Tenus de rédiger un rapport de synthèse à adresser tous les six mois aux autorités, Facebook, Twitter et consorts s'exposent également en cas d'échec à une amende de 50 millions d'euros.
La menace planait depuis des mois
Modérateur, job à haut risque ? Dans les filiales allemandes des grands réseaux sociaux, les candidatures au poste devraient certainement se raréfier au vu du tour de vis législatif opéré fin juin par le Bundestag allemand. Depuis plusieurs mois, l'Allemagne menaçait d'imposer à ces plateformes de réagir en moins de 24 heures en cas de signalement par les internautes d'un contenu à caractère haineux : propos racistes ou antisémites, incitations à la haine, propagande terroriste, pédopornographie mais aussi fake news.En cas d'échec ou de non-réponse, les plateformes encourront jusqu'à 50 millions d'euros d'amende. Les députés allemands ont aussi prévu de pouvoir condamner personnellement, comme un directeur de publication dans le secteur de la presse, le ou la responsable de ce sujet dans l'entreprise : jusqu'à 5 millions d'euros. Les plateformes devront en outre fournir aux autorités allemandes deux fois par an un rapport de synthèse sur le nombre de signalements reçus et les réponses données.
Crainte pour les élections allemandes en septembre
La loi doit encore être votée par le Bundesrat (la chambre haute du Parlement allemand), mais elle témoigne très clairement de l'inquiétude de Berlin : en deux ans, le nombre d'agressions à caractère raciste a bondi de 300 % dans le pays, et l'approche des élections fédérales en septembre fait craindre aux autorités une recrudescence de messages haineux et une tentative de déstabilisation de l'élection sur les réseaux sociaux.Twitter et surtout Facebook sont depuis le début de la crise migratoire en Allemagne un terrain d'expression privilégié de la haine anti-migrants. Et le climat s'est encore tendu après la série d'attentats en 2016 dans le pays. Saluée par les associations allemandes de défense des minorités, l'intransigeance des députés allemands est critiquée par les défenseurs des droits de l'Homme, qui redoutent à terme cette délégation contrainte du pouvoir de censure à des acteurs privés. Cela ne ravit d'ailleurs pas les principaux intéressés, à savoir les réseaux sociaux eux-mêmes. Facebook a rapidement réagi en déplorant « une absence de consultation qui ne fait pas justice à l'importance du sujet » et en rappelant les efforts déjà consentis : l'entreprise s'apprête à embaucher 3 000 nouveaux salariés, portant son équipe de modération à 7 500 personnes. Elle développe également une IA capable de détecter lors de la phase d'upload les contenus haineux, en particulier djihadistes, (textes, audio et surtout vidéo) pour les bloquer avant leur mise en ligne.