En fin d’année 1994, Capcom fait une petite infidélité à Nintendo avec sa saga Mega Man en offrant un épisode exclusif à la Mega Drive de SEGA. Hérésie ?
En 1994, au vu du succès de la SEGA Mega Drive (notamment aux Etats-Unis), Capcom prend la décision de gratifier les joueurs SEGA d’un épisode inédit de Mega Man. Un choc pour les joueurs Nintendo, tant le petit robot bleu semblait voué à être lié à vie avec Nintendo depuis 1987. Une bonne nouvelle donc pour les joueurs SEGA, qui allaient pouvoir profiter d’un Mega Man inédit… ou presque. En effet, Mega Man The Wily Wars est en réalité une compilation matinée de « remake », exactement comme le fut un certain Super Mario All-Stars l’année précédente sur Super Nintendo.
Aux antipodes de la bataille des téraflops, de la 4K et des 60 fps, NEO•Classics vous propose un retour vers les origines du jeu vidéo. Du titre 2D en gros pixels au moins lointain jeu à la 3D hésitante, cette chronique vous invite à (re)découvrir les pépites vidéoludiques qui ont ouvert le monde au 10e art...
Une compilation sur fond de remake intégral
Après six épisodes sur NES et un Mega Man X sensationnel sur Super Nintendo, Capcom décide donc d’exporter sa saga phare du côté de chez SEGA. L’éditeur nippon va d'ailleurs proposer divers titres exclusifs à la console 16 bits de SEGA, parmi lesquels Forgotten Worlds, The Punisher ou encore le très réussi Mega Twins (Chiki Chiki Boys). À cela vient donc s’ajouter un « nouveau » Mega Man. Un Mega Man The Wily Wars qui a été pris en charge par la division « mobile » de Capcom, celle à l’origine des différents épisode Game Boy de la saga.
Comme expliqué plus haut, il s’agit ici d’une compilation, qui revisite à la sauce SEGA 16 bits les trois premiers épisodes lancés sur NES. Et contrairement à ce que l’on pourrait croire, il existe une vraie raison à cela. En effet, passablement irrité par ses différents échecs au fil des années, l’infâme Dr Wily a décidé de revenir dans le temps, pour éradiquer une bonne fois pour toute Mega Man, et c’est pourquoi le titre nous propose de rejouer à d’anciens épisodes, mais de façon modernisée. Alors oui, c’est un peu (beaucoup) tiré par les cheveux, mais il y a de l’idée.
Pas de version physique aux Etats-Unis….
Côté distribution, ce Mega Man a été lancé au Japon (sous l’appellation Rockman Mega World) de manière traditionnelle, avec une boite, une cartouche, une notice. Aux Etats-Unis, SEGA décide de distribuer le jeu par le biais de sa nouvelle offre SEGA Channel. Un service « pay to play » de jeu en ligne, fonctionnant alors à travers des services de télévision par câble et via un câble coaxial, qui permettait aux joueurs (contre la somme de 15 dollars/mois) de télécharger des jeux, des démos…
Un service assez confidentiel donc, et peu pratique, puisque toutes les données étaient supprimées de la mémoire de la console une fois celle-ci mise hors tension… En Europe en revanche, le jeu a été lancé de manière traditionnelle, sous l’appellation Mega Man The Wily Wars. Un titre particulièrement rare (et donc cher) aujourd’hui, et il va sans dire que toutes les versions US disponibles sur le marché, sont des reproductions.
Graphiquement, ce Mega Man The Wily Wars transpose les trois premiers opus 8 bits en versions 16 bits. Le tout reste malgré tout très fidèle aux opus d’origine, avec évidemment davantage de détails à l’écran, mais toujours cette patte très colorée et un petit côté « rondouillard » plutôt appréciable.
Idem côté audio, avec des musiques qui ont été réorchestrées façon Mega Drive, et à l’oreille, l’ensemble est plutôt satisfaisant (même si beaucoup préféreront les musiques originales). L’une des nouveautés flagrantes concerne la présence ici d’un système de sauvegarde, avec trois slots disponibles. Sympa.
Dommage toutefois que, manette en mains, ce Mega Man The Wily Wars se révèle un peu moins « précis » que les opus NES. Rien de très grave dans l’ensemble, mais la jouabilité est clairement moins chirurgicale que celle proposée par la série originelle, avec notamment un microfreeze un peu gênant en début de course.
