« Voici le visage que vous aurez dans 25 ans si vous ne faites pas attention à votre santé », révèle cruellement sur la base d'une photo une application pour mobile adossée à un service de conseils médicaux. Le groupe de télécommunications Softbank va proposer à partir de cet été un service spécial qui permettra de voir l'évolution de son visage en fonction de la vie que l'on mène, bonne ou non pour la santé.
Cette application est accompagnée par un bracelet-capteur d'origine américaine, Fitbit Flex, qui permettra aux abonnés de suivre leur condition physique. Softbank a obtenu en exclusivité le droit de commercialiser ce produit au Japon. Les diverses informations enregistrées par le bracelet 24H/24 seront consultables sur le mobile avec lequel le Fitbit Flex communique par liaison sans fil de proximité Bluetooth. Les informations (pas effectués, nombres de calories brûlées, cycles de sommeil...) seront stockées en ligne sur un serveur.
L'utilisateur pourra en outre se fixer des objectifs (distance de marche quotidienne, énergie consommée, etc.) qui, s'ils sont atteints, lui donneront droit à des petits cadeaux. L'ensemble, proposé au tarif de 490 yens (3,75 euros) par mois, sera accompagné d'un service de conseils médicaux par téléphone, 365 jours par an, 24 heures sur 24. Progressivement viendront s'ajouter d'autres accessoires pour améliorer encore le suivi de santé, a indiqué Softbank qui, parallèlement, a présenté un nouveau smartphone « simple » pour personnes âgées.
Ce « simple sumaho », conçu par Sharp, est un rival direct du « raku raku sumaho » fabriqué par Fujitsu et commercialisé par NTT Docomo. Une variante de ce dernier modèle très populaire au Japon est d'ailleurs proposée en France par Orange. Le marché des « seniors » est considérable au Japon, quelque 30 millions de personnes, puisque plus d'un quart de la population (égale à 127,5 millions d'habitants) a désormais plus de 65 ans. Pour développer le « simple sumaho », Sharp et Softbank ont effectué une enquête auprès de 1 000 potentiels utilisateurs, sondage qui leur a permis de comprendre pourquoi et quand les personnes âgées rencontraient des difficultés dans l'usage d'un smartphone.
Et c'est là que l'on apprend par exemple que les individus de plus de 60 ans ont tout autant que les jeunes envie de se connecter à Twitter ou Facebook, mais de façon aisée. Et c'est pourquoi sur le « simple sumaho » sont pré-configurés des raccourcis vers ces deux sites communautaires. Il n'y a ainsi pas d'application à installer ni à mettre à jour, l'interface utilisée étant le web.
Les personnes d'âge avancé veulent aussi immédiatement trouver la fonction dont elles ont besoin, sans s'embarrasser de menus interminables. D'où les boutons pré-définis en dur et des touches tactiles très visibles sur l'écran d'accueil pour les e-mails, la calculatrice, le calendrier et autres applications d'usage très fréquent.
Reste à inciter les personnes âgées à franchir le Rubicon, à savoir entrer dans une boutique pour acheter un smartphone. Ce n'est en effet pas chose facile car ces magasins emploient souvent des jeunes qui parlent un jargon technique inaccessible. Softbank a donc formé spécialement un quarteron d'employés plus âgés pour faciliter la communication avec leurs congénères.
Autres nouveautés présentées par Softbank, deux smartphones capables de recevoir la télévision numérique terrestre, pas seulement le signal dédié « One seg » (un seul segment), mais le full-seg, à savoir le signal qui est adressé aux récepteurs à grand écran. Softbank s'est aussi distingué par le « Digno R », un smartphone petit et très léger (94 grammes) fabriqué en exclusivité par Kyocera, un nom généralement plutôt lié au rival KDDI, puisque les deux entreprises ont le même fondateur, le capitaine d'industrie Kazuo Inamori.
