si les applications de navigation terrestre comme Waze ou Google Maps nécessitent une connexion Internet pour fonctionner pleinement, la démonstration de LuGRE prouve que la composante fondamentale de ces systèmes – la réception des signaux de positionnement – est techniquement possible sur la Lune. Cela laisse entrevoir un futur où les astronautes pourraient utiliser des technologies similaires pour se déplacer efficacement sur la surface lunaire, éviter les obstacles et optimiser leurs itinéraires, tout comme les conducteurs le font quotidiennement sur Terre.

Aujourd'hui, la Terre, demain, la Lune, et après-demain, où nous baladerons-nous grâce à LuGRE ?