Les équipes ont passé plus d'un an à tester et chercher des solutions pour enfoncer la sonde dans le sol martien. Centimètre par centimètre, leur dernière tentative semble couronnée de succès.
Comme quoi il ne faut jamais baisser les bras…
Etudier la diffusion des températures à la surface
La route est encore longue : compte tenu de la longueur de la tête de forage, la sonde de l'instrument « Heat Flow and Physical Properties Package » (HP3) n'est enfoncée aujourd'hui que de 30 à 40 centimètres dans le sol martien. Il faudra encore du temps (et peut-être quelques sueurs froides) pour que HP3 atteigne les cinq mètres de profondeur idéale pour son fonctionnement.
Capable de relever les variations de températures grâce à des capteurs situés sur le « câble » qui relie la tête de forage à la surface, HP3 doit révéler l'influence solaire sur la croûte de surface de Mars, mais aussi mettre en évidence un éventuel cœur chaud de la planète.
Toutefois, depuis l'atterrissage de la sonde InSight qui le transportait en novembre 2018, l'aventure a été difficile pour l'instrument et les équipes allemandes qui s'occupent de lui.
Pâtés de sable
Le déploiement de HP3 a commencé en mars 2019 avec confiance puisque l'instrument juste à côté, le sismomètre de précision SEIS, écoutait déjà les potentiels « tremblements de Mars ». Malheureusement pour les ingénieurs et chercheurs, la tête de forage de HP3 est restée bloquée dans le sol, stoppée après 20 à 25 centimètres de progression.
A-t-elle heurté un rocher dans cette zone sableuse ? Son câble est-il bloqué dans le tube qui permet le déploiement ?
En désespoir de cause, aidées par les équipes du Jet Propulsion Laboratory qui gèrent l'ensemble de la mission InSight, le corps de l'instrument HP3 est déplacé, ce qui permet de mieux observer la tête de forage, qui, malgré son mécanisme à percussion, échoue à s'enfoncer dans le sol.
Les scientifiques finissent par identifier une propriété inattendue de friction du sable à la surface (c'était « un peu comme de prévoir de creuser dans du sucre et de forer dans de la farine à la place » décrit un responsable sur le site de l'agence allemande). À l'automne puis au début de l'hiver, différentes tentatives avec le bras robotisé de la mission visent à tasser le sable pour que la sonde s'enfonce plus facilement. Las, par deux fois, la tête de forage est… remontée.
Dernier sauvetage pour HP3
Début 2020, les équipes allemandes et américaines ont déployé l'une des toutes dernières possibilités pour sauver la mission de HP3. Avec le godet situé au bout du bras robotisé, ils ont appuyé sur le bord de la tête de forage pour l'empêcher de remonter, et l'aider à s'enfoncer une bonne fois pour toutes dans le sable rouge. L'opération est particulièrement risquée : un effort mal appliqué quelques millimètres plus à gauche et le bras robotisé peut sectionner le câble et définitivement anéantir les espoirs des deux équipes.
Heureusement, cette nouvelle méthode fonctionne. Même si le nombre d'échanges avec l'instrument est limité après déjà un an et demi passé à la surface de Mars, la tête de forage s'enfonce d'environ d'un à deux centimètres par semaine. Et alors qu'elle passe entièrement sous la surface, le bras robotisé qui continue d'appliquer une pression maximale sur le sol ne servira bientôt plus à rien. Dans cette lutte contre les éléments, il suffit de regarder le câble bardé de capteurs passifs s'enfoncer et disparaître doucement dans le sable.
Il faut toutefois rester prudents jusqu'à ce que les équipes allemandes puissent effectivement récolter les données qu'ils sont allés chercher à 200 millions de kilomètres de leur laboratoire. Pour le moment, c'est une victoire, après plus d'une dizaine de mois d'efforts et de tentatives.
Source : The InSight mission logbook