Louer plutôt qu'acheter, la logique a toujours été implacable pour des biens utilisés épisodiquement : voiture, vélo, ski ou même des accessoires de mode. Désormais, la location concerne aussi des produits utilisés au quotidien : ordinateurs, tablettes ou téléviseurs. L'argument est simple, on paie l'usage, pas la propriété de l'objet. Ce qui permet de suivre les évolutions technologiques sans avoir à racheter un appareil.
Le smartphone a marqué une rupture, autant dans modèle économique que le vocabulaire. On ne loue plus, on « s'abonne à un service ». Financement de l'appareil, accès au réseau, communications, tout est mélangé pour ne payer qu'un petit montant... pendant 24 mois. Désormais, l'objectif consiste à installer l'utilisateur dans une logique de paiement perpétuel pour s'assurer des revenus réguliers. Toutes les entreprises adorent les revenus récurrents - surtout celles cotées en bourse. Ils donnent un flux de liquidité constant, impossible à garantir avec l'achat ponctuel classique.
Avec des biens immatériels, on se retrouve prisonnier
Pas étonnant donc que la « location perpétuelle » devienne le modèle à suivre pour les offres numériques. Celles fondées sur le cloud évidemment : Spotify, Netflix, DropBox, etc. Mais également des logiciels traditionnels comme Creative Suite d'Adobe ou Office de Microsoft, désormais vendus par abonnement. On accède à la musique, aux documents, aux vidéos tant que l'on paie. Mais tout disparaît une fois l'abonnement interrompu.Ce n'est qu'un début. Car tout devient service. HP vient par exemple de lancer Instant Ink, un « service de remplacement de cartouches d'encre » ; une autre location perpétuelle qui ne dit pas son nom. Sans parler des objets connectés, futur Eldorado des loueurs. Une fois relié à internet, un frigo, une caméra ou un lecteur de glycémie devient plus facile à transformer en « service » et donc à vendre par abonnement.
Regardez votre relevé mensuel, la part des paiements récurrents ne fait qu'augmenter. Nous multiplions les abonnements pour n'être plus propriétaires de rien. D'aucuns diront : « se sentir libre, c'est tout avoir, sans rien posséder ». S'il s'agit d'une maison de vacances, peut-être. Mais avec des biens immatériels, 100% numériques, je me sens plutôt prisonnier.