Le carburant d'aviation durable (SAF) pourrait réduire de 80% l'empreinte carbone du secteur aérien. Problème, son prix 2 à 3 fois plus élevé que le kérosène traditionnel menace l'objectif de neutralité carbone d'ici 2050.

L'Airbus A321 XLR fait partie des avions qui embarquent du SAF aujourd'hui © Alexandre Boero / Clubic
L'Airbus A321 XLR fait partie des avions qui embarquent du SAF aujourd'hui © Alexandre Boero / Clubic

L'industrie aéronautique mise sur le carburant d'aviation durable (SAF) pour réduire son empreinte carbone, mais son coût élevé freine son adoption massive. Tandis qu'Airbus lance l'initiative Book and Claim et que l'IATA, l'Association du transport aérien international, déploie le SAF Registry, les tensions ne manquent pas au sujet la répartition des coûts de cette transition écologique, qui menace l'objectif de neutralité carbone fixé pour 2050. Ce dernier semble plus compliqué que jamais à atteindre pour le monde de l'aviation.

Le SAF, une solution prometteuse mais pour l'instant (trop) coûteuse

Le SAF est aujourd'hui la solution la plus prometteuse pour décarboner l'aviation. Produit principalement à partir de biomasse comme l'huile de friture usagée, il permet une réduction des émissions de CO2 d'environ 80%, grâce à son cycle de vie circulaire. La biomasse utilisée a d'abord absorbé du carbone pendant sa croissance, avant de le relâcher lors de la combustion.

L'un des grands avantages du SAF, c'est sa compatibilité avec les infrastructures et avions existants. « Il n'y a strictement rien à faire au niveau des infrastructures. Il n'y a rien à faire au niveau des avions ou des hélicoptères » explique Julien Manhes, responsable des carburants d'aviation durables chez Airbus, à Clubic. La solution est donc déjà applicable, et elle l'est plutôt facilement d'un point de vue technique.

Le principal obstacle reste cependant son coût prohibitif. Une tonne de SAF coûte environ 2 500 euros, contre 1 000 euros pour le kérosène traditionnel. Ce surcoût 2 à 3 fois plus élevé selon Julien Manhes, et jusqu'à 5 fois selon Guillaume Faury, est difficilement absorbable par les compagnies aériennes sans répercussion sur le prix des billets. Cela vaut d'autant plus en connaissance des nouvelles réglementations européennes, qui imposent son utilisation progressive.

Des initiatives prometteuses dans le secteur de l'aviation, au milieu de tensions grandissantes

Pour faciliter l'adoption du SAF, deux initiatives ont récemment été révélées au public. Airbus a d'abord lancé, le 25 mars 2025, le programme Book and Claim, qui fonctionne comme un système de crédits carbone permettant aux compagnies aériennes d'acheter les bénéfices environnementaux du SAF. Le tout sans avoir à le transporter physiquement jusqu'à leur aéroport, simplifiant considérablement la logistique.

L'IATA a de son côté lancé, le 3 avril, le SAF Registry, qui sera directement géré par la Civil Aviation Decarbonization Organization (CADO). Cette plateforme mondiale vise à standardiser et rendre transparentes les transactions de carburant durable. Ce registre permettra d'éviter le double comptage des bénéfices environnementaux, pour faciliter l'accès au SAF pour toutes les compagnies aériennes, quelle que soit leur taille ou localisation.

Malgré ces avancées, on ne peut pas nier les tensions entre les différents acteurs du secteur. Les compagnies pétrolières ont notamment été pointées du doigt par l'IATA, qui les accuse de ne pas respecter leurs engagements d'approvisionnement en SAF. Les avionneurs et les compagnies aériennes ne pourront pas être les seuls à supporter les coûts du carburant d'aviation durable.