La ministre Fleur Pellerin, l'humoriste Sophia Aram, le président de l'association des maires de France Jacques Pélissard, et le président de la Licra Alain Jakubowicz.
Officialisée à l'occasion d'une conférence de presse qui s'est déroulée à Bercy en présence de Fleur Pellerin, l'application de la Licra n'est pas, comme on pouvait l'imaginer, destinée à signaler les publications racistes sur Internet. Ici, ce ne sont pas les hashtags qui sont ciblés - comme dans l'affaire #unbonjuif, pour ne citer qu'elle - mais les tags et autres inscriptions racistes présents sur les murs, les portes ou encore les trottoirs.
Disponible sur iOS et Android, l'application permet de prendre les tags en photo, de les géolocaliser - il faut donc que le GPS du terminal soit actif - puis de les envoyer, éventuellement avec un commentaire, à la plateforme juridique de la Licra. Cette dernière s'occupe ensuite de vérifier si le tag est bien raciste et, si c'est le cas, le transmet à la municipalité concernée.
Pour l'heure, toutes les communes françaises sont loin de faire partie de cette opération, qui se veut de grande envergure. Les villes de Paris, Lyon, Strasbourg, Nîmes, Reims et Angers soutiennent déjà l'application, et Jacques Pélissard, président de l'association des maires de France, a assuré que d'autres villes rejoindront rapidement la liste.
« Une traçabilité des tags »
Alain Jakubowicz, président de la Licra, a fait lui-même une démonstration de l'application, propose, outre la géolocalisation des tags, des outils permettant d'entrer rapidement en contact avec l'organisme en cas d'agression raciste. Pour Alain Jakubowicz, il était essentiel de « s'adapter à l'époque », car « on ne combat plus le racisme comme avant. » Le président de la Licra a déploré l'usage qui est fait d'Internet dans certains contextes : « Quand on poursuit un humoriste comme Dieudonné, on gagne au tribunal, mais entre-temps il a mis 5 ou 6 vidéos haineuses en ligne. » a-t-il déclaré. Difficile de lutter pour la Licra, qui appelle aujourd'hui les mobinautes à participer à la traque des tags racistes, en vue de les effacer, mais également d'en constituer une traçabilité pour cartographier les quartiers les plus touchés.
Vers un laboratoire des usages de l'Internet
Lors de son intervention, Fleur Pellerin ne s'est pas contentée d'évoquer les tags dans les rues, et a réaffirmé son engagement pour faire d'Internet « un espace numérique libre et reposant sur la confiance ». La ministre déléguée aux PME, à l'Innovation et à l'Économie numérique, a expliqué « privilégier le dialogue avec les réseaux sociaux » pour que ces derniers travaillent, en France, sur la suppression rapide des propos racistes et antisémites sur leurs plateformes. Pour autant, Fleur Pellerin ne pointe pas du doigt les réseaux sociaux, et souhaite « cibler les auteurs des propos haineux, et non pas les outils qu'ils utilisent. »
La ministre a exprimé son soutien à la démarche de la Licra, et souhaite que de telles initiatives se développent : elle a annoncé la mise en place, à la rentrée prochaine, d' « un laboratoire des usages de l'Internet », dont l'objectif sera de lancer des appels à projets en vue du développement d'applications à intérêt public.
Interrogée à la fin de la conférence sur le rôle des citoyens dans la démarche de la Licra, Fleur Pellerin a assuré qu'il n'était pas question de « dénoncer », mais de « signaler » via cette application, d'ores et déjà disponible sur les terminaux Android et iOS. A noter qu'une campagne de communication, a laquelle a notamment participé l'humoriste Sophia Aram via un spot vidéo, a également été dévoilée.