Les publicités d'au moins une quarantaine de grandes marques ont été affichées sur les comptes Twitter de suprémacistes blancs et autres néo-nazis depuis qu'Elon Musk a réhabilité des comptes jusque-là suspendus sur la plateforme.
Sans surprise, certaines de ces entreprises, plus pour des raisons de relations publiques que pour leur supposé alignement avec des valeurs d'extrême gauche, ont choisi de retirer leurs publicités de la plateforme. Le navire Twitter, qui semble naviguer à vue, pourrait bien redécouvrir l'importance de la modération et des politiques de contenu à cette occasion.
De nouveaux départs d'annonceurs
L'article du Washington Post, qui a recensé les nombreuses publicités de grandes marques et autres entités majeures, n'a pas eu besoin de mener une recherche extensive pour y parvenir. La quarantaine d'annonceurs cités a été repérée sur seulement deux profils : Anglin, le rédacteur en chef du plus gros site internet néo-nazi américain, et Casey, leader d'un groupe de suprémacistes blancs. Ces deux comptes, bannis de la plateforme en 2013 pour l'un et en 2019 pour l'autre, n'ont regagné leur place qu'à l'occasion de la grande amnistie décidée par Elon Musk il y a peu.
Le ministère américain de la Santé, dont certaines des annonces ont ainsi été associées à ces deux personnages, entre autres groupes racistes et antisémites, a choisi en l'apprenant de suspendre ses publicités sur Twitter. Ce n'est que le dernier grand nom marquant l'exode d'annonceurs qui a commencé aux premières rumeurs de l'arrivée de Musk aux manettes. Si certains d'entre eux, notamment Apple et Amazon, sont depuis revenus sur leur décision, cela n'inverse pas pour autant la tendance. Et ce n'est pas la notation des deux plus grandes agences publicitaires américaines, qui considèrent les publicités sur Twitter comme « très risquées » pour les annonceurs, qui risque d'inverser la tendance.
Quand Elon Musk découvre que la modération est un impératif économique
On peut arguer que l'ancienne équipe dirigeante de Twitter était plus proche des démocrates et des progressistes en général que des républicains et des conservateurs, et c'est probablement vrai. Cependant, les équipes de modération en place étaient le fruit d'années d'expérience, et un indispensable pour rendre la plateforme suffisamment présentable pour des annonceurs, sur lesquels repose le modèle économique de l'entreprise. À ses dépens, Elon Musk découvre que son coup de pied dans la fourmilière était certes un bel effet d'annonce, mais aussi l'une des pires décisions qu'il pouvait prendre pour assurer la rentabilité de sa nouvelle entreprise.
Loin d'être un absolutiste des valeurs progressistes, il a pourtant déjà pris des décisions en contradiction avec la vision qu'il défend de la liberté d'expression. Il avait, dès les premiers jours de son acquisition, tenté de rassurer les annonceurs en leur promettant que le réseau social ne deviendrait pas une infernale zone de non droit. Le rappeur Kanye West, qui n'a ainsi récupéré son compte Twitter qu'une courte période, a immédiatement tenu à montrer ce qu'il en pensait, en twittant un swastika avant d'être à nouveau banni de la plateforme. Quant aux comptes de néo-nazis évoqués précédemment, ils sont toujours en ligne mais plus aucune publicité ne s'y affiche. Entre réussite économique et respect de ses valeurs, où se situe l'équilibre d'Elon Musk ?
Sources : The Verge, Washington Post