E3 2016 : rencontre avec l'équipe artistique de Dishonored 2

Audrey Oeillet
Publié le 20 juin 2016 à 19h02
Dishonored 2 est le jeu qui a été le plus dévoilé lors de la conférence Bethesda de l'E3 2016. Attendu le 11 novembre prochain sur PC, Xbox One et PS4, le titre développé une fois encore par Arkane Lyon devrait être l'un des AAA les plus sollicités de la fin de l'année. Nous sommes allés à la rencontre de deux de ses développeurs pour en savoir un peu plus sur un jeu qui est encore plein de mystères.

Sébastien Mitton et Jean-Luc Monnet sont respectivement directeur artistique et lead concept artist/assistant directeur artistique au sein d'Arkane Lyon. Quelques jours après la conférence de Bethesda et alors que l'E3 battait son plein, nous avons pu les rencontrer pour leur poser quelques questions concernant Dishonored 2, le développement et ce qui attend les joueurs qui se lanceront en novembre dans l'aventure, que ce soit avec l'assassin Corvo ou bien sa fille, Emily.

Quand avez-vous commencé à travailler sur Dishonored 2 ?

Sebastien Mitton : Il y avait déjà des idées durant le développement du premier mais elles n'étaient pas encore discutées. On a commencé à réfléchir au 2 il y a 3 ans et demi, 4 ans, quand on était sur les DLC du premier.

Jean-Luc Monnet : C'était la transition.

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Jean-Luc Monnet et Sébastien Mitton

Comment se sont passés les post-mortem du premier jeu ? Quels ont été les retours notables des joueurs ?

SM : On s'est rendu compte qu'on touchait deux publics différents : d'un côté, les hardcore gamers, qui voulaient jouer à fond, rentrer dans l'histoire, découvrir toutes les notes, qui adorent les combats et jouer avec les pouvoirs, et puis il y a les casuals qui veulent vivre l'histoire en allant au plus simple... On essaie d'écouter tout le monde car le jeu permet de faire tout ça.

Il y a des joueurs qui se sont plaints du fait que l'on pouvait traverser des niveaux trop rapidement à cause de pouvoirs trop puissants, et d'autres qui trouvaient que le côté RPG n'était pas suffisamment développé.

On a écouté tout ça pour Dishonored 2, on a développé davantage l'histoire, elle se dissémine davantage dans les niveaux, il y a plus de personnages dans le jeu et que l'on peut rencontrer... Le premier jeu, tu le fais et tu te rends compte que tu aurais pu pousser plus sur certains points, mais durant la production, il faut faire des choix. Là, on a voulu aller plus loin sur tous les niveaux, pour satisfaire tout le monde, autant ceux qui se focalisent sur les combats que ceux qui se concentrent sur l'histoire.

JLM : L'univers visuel du premier avait apparemment bien plu : on nous a associés au steampunk, ce n'était pas trop notre idée de départ mais ce n'est pas une insulte non plus ! On a continué à faire des trucs qu'on aimait tout en allant plus loin dans la même direction, on s'est basé sur ce qu'on avait déjà fait tout en développant l'univers, sans effacer ce que les gens avaient aimé dans le premier jeu.

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Le premier Dishonored avait déjà un level design assez fou, avec de multiples recoins et endroits à explorer, des passages cachés un peu partout... Comment avez-vous poussé plus loin cette caractéristique ?

SM : Pour commencer, on a changé de génération de consoles et on a construit notre propre moteur de jeu, avec nos propres outils. Ça a été un peu compliqué au début de développer le jeu en même temps que les outils, mais ça nous a permis de pallier tout un tas de contraintes qu'on avait pu avoir sur les précédentes générations.
Par exemple, un niveau de Dishonored 2 équivaut à environ 4 ou 5 niveaux de Dishonored 1, c'est encore plus grand, c'est une succession de mini open world qui sont connectés dans l'histoire. Ça apporte d'importantes modifications par rapport au premier jeu : par exemple, les civils et les gardes peuvent suivre le joueur jusqu'au bout du niveau, on ne peut plus les semer comme c'était possible de le faire dans Dishonored.

Le level design a été très complexe à développer, ça a été un gros challenge, mais le résultat est vraiment à la hauteur de nos attentes.


L'un des éléments de gameplay vraiment saisissant qui a été montré durant la conférence de Bethesda, c'est le moment où Emily voyage dans le passé pour modifier le présent dans un même bâtiment grâce à un artefact. On la voit notamment remonter le temps pour esquiver un ennemi ou passer à travers une porte qui n'existe plus... Comment avez-vous conçu ce mécanisme de gameplay ? Vous avez remodélisé deux fois la même zone ?

