Une équipe scientifique a entraîné une intelligence artificielle à reconnaître des fissures sur les images radars des satellites Sentinel-1. Les résultats sur le glacier Thwaites en Antarctique montrent des changements de rythme rapides sur les 6 dernières années. Cet outil servira au suivi de long terme.
Les résultats seront aussi corrélés aux autres mesures (épaisseur, température, salinité, etc.).
Fissures sur le glacier Thwaites
L'outil principal d'observation des glaciers d'Antarctique résidait pour l'instant dans la capacité à les photographier régulièrement. Ce qui est important d'ailleurs, tout comme l'étude de la température de l'eau ou de l'atmosphère qui surplombe le continent gelé. Mais cela ne reflète pas toujours toute la complexité des processus en cours. L'un des plus grands glaciers de l'Antarctique, Thwaites, déploie depuis la terre une impressionnante langue de glace qui se fractionne au fil du temps en icebergs. Pour mieux comprendre ce processus, une équipe s'est intéressée aux données radars de la constellation Copernicus, obtenues avec les satellites Sentinel-1. Les amas de glace peuvent ainsi être observés en profondeur, et pas juste en surface avec les images optiques.
Les scientifiques de l'université de Bristol ont choisi de cartographier les fissures relevées par le radar sur la langue de glace en utilisant un algorithme d'intelligence artificielle (ici plutôt de machine learning) qui n'était pas prévu pour ça. En effet, il délimitait initialement des cellules sur les images prises par des microscopes. Et ça marche ! Ils ont ainsi traité plus de 6 années de données radars collectées au-dessus du glacier Thwaites.
Un glacier qui ne craque pas comme prévu
La langue de glace issue du glacier Thwaites est considérée comme un indicateur important pour l'ensemble de l'Antarctique. Le glacier dans sa totalité contient un volume d'eau suffisant pour augmenter celui des océans de 60 cm à lui seul ! Son retrait, l'épaisseur de sa glace ainsi que ses fissures et craquements sont donc d'un grand intérêt scientifique, car l'analyse des données montre aussi les changements de vitesse du flux de glace qui s'écoule en permanence.
Il y a d'ailleurs eu des surprises en observant les données. Les chercheurs s'attendaient à une très lente augmentation du flux à cause du réchauffement climatique de la région, mais les cycles sont plus rapides que prévu. En 6 ans, ils ont isolé deux accélérations et freinages dans l'extension de la langue de glace, de 4 à 6 kilomètres par an. De plus, ils ont réussi à montrer le rôle complexe de la fracturation des glaces dans la vitesse du flux.
Enfin, il faut souligner que l'objectif de cette équipe scientifique n'était pas seulement d'observer le comportement du glacier Thwaites, mais aussi de développer un outil qui pourra être généralisé ailleurs (en Patagonie, au Groenland, etc.), et surtout, qui portera ses fruits à long terme. D'autres missions radars, y compris dans le programme Copernicus, continueront d'observer l'Antarctique au cours des décennies à venir. C'est à cette échelle de temps que les changements profonds (et non seulement cycliques) pourront être observés.
Source : ESA