La face cachée de la modération des grandes plateformes

Pierre Crochart
Par Pierre Crochart, Spécialiste smartphone.
Publié le 13 janvier 2020 à 09h22
Facebook Ombre
© AlexandraPopova / Shutterstock.com

HYPERLIEN | Interviewée par Le Monde suite à la parution de son ouvrage Behind the Screen (non traduit), la chercheuse américaine Sarah T. Roberts revient en détail sur les métiers, opaques, de la modération sur les grandes plateformes du Web.



En quelques mots :

  • Selon Sarah T. Roberts, l'inefficacité de la modération sur les réseaux sociaux découle directement de leur volonté initiale de ne jamais intervenir directement sur le contenu. Un argument qui pouvait être séduisant il y a dix années, mais qui ne correspond plus du tout ni à la réalité, ni aux usages récents des médias sociaux (le live comme tribune pour les tueries de Christchurch en Nouvelle-Zélande, par exemple).

  • Plus loin, la chercheuse explique que l'une des conséquences de cet investissement tardif dans la modération est la déshumanisation totale de l'action modératrice. En d'autres termes : les plateformes n'accordent aucun crédit à ces petites mains, qu'elles prévoient en outre de remplacer dès que possible par des solutions automatisées « ne nous habituons pas trop à l'idée qu'il y a des humains, c'est juste temporaire », illustre l'autrice.

  • Minés par le manque de reconnaissance à l'égard de leur profession, et par les scandales à répétition qui montrent que le système est faillible, les modérateurs des plateformes développent des troubles psychosociaux inquiétants. Exposés quotidiennement à des images choquantes, les modérateurs se retrouvent isolés dans leur mal-être. Un mal-être qui est, en plus, couvert d'une forte omerta dans ces milieux. « Le problème, c'est que si je me lève pour aller parler au psychologue, mon manager et mes collègues me voient tous me lever et comprennent que j'ai un problème. Je ne veux pas qu'ils le sachent », rapporte Sarah T. Roberts, citant un modérateur qu'elle a interrogé pour son enquête.


L'Hyperlien est la base d'Internet. S'il y a des sujets à vous partager depuis d'autres médias, on vous écrit un Hyperlien.
Pierre Crochart
Spécialiste smartphone
Vous êtes un utilisateur de Google Actualités ou de WhatsApp ?
Suivez-nous pour ne rien rater de l'actu tech !
Commentaires (0)
Rejoignez la communauté Clubic
Rejoignez la communauté des passionnés de nouvelles technologies. Venez partager votre passion et débattre de l’actualité avec nos membres qui s’entraident et partagent leur expertise quotidiennement.
Commentaires (7)
yrd

Ce n’est pas un métier fait pout tout le monde … C’est comme dans les secours ou dans le médical …

iodir

Quand il y a inefficacité de la modération sur les réseaux sociaux, c’est que c’est voulu et que le pouvoir en place veut que ces idées soient vues ou entendues.

PsykotropyK

La différence c’est que dans le médical les gens sont (plus ou moins) formé à ça, qu’il savent ce vers quoi ils partent, et qu’ils ont un salaire en fonction.
Dans le cas de la modération il s’agit généralement de contrat de sous-traitance avec des employé peu qualifiés et mal payés.

Saulofein

Facebook ne répond pas a un pouvoir en place. Ils estiment juste qu’une modération trop importante est une entrave a la liberté d’expression.
Il est très difficile de trouver cette frontière, car les ultra sensibles vont s’offenser de tout, et les paranos vont voir des censures partout…

genesya

Salaire en fonction ? tu sous entends que dans le médical et les secours sont payés au « prorata » de ce qu’ils doivent encaisser ? (qui défini le ratio ?) j’ai pas trop l’impression ou alors être bien payé n’a plus le même sens. Désormais manier la matraque est mieux payé et aura, à priori, une meilleure retraite que ceux qui soignent les fractures… contrairement aux modérateurs tu as raison qui eux sont payés au lance-pierre et n’en verront presque pas la couleur.

PsykotropyK

Non pas au prorata, mais cela compense en partie. Exception éventuels des pompiers qui sont clairement sous payés en France par rapport à ce qu’ils endurent.

cirdan

« Selon Sarah T. Roberts, l’inefficacité de la modération sur les réseaux sociaux découle directement de leur volonté initiale de ne jamais intervenir directement sur le contenu. Un argument qui pouvait être séduisant il y a dix années, mais qui ne correspond plus du tout ni à la réalité, ni aux usages récents des médias sociaux »
Elle ne donne pas du tout cette raison pour expliquer l’inefficacité de la modération, elle ne fait rien d’autre qu’en décrire les débuts et c’est tout à fait pertinent.
La modération s’est imposée avec le temps à cause du nombre d’abonnés à ces réseaux sociaux qui est devenu démesuré. Comprendre les changements de mentalité auxquels ont du faire face les réseaux sociaux pour s’y adapter explique beaucoup de choses, notamment le fait qu’ils doivent perpétuellement jongler entre une censure nécessaire pour éviter les excès et ce qui contrevient à la loi, et la liberté d’expression, qui est une condition indispensable pour ne pas faire fuir leurs abonnés. C’est sans doute la raison pour laquelle il faut toujours attendre un scandale pour faire évoluer les choses.

Abonnez-vous à notre newsletter !

Recevez un résumé quotidien de l'actu technologique.

Désinscrivez-vous via le lien de désinscription présent sur nos newsletters ou écrivez à : [email protected]. en savoir plus sur le traitement de données personnelles