Cet été, Clubic vous propose de vous intéresser au futur proche des différentes missions lunaires. De la Chine aux États-Unis en passant par les robots et les stations, notre satellite naturel est une destination hors normes. Dans ce premier épisode, cap sur 2024. Car oui, l'année a déjà été riche. Mais ce n'est pas terminé !
Contrairement à sa voisine Vénus, la Terre a la chance de posséder un satellite naturel, et dès que les humains et leurs satellites se sont élancés vers l'espace, il est devenu un objectif de choix. Oui, la « course à la Lune » s'est achevée dans les années 70 avec les missions lunaires Apollo américaines et quelques retours d'échantillons soviétiques.
Puis… peu de missions, jusqu'au tournant des années 2000, lorsque différents projets d'orbiteurs et d'étude du sol ont pris corps. La Chine a mis en place son grand programme d'exploration lunaire robotisé Chang'e, puis en 2019 les États-Unis ont organisé Artemis. Depuis, les missions, tentatives d'atterrissage et autres concepts se multiplient. Les échecs aussi.
Une année 2024 déjà chargée
Si l'on a choisi de se tourner vers l'avenir, c'est que le passé fourmille déjà de missions, et même en 2024 ! Mais leurs résultats ont été… disons, contrastés. En effet, l'année a démarré dès le 8 janvier avec le décollage de l'atterrisseur Peregrine, envoyé par l'entreprise privée Astrobotic et partiellement financé par la NASA. Peregrine emportait tout un lot d'expériences scientifiques américaines et internationales, mais également des charges utiles privées.
C'était là une première aventure spatiale pour cette firme installée à Pittsburgh et qui ne compte qu'une centaine d'employés, et la première mission publique-privée lunaire américaine. Malheureusement pour Astrobotic, le vol vers la Lune se termine en queue de poisson.
Quelques heures à peine après le lancement, un problème lié à une fuite de carburant dans le système de propulsion met toute la mission en péril. La réactivité des équipes permet de reprendre le contrôle de Peregrine après quelques heures, puis de réduire la fuite, mais c'est trop tard, la mission et l'alunissage sont compromis. Pour ne pas générer de débris inutile, Astrobotic gère la trajectoire de son petit véhicule, qui finit par se désintégrer quelques jours plus tard en une boule de feu dans l'atmosphère terrestre. Astrobotic a beaucoup appris, mais la mission est un échec.
Des robots la tête à l'envers
La deuxième tentative de 2024 fut celle d'un véhicule développé par l'agence spatiale japonaise, le petit atterrisseur SLIM. Ce dernier, pour économiser son carburant, a utilisé une trajectoire qui prenait plusieurs mois pour s'approcher de la Lune. Une fois en orbite, son objectif était simple : se poser de la façon la plus précise possible sur un site prédéfini. Et il y serait arrivé… si dans la dernière minute de son approche, l'un de ses deux moteurs principaux n'était pas tombé en panne.
Son arrivée sur le sol lunaire fut chaotique, mais globalement réussie. SLIM repose désormais pour l'éternité dans une pose assez comique, « la tête la première » sur les pentes d'un cratère. C'est tout de même une réussite, et les équipes japonaises ont réussi à trois reprises à prendre contact avec SLIM après de terribles nuits lunaires de 2 semaines, pour lesquelles il n'était pas conçu.
SLIM n'a pas été le seul véhicule de 2024 à se poser de travers sur la Lune. Il y a eu aussi l'atterrisseur américain Odysseus et sa mission IM-1 d'Intuitive Machines, un autre acteur public-privé en partenariat avec la NASA. Cette fois, cela a été une réussite, avec un moteur original fonctionnant à l'oxygène liquide et au méthane, et surtout un système d'altimètre laser resté éteint à cause d'une protection restée en place avant le décollage.
Qu'importe, Odysseus a réussi à atterrir avec succès, ou presque ! Oui, il est arrivé un peu vite sur les pentes un peu abruptes de son site d'alunissage et s'est pour ainsi dire « cassé une jambe ». Basculant sur le flanc, il a tout de même réussi à communiquer presque une semaine et à valider une majorité de ses expériences avec les équipes au sol.
La démonstration chinoise
Pour voir un véhicule posé droit sur la Lune en 2024, il fallait attendre la fin du printemps et la mission chinoise Chang'e 6. Cette dernière a atterri sur la face cachée de notre satellite naturel, la Chine a donc longuement préparé sa mission avec l'envoi d'un nouveau véhicule chargé de relayer les signaux (Queqiao-2) avant d'envoyer d'un bloc tous les ingrédients pour rapporter les tout premiers échantillons de la face cachée.
Une fois l'atterrisseur posé, un petit rover est allé prendre quelques photos, tandis qu'un bras robotisé et une foreuse collectaient 1,935 kilo de sol lunaire (et que l'instrument français DORN prenait ses mesures). Un véhicule de remontée a ensuite envoyé les échantillons jusqu'en orbite, puis l'orbiteur les a rapportés vers la Terre. Ils sont déjà à l'étude après leur retour sous parachute le 25 juin dernier.
L'année n'est pas terminée !
Quatre missions lunaires en un an, c'est déjà beaucoup… Mais 2024 est encore longue ! Une nouvelle vague de véhicules est annoncée pour la fin de l'année. Il devait d'ailleurs y avoir la deuxième mission d'Astrobotic, mais l'échec de la première tentative et les corrections engagées seront sans doute trop importantes pour que l'entreprise puisse respecter son agenda initial. Ce sont deux autres entreprises privées qui visent décembre 2024, du moins pour leur décollage.
L'entreprise japonaise iSpace devrait tenter sa chance en premier, avec son atterrisseur privé Hakuto-R numéro 2, nommé Resilience. La firme, subventionnée, mais qui utilise majoritairement des capitaux privés, embarquera des expériences et tentera de faire mieux qu'en 2023. Le premier atterrisseur s'était écrasé sur le sol lunaire à la suite d'une mauvaise interprétation des données d'altitude, à cause d'un changement. Mais cette première aventure avait tout de même permis de beaucoup apprendre sur les systèmes de vol, en particulier pour la navigation en orbite, la transmission des données ou la propulsion lors de la descente.
L'objectif pour iSpace est simple : réussir à montrer avant la majorité des autres entreprises (et en particulier les Américaines) qu'elle peut se poser en partenaire international fiable pour transporter du cargo jusqu'à la surface. C'est là un gros enjeu économique au moment où toutes les agences ont les yeux tournés vers la Lune !
Intuitive Machines veut retenter sa chance
Les autres à tenter d'envoyer le plus rapidement possible leur véhicule pour occuper la scène médiatique et scientifique sont à nouveau les équipes texanes d'Intuitive Machines (Houston). Si la mission IM-1 s'était terminée sur le flanc, elles ont l'espoir de pouvoir effectuer des corrections rapides pour que l'exemplaire suivant puisse réussir un atterrissage « parfait » à l'hiver 2024-25.
Les charges utiles transportées, toujours en partenariat public-privé avec la NASA, seront assez originales. On retrouvera une foreuse expérimentale équipée d'un spectromètre pour analyser le sol prélevé, un petit rover privé et même un robot sauteur fourni directement par Intuitive Machines pour faire office de démonstration technologique.
Si les missions de 2024 sont encore expérimentales et très risquées (leur fort taux d'échec en témoigne), elles sont là pour préparer l'avenir. Devenir le transporteur lunaire de référence n'est pas un petit défi ! Car, nous en reparlerons cet été, il y a beaucoup à emporter sur la Lune...