Lorsqu'on pense objets connectés et Internet des Objets, viennent aussitôt à l