SM : En fait, quand cette idée est apparue, on a tous regardé les level designer et on n'y croyait pas trop : comment est-ce qu'on peut faire deux temps en même temps ? En fait, ça va beaucoup plus loin que ça, parce qu'on est Arkane et qu'on ne veut pas frustrer les joueurs. Alors oui, ce sont deux niveaux qui sont parallèles pour passer du présent au passé, mais il n'y a pas seulement deux niveaux, mais 4 ou 5, car quand on évolue dans ce niveau, on peut changer le présent quand on agit dans le passé... niveau complexité, je crois qu'on est allé au maximum (rires).

JLM : C'est très fort car quand on sort de ce niveau, on a changé des choses dans le présent, ou pas, selon ce qu'on a fait... car on ne fait pas un seul choix au départ, en choisissant Emily ou Corvo, on en fait tout au long du jeu et ça impacte l'histoire, le monde...

SM : Le coup du passé-présent, on ne le joue pas dans tous les niveaux, c'est une feature parmi d'autres. Nous avons énormément travaillé à proposer des features différentes dans chaque niveau pour leur développer des identités propres. Les joueurs comprendront qu'il se passe des choses à chaque niveau, ils vont être surpris. Ce n'est pas un jeu linéaire.

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Dans le premier jeu, l'un des axes mis en avant, c'était le fait qu'on pouvait atteindre une cible et la tuer sans jamais l'approcher, ni même la voir. Ce sera encore le cas dans Dishonored 2 ?

SM : Oui, l'une des annonces qu'on a faites durant l'E3 c'est qu'on pourrait entièrement jouer sans les pouvoirs si on le décide, et bien sûr on pourrait venir à bout d'une cible indirectement, sans la tuer nous-même, notamment grâce au système de chaos. Ça impacte encore l'environnement, par exemple si on tue beaucoup de gens, les corps seront infestés de mouches, donc les passants vont de moins en moins sortir... Tout a un impact et modifie l'expérience. On peut refaire le jeu en boucle et avoir toujours une atmosphère différente.

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Choisir Emily en tant que deuxième personnage, ç'a été évident pour vous dès le départ ?

JLM : Oui, ça tombait sous le sens, tout le monde a été séduit quand on a lancé l'idée. Mais on a mis du temps avant de décider qu'elle serait jouable.

SM : Harvey Smith, notre creative director, est américain, et il s'attache vraiment aux genres. Il cherche toujours un équilibre, sur les couleurs de peau... Dans le jeu on a différents genres, on a des bisexuels, des homosexuels... Tout est distillé dans le jeu. Parfois ce n'est pas officiel car le jeu se déroule à une époque où ils ne peuvent pas sortir dans la rue et le crier sur tous les toits, mais tout est là, tout est présent dans le jeu. Donc avoir un personnage féminin jouable, ça rentre dans cette démarche de développer un univers riche et plausible.

JLM : Corvo est toujours le garde du corps de l'impératrice, Emily, qui est sa fille. Elle, elle est jeune, un peu triste, elle est sur le trône malgré elle, elle sort la nuit, son père l'entraîne... c'est un personnage très différent de Corvo.

SM : Les joueurs vont avoir le choix de jouer avec elle ou Corvo. Certains joueurs ne se voient pas jouer avec un autre personnage que Corvo. On lit les forums, il y a des joueurs qui ne veulent pas du tout jouer avec un personnage féminin, mais je suis sûr qu'ils vont revenir sur leur décision, car Emily a des pouvoirs vraiment cools. Il est possible de faire le jeu avec Corvo et d'avoir une toute autre expérience par la suite avec Emily : les personnages que l'on rencontre ne réagissent pas du tout de la même façon avec l'un et l'autre.

Il faut bien avoir connaissance du fait que, pendant le jeu, on ne peut pas passer de Corvo à Emily et vice-versa : ce serait bizarre, comme faire du multijoueur. Raison de plus pour refaire le jeu plusieurs fois !

Merci !
Audrey Oeillet
Par Audrey Oeillet

Journaliste mais geekette avant tout, je m'intéresse aussi bien à la dernière tablette innovante qu'aux réseaux sociaux, aux offres mobiles, aux périphériques gamers ou encore aux livres électroniques, sans oublier les gadgets et autres actualités insolites liées à l'univers du hi-tech. Et comme il n'y a pas que les z'Internets dans la vie, j'aime aussi les jeux vidéo, les comics, la littérature SF, les séries télé et les chats. Et les poneys, évidemment.

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