En proposant une gamme large de smartphones, Softbank espère augmenter ses parts de marchés, d'autant qu'il est en train de notablement améliorer la qualité de son réseau, du moins en théorie, via le déploiement rapide de son infrastructure LTE. Et les Japonais sont demandeurs, comme le prouve le dynamisme du marché.
Au cours du premier trimestre, les ventes de smartphones au Japon ont en effet augmenté de 9% comparées à celles de la même période de 2012, au point d'atteindre un niveau record en mars. Pourquoi mars ? Parce que tout le monde se prépare alors pour le 1er avril qui marque le début d'une nouvelle année scolaire et budgétaire et que beaucoup de gens (qui changent de poste, accèdent à leur premier emploi, passent à un grade supérieur, etc.) en profitent pour faire peau neuve et donc acheter de nouveaux habits, téléphones et même automobiles.
Il est intéressant de noter, comme le fait d'ailleurs l'institut GFK Japon, que le cycle de renouvellement des smartphones est très court au Japon: moins de deux ans. Pour autant, le patron de Softbank, Masayoshi Son, ne peut pas se contenter du marché japonais, fut-il actif, s'il veut atteindre son objectif: être dans le trio des plus grands opérateurs mobiles, le plus gros si possible.
Pour cela, il s'est mis en tête de racheter le groupe américain Sprint Nextel pour 20 milliards de dollars, de quoi propulser Softbank directement à la 3e place mondiale. Las, le câblo-opérateur américain Dish Network veut lui barrer la route en proposant 25,5 milliards de dollars pour s'emparer de Sprint. Mais on ne défie pas impunément M. Son.
Il y a quelques jours, lors d'une conférence de presse spécialement consacrée au cas Sprint, M. Son a accusé ouvertement Dish Network, de mentir pour rafler la mise en gonflant son offre et minimisant de façon éhontée celle de Softbank. « Si l'on prend en compte les synergies possibles, l'offre de Softbank est supérieure de 21% par action à celle de Dish », assure M. Son. Selon lui, les prix par action exposés par le rival américain Dish sont « imaginaires ». En conséquence, M. Son n'a pas de motif de relever le montant proposé « puisque son offre est déjà plus élevée ».
« Je ne veux pas critiquer, je veux juste montrer les différences réelles entre les deux offres », a insisté M. Son en s'appliquant à démonter point par point le plan de Dish Network. « Dish dit proposer 7,00 dollars par action contre 6,22 dollars pour Softbank, mais cela est faux », a expliqué M. Son.
D'après lui, les synergies permises par Softbank, évaluées à 2 milliards de dollars net par an, doivent être valorisées de sorte que tous comptes faits, l'offre de Softbank revient à proposer 7,65 dollars par action.
Sofbank argue qu'avec Sprint, il deviendrait le plus gros client d'équipementiers et de fabricants de smartphones et que cela se traduirait par d'importantes économies d'échelle que Dish serait bien incapable de revendiquer, n'ayant pas d'activité mobile « et aucune expérience en la matière ». De plus, « si Dish rachète Sprint, ce dernier va accuser un énorme retard dans le déploiement de son réseau LTE », faute de trésorerie, alors que cette technique est cruciale pour rester dans la compétition, prévient encore M. Son. A l'inverse, l'offre de Dish, synergies également comprises, ne dépasserait pas 6,31 dollars/action, selon M. Son, car Dish aurait omis de tenir compte des coûts qu'il aura à assumer en cas de reprise de Sprint et qui réduisent la valeur de sa proposition.
M. Son fait notamment remarquer, à titre d'exemple, que si Sprint rompait le contrat de rachat déjà signé avec Softbank, il devrait payer des indemnités de 600 millions de dollars. « Ils n'ont pas regardé l'intérieur de Sprint, nous, nous l'avons fait », a encore insisté M. Son, décidé à mener à bien son projet. Softbank, qui a déjà acheté en 2006 les activités mobiles mal en point du britannique Vodafone au Japon, dit œuvrer pour que le rachat aboutisse comme prévu au 1er juillet.