Dommage également que le jeu affiche d’aussi importantes chutes de frame rate… Le combat contre Yellow Devil étant le must (ou plutôt le "worst"), avec un affrontement qui se déroule littéralement au ralenti.
À noter également des déplacements/glissades plus rapides que sur NES, mais aussi des tirs plus lents, avec un fire rate beaucoup plus limité que sur les versions NES. Ah oui, pour info, le jeu est encore plus difficile que sur NES (notamment Mega Man 2, qui ne dispose pas ici d'un quelconque mode "Normal").
Trois remakes qui cachent…. un (mini) jeu inédit !
À noter qu’une fois les trois jeux terminés, ce Mega Man The Wily Wars donne la possibilité au joueur de profiter… d’un jeu inédit ! En effet, on déverrouille alors le mode Wily Tower, qui permet de s’adonner à un opus inédit, avec trois nouveaux robots à vaincre ; à savoir Buster Rod.G, Mega Water et Hyper Storm. Trois nouveaux robots regroupés dans une unité baptisée « Genesis Unit » (Mega Drive… Genesis… vous l’avez ?), et qui s’inspirent du roman Journey to the West.
Avant chaque niveau, on peut définir 8 armes secondaires, à choisir parmi toutes celles proposées par les trois premiers opus. Une fois les trois boss vaincus, on accède à une nouvelle tour du machiavélique Dr Wily, sans oublier évidemment un énième combat final. Le tout se boucle en une trentaine de minutes, mais rares sont ceux à connaitre (aujourd’hui encore) l’existence de ce mode Wily Tower.
À sa sortie en Europe, ce Mega Man The Wily Wars est accueilli de manière mitigée par la presse. Le magazine Player One lui accorde la note de 89%, pointant du doigt ses nombreux ralentissements, mais aussi le côté « 3 en 1 » très appréciable, tout comme le relooking général. De son côté, Consoles+ avait attribué au jeu la note de 76%, malgré un « Méga non », et un « Mega Man qui ne méritait pas ça ».
À titre purement personnel, cet opus Mega Drive ne figure pas forcément parmi les favoris du fervent amateur de Mega Man que je suis, mais j’apprécie malgré tout le relancer à l’occasion, comme une version « alternative » aux indémodables épisodes NES. Malgré le côté « remake », le jeu a un feeling général très différent, et s’apparente même parfois davantage à une « copie » qu’un « remake ». Mais vous savez ce que c'est, quand on aime…
Un épisode inédit aussi…. sur SEGA Game Gear !
L’année suivante (en 1995 donc), Mega Man est de retour chez SEGA, pas sur Mega Drive cette fois… mais sur Game Gear. En effet, après cinq excellents opus sur la console portable Game Boy de Nintendo, le fiston robotique du Dr Light s’exporte sur la portable de SEGA, avec un épisode baptisé très sobrement : Mega Man.
Un épisode supervisé (de loin) par Capcom, puisque ce dernier a été mis au point par Freestyle, et édité par US Gold. Un titre exclusif qui plus est au marché américain.
Toutefois, comme pour The Wily Wars, ce Mega Man Game Gear n’est pas une « nouveauté », puisqu’il mélange des éléments (niveaux, musiques…) de différents opus sur NES. Les quatre robot masters sont notamment repris de Mega Man 4 et Mega Man 5. Un melting pot assez déroutant à vrai dire…
Un opus Game Gear qui s’autorise quelques folies (le bruit du buster….) et qui doit évidemment s’adapter aux limitations de la console. On est ainsi limité à deux tirs simultanément (contre 3 en temps normal), mais c’est surtout la visibilité générale qui pose souci ici, avec un écran vraiment trop petit (à tel point que les développeurs ont du inclure un scrolling vertical !) et des éléments qui tendent à s’afficher tardivement, sans oublier quelques sauts « à l’aveugle »… Bref, un opus Game Gear peu inspiré, mais surtout assez mal réalisé, et qui se boucle en une petite quarantaine de minutes à peine…
Et si jamais il vous venait subitement à l'idée de lancer Mega Man The Wily Wars, sachez que le jeu est disponible avec la petite Mega Drive Mini. Pour les fans, le jeu va également être réédité, en édition collector qui plus est, en fin d'année, avec (et pour la première fois donc) une édition Genesis digne de ce nom. Mais vous l'avez sans doute déjà précommandé n'est-ce-pas ?