© NASA, ESA, B. Welch (JHU), D. Coe (STScI), A. Pagan (STScI)
© NASA, ESA, B. Welch (JHU), D. Coe (STScI), A. Pagan (STScI)

Une équipe scientifique publie dans le journal Nature la détection d'une étoile extraordinairement lointaine, dont la lumière a mis 12,9 milliards d'années à nous parvenir ! Elle est la plus lointaine jamais observée, et sa découverte n'a été possible que grâce à Hubble et à un effet exceptionnel de lentille gravitationnelle.

Les astrophysiciens espèrent confirmer la découverte avec des mesures du télescope.

Merci les lentilles

« Au début, nous n'y avons même pas cru, elle était tellement plus lointaine que les précédentes étoiles observées, décalées dans le rouge ! » explique Brian Welch, astrophysicien et auteur principal de l'article paru dans Nature. La lumière de cette étoile a mis si longtemps à nous parvenir, qu'avec l'expansion de l'univers et l'effet Doppler, son spectre lumineux s'est décalé « dans le rouge » (c'est le redshift, en anglais, ici d'une valeur de 6.2).

C'est peut-être un point pour vous, mais pour les astrophysiciens, ça veut dire beaucoup... © NASA, ESA, B. Welch (JHU), D. Coe (STScI), A. Pagan (STScI)
C'est peut-être un point pour vous, mais pour les astrophysiciens, ça veut dire beaucoup... © NASA, ESA, B. Welch (JHU), D. Coe (STScI), A. Pagan (STScI)

Découverte par Hubble lors d'une campagne d'observation lointaine, cette étoile a surpris les scientifiques. En effet à cette distance, les galaxies toute entières apparaissent généralement comme des points, et des amas d'étoiles entiers ne peuvent être résolus. Mais cette fois, grâce à un effet de lentille gravitationnelle (un objet ou une galaxie massive déforme la lumière et permet un effet Longue Vue derrière lui), les scientifiques ont observé une galaxie nommée « The Sunrise Arc » (l'Arc du Soleil levant), au sein de laquelle, magnifiée plus d'un millier de fois par l'effet de lentille, ils ont détecté cette étoile.

Une étoile primordiale ?

Surnommée Earendel (l'étoile du matin, en ancien anglais… mais aussi une référence assumée au Silmarillon de J.R.R. Tolkien d'après B. Welch), elle est depuis longtemps éteinte, puisque sa lumière a mis 12,9 milliards d'années à nous parvenir. Tant qu'elle est observable, elle va devenir un sujet d'étude passionnant, car cette étoile est très massive (50 fois la taille de notre Soleil et plusieurs millions de fois plus brillante).

Le cliché "général" de Hubble laisse apercevoir de nombreuses galaxies, dans une poésie toute universelle... © NASA, ESA, B. Welch (JHU), D. Coe (STScI), A. Pagan (STScI)

De plus elle serait de la génération des étoiles primordiales, cette première ou deuxième génération d'étoiles à très courtes vies après le Big Bang, composées d'éléments très légers uniquement (hydrogène, hélium, traces de lithium). « Étudier Earendel ouvrira une fenêtre sur une période de notre univers qui ne nous est pas connue, mais qui mène à tout ce que nous connaissons. C'est un peu comme si nous lisions un livre très intéressant, mais qu'il nous manquait le premier chapitre, et maintenant nous avons une chance de découvrir où tout a commencé », détaille B. Welch.

Besoin d'un gros télescope…

Si la découverte fait peu de doutes, il faudra cependant affiner les mesures (et vérifier par exemple qu'il ne s'agit pas d'un groupe ou cluster très dense d'étoiles, ou d'un duo d'étoiles binaires). De futures observations de Hubble sont prévues, mais l'équipe compte d'ores et déjà sur le télescope James Webb, alors que celui-ci devrait démarrer ses campagnes scientifiques à partir de cet été.

Ce dernier observera sans mal Earendel, et sera en théorie capable de mieux la documenter, et donc de mieux cerner son âge, sa masse et sa composition. Sera-t-il capable de voir des étoiles encore plus lointaines ? Ce n'est toutefois pas garanti : ici, ce ne sont pas tant les performances de Hubble qui ont permis la découverte que cet incroyable effet de lentille gravitationnelle qui nous « rapproche » du passé.

Source : ESA