La destination touristique conçue par Euro Disney SCA et le groupe Pierre & Vacances-Center Parcs dispose de sa propre station géothermale. Une installation qui lui a permis d'économiser, l'an dernier, quelque 7 400 tonnes de CO2. Clubic s'est rendu sur place pour voir ce qu'il en est.
Ouvert depuis septembre 2017, Villages Nature Paris possède sa propre station géothermale, avec deux puits qui ont été creusés à 1 900 mètres sous terre. Extraite à environ 80°, l'énergie renouvelable, dont le mécanisme consiste à rechercher l'eau naturellement chaude présente dans le Dogger, ne se situe pas dans une nappe phréatique mais se trouve dans une grosse retenue d'eau.
L'eau chauffée puisée permet de répondre à 40% des besoins des deux parcs de Disneyland Paris et à la totalité des besoins énergétiques de Villages Nature, jusque dans son Aqualagon, emblème de la destination, dont la température de l'eau atteint agréablement les 30°, en intérieur et en extérieur, été comme hiver. Sylvain Langlade, responsable d'équipe d'exploitation chez ENGIE Réseaux, en charge de la centrale géothermie et du réseau de Villages Nature Paris, nous a accueilli sur place, au début du mois de novembre, pour nous expliquer l'importance capitale de la source d'énergie pour la destination, ainsi que ses subtilités. Ce dernier a également pu nous détailler le parcours effectué par l'eau puisée, long de 25 kilomètres.
Une boucle complète de 25 kilomètres en circuit fermé
Sur le site de Villages Nature Paris, officiellement domicilié à Bailly-Romainvilliers, en Seine-et-Marne, les deux puits ont été creusés à une distance de 2,15 kilomètres, dans le Dogger (qui constitue le principal aquifère géothermique exploité en région parisienne) « pour éviter de mélanger eau froide et eau chaude », commente Sylvain Langlade. Nous sommes donc dans une configuration de géothermie profonde, réglementée.Pour remonter l'eau à la surface, un puits récupère l'eau, grâce à une pompe immergée à environ 200 mètres de profondeur, nécessaire pour garantir un bon débit. Une fois arrivée à la surface, l'eau pénètre dans la centrale, puis passe par deux échangeurs pour prendre le maximum d'énergie de l'eau géothermale. « Une fois qu'on l'a prise, on la réinjecte dans le second puits, dans le Dogger », ajoute le responsable de la station.
« La centrale chauffe toute la destination, en passant par la ferme, les chauffages, l'eau chaude des hébergements et l'Aqualagon »
« Une fois cette énergie prise, nous allons sur le réseau de distribution, et la particularité, c'est que nous aller d'abord donner de l'énergie à Disneyland Paris », précise Sylvain Langlade. Et en retour, Mickey retourne de l'eau chauffée à 65° (soit seulement une quinzaine de degrés de perdus depuis l'extraction dans le Dogger) du côté de Villages Nature.
Grâce à cette température, la centrale chauffe toute la destination, en passant par la ferme, les chauffages et l'eau chaude des hébergements. Le reste de l'énergie bifurque vers l'Aqualagon.
« Entre les cottages et les appartements, l'eau est en moyenne à 44° dans l'Aqualagon. Les retours sont de l'ordre de 33° au moment de revenir dans la centrale », précise notre expert.
La boucle effectuée par l'eau se fait en circuit fermé, ce qui signifie que l'eau chaude, une fois de retour dans l'échangeur à une température plus froide, retourne dans le Dogger, vers le second puits, à une température qui avoisine les 30°. La boucle, qui passe par Disneyland Paris, revient puis irrigue Villages Nature, fait 25 kilomètres, en sachant que l'eau parcoure 16 kilomètres aller-retour rien que du côté de Disney.
« À terme, l'eau peut potentiellement se refroidir »
À force de puiser l'eau chaude, on peut redouter un refroidissement de la retenue d'eau dans le futur. Sur cette question, Sylvain Langlade nous explique que « potentiellement, à terme, elle peut se refroidir. Mais certaines installations, qui ont entre 30 et 40 ans, n'ont pas perdu un dixième de degré pour l'instant. Oui, ça peut se réchauffer, mais ça peut être très long. »
Le parcours de l'eau, au sein des éléments de la centrale géothermique de Villages Nature Paris, et l'indépendance totale du site en énergie renouvelable
Une fois remontée à la surface, au sein de la centrale, l'eau géothermale est dirigée vers les filtres. Celle-ci, présente dans le sol, peut être mélangée à des cailloux ou à de la boue. « Nous préservons donc nos équipements en faisant passer l'eau dans des filtres, pour se débarrasser des impuretés », nous explique le membre d'ENGIE Réseaux, en précisant que tout ce qui est au-dessus de 250 microns reste coincé. Dans les filtres, l'eau fait irruption à 78°.Le Syndicat des énergies renouvelables appelle la France à avancer sur la chaleur et l'électrique
Une fois filtrée, l'eau passe par deux échangeurs de 7,5 mégawatts chacun, qui représente le cœur de la centrale. « Ils transmettent l'eau dans le reste du réseau », nous précise-t-on. « Une fois que nous avons refroidi l'eau géothermale, celle-ci revient et va dans la pompe de réinjection, puis retourne dans le sol. Inversement : une fois que l'eau pour les circuits est réchauffée, elle part pour Disneyland Paris et revient ici pour partir sur le réseau de Villages Nature. »
« 100 % des besoins de la destination sont couverts par l'énergie géothermale »
L'autre élément d'importance, ce sont les pompes, qui permettent de faire la route entre Villages Nature et Disneyland Paris, puis le chemin inverse. Il existe aussi une dernière pompe, plus grosse que les autres, qui est celle de réinjection. Comme son nom l'indique, « elle va forcer l'eau à retourner sous terre, puisqu'on veut la réinjecter deux kilomètres sous terre », nous dit Sylvain Langlade.
Villages Nature Paris a été conçue autour des régimes de température de la géothermie. 100 % des besoins de la destination sont couverts par l'énergie géothermale.
Des liens étroits avec Disneyland Paris
La centrale géothermique de Villages Nature a été pensée pour irriguer tout le site mais aussi Disneyland Paris, à 8 kilomètres de là. Les liens entre les deux destinations se matérialisent en un échange d'énergie. Villages Nature fournit un appoint d'énergie à Disneyland Paris, tandis que Mickey peut aussi fournir au village l'énergie nécessaire en période de maintenance, notamment lorsque ses échangeurs et/ou pompes doivent être arrêtés. « Ainsi, le site peut fonctionner 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 », ajoute Sylvain Langlade.« Villages Nature fournit 40 % des besoins des deux parcs Disney »
Dans le détail, Villages Nature fournit 40 % des besoins des deux parcs Disney. Cela correspondait à environ 12 GW/h en 2018.
Aujourd'hui, l'objectif de Disneyland Paris serait de prendre 20 GW/h par an à Villages Nature, et de relier les nouvelles ZAD qui sont en train d'être construites à côté de Disneyland Paris. « Cela devrait arriver en fin d'année ou en début d'année prochaine », indique Sylvain Langlade.
La géothermie répond aux besoins énergétiques de Villages Nature Paris, même l'hiver
Sur Villages Nature, tout a été pensé pour des régimes de température de 65°, de façon à ce qu'il n'y ait pas de complément à apporter. « Même l'hiver, la géothermie fournit tout le parc. Le complément gaz ne monte à peine qu'à 1 ou 2 % », nous explique notre interlocuteur, qui rappelle que les futures extensions de la destination sont comprises dans ces chiffres. Euro Disney SCA et le groupe Pierre & Vacances-Center Parcs ont installé le complexe sur un lieu stratégique, et n'aurait pas pu l'envisager ailleurs. « 300 kilomètres plus loin, ça n'aurait pas été possible, puisque tout se trouve sous nos pieds. C'est une chance », réagit le responsable d'équipe d'exploitation d'ENGIE Réseaux.Cybersécurité de l'IoT : "Initialement, on ne pense pas à faire du hacking un métier" (Moabi)
Si la géothermie n'était pas exploitable, Villages Nature Paris aurait consommé 7 400 tonnes de CO2 en 2018, alors que sa consommation était d'environ 32-33 GW/h.
La géothermie, vous l'aurez compris, est clairement une ressource stratégique, fondamentale dans le développement de Villages Nature Paris et, à terme, de ses futures extensions. Aujourd'hui, la destination équivaut à une petite ville de 4 500 personnes, en comptant les collaborateurs et les visiteurs. À terme, le site devrait grimper à 5 ou 6 000 âmes. Une quinzaine de sous-stations dédiées fonctionnent en permanence pour alimenter les hameaux, avec une sous-station par hameau, qui alimente, chacune, entre 100 et 150 logements en chauffage et en eau chaude. Sans que le « guest » ou client ne s'en aperçoive.