Coronavirus : les géants du numérique dubitatifs sur l'autonomie de leurs algorithmes de modération

Pierre Crochart
Par Pierre Crochart, Spécialiste smartphone.
Publié le 19 mars 2020 à 10h09
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© Shutterstock

« Le temps de réponse peut être allongé, et davantage d'erreurs pourront être commises », s'excuse d'avance Facebook dans un communiqué publié suite à la fermeture des agences s'occupant pour lui de la modération des contenus.

Une mesure prise également par Google et d'autres géants du Web, qui n'ont d'autre choix que de faire reposer la lourde tâche de la modération de contenus à leurs algorithmes. Des algorithmes qui sont loin, mais alors très loin d'être au point.


« L'intelligence artificielle » à relativiser

Si cela fait des années que l'on nous vante les mérites de la sacro-sainte « IA » pour modérer les contenus, il ne faudrait pas oublier qu'en très grande majorité, ce sont encore des humains qui consultent, évaluent et suppriment les messages haineux, violents, pédopornographiques ou encore désinformatifs sur les plateformes du Web.

Un état de fait que les GAFAM sont bien obligés de concéder aujourd'hui, alors que les agences de modération sur lesquelles elles s'appuient au quotidien doivent elles aussi fermer le temps que la pandémie de Covid-19 se tasse.

Une activité au ralenti, qui s'étend aussi à tout ce qui a trait au service client ou qualité. « Des utilisateurs, annonceurs, développeurs et éditeurs peuvent rencontrer des délais plus importants dans les réponses du support pour les services non critiques, lesquels seront traités en priorité via chat, email et FAQ », s'excuse Google.


Des mesures tardives pour les petites mains de la modération

Si les plateformes du Web réagissent aujourd'hui, c'est qu'elles n'ont malheureusement plus le choix. Les dernières semaines, et alors même que la situation mondiale sanitaire empirait, les petites mains de la modération employées par des agences tierces avaient (et ont toujours) l'interdiction stricte de travailler depuis chez elles. On comprend donc aujourd'hui que ces mêmes personnes sont non seulement confinées à domicile, mais également sans emploi.

Comme le révèle un article de The Intercept paru la semaine dernière et qui a fait grand bruit, bien que Facebook ait très tôt encouragé ses employés à travailler à leur domicile, cette consigne ne concernait nullement les équipes dédiées à la modération — très largement sous-considérées dans l'organigramme de l'entreprise.

En fait, la possibilité ne leur était même pas laissée ; elle était tout simplement proscrite. Contacté par The Intercept, Facebook admet qu'« il y a certaines tâches qui ne peuvent pas être faites à domicile... pour les modérateurs de contenu, une partie de ce travail doit être faite depuis le bureau pour des raisons de sécurité, de confidentialité et de légalité ».

Une situation finalement pas bien étonnante de la part d'entreprises qui empêchent les employés de venir au travail avec leur smartphone, ou même tout simplement de parler de leur travail entre collègues. Un environnement de travail peu enviable, parfaitement décrit dans la Web-série Les Invisibles, produite par FranceTV Slash.

Source : Reuters
Pierre Crochart
Par Pierre Crochart
Spécialiste smartphone

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