© sezer66 / Shutterstock
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La toute première étude américaine consacrée à la préservation du jeu vidéo laisse apparaître une situation critique en matière de disponibilité commerciale. Près de 9 jeux sur 10 sortis avant 2010 seraient indisponibles, et la tendance ne ferait que s'aggraver.

Le rapport met en avant l'absence d'un système de conservation efficace sur le territoire américain.

La préservation du patrimoine vidéoludique en question

C'est le constat dramatique dressé par la Video Game History Foundation (VGHF) et le Software Preservation Network : 87 % des jeux vidéo dits classiques sont indisponibles dans le commerce ou en danger critique de disparition aux États-Unis. Actuellement, les principaux moyens de se plonger dans l'histoire du jeu vidéo sont de posséder soi-même une collection, de voyager pour se rendre dans des lieux préservant les titres ou d'avoir recours au piratage et à l'émulation.

L'étude pointe également du doigt l'Entertainment Software Association (organisatrice de l'E3), qui a soutenu avec succès devant l'US Copyright Office que l'industrie du jeu vidéo en faisait assez pour « préserver commercialement sa propre histoire et que des protections supplémentaires pour les institutions de préservation nuiraient à leurs résultats ».

Les données ont été compilées à partir des écosystèmes individuels (Commodore 64, Game Boy, PlayStation 2, etc.) et triées par catégories. Les plateformes sur lesquelles il est presque impossible d'acheter des jeux sont classées en abandonnées, celles dont la ludothèque est difficile à trouver ont reçu l'étiquette négligée, et le reste est classé en « actif ». Par exemple, la ludothèque de la Commodore 2 est classée en abandonnée avec seulement 4,5 % de jeux disponibles, tandis que celle de la PS2 est considérée comme active avec un taux de disponibilité de 12 %.

© VGHF
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Différents territoires, différentes lois

Aux États-Unis, les lois consacrées aux droits d'auteur sont considérées comme obsolètes par la VGHF, qui estime qu'elles viennent mettre à mal tout projet de préservation ou de conservation efficace du jeu vidéo. Le but de cette étude est justement de faire comprendre aux autorités que l'urgence est présente, qu'après, il sera trop tard, et que les intérêts de l'ESA diffèrent de l'intérêt général en matière de conservation. La prochaine révision des règles du Digital Millenium Copyright Act est prévue en 2024, et la VGHF espère que des mesures spécifiques seront prises pour le jeu vidéo.

En France, les problématiques sont différentes. Dans l'Hexagone, le dépôt légal garantit en principe la préservation du jeu vidéo sous sa forme physique. Depuis François Ier, mais surtout depuis une loi de 1992, tout ce qui est produit ou distribué en France doit être déposé. La loi ne mentionne pas directement le jeu vidéo, mais celui-ci est concerné en tant que document multimédia et en tant que logiciel. Pour tout ce qui est sorti avant cette année-là, une politique d'acquisition est en place du côté de la BnF pour compléter les collections.

Quant aux jeux dématérialisés, ils compliquent la tâche des conservateurs, mais les éditeurs sont désormais en mesure de déposer les fichiers une fois que les titres ont été délestés des mesures anticopies. Tous les éditeurs ne connaissent pas cette possibilité, mais des chargés de mission contactent régulièrement les acteurs du jeu vidéo pour leur rappeler l'obligation de dépôt et leur présenter les options qui s'offrent à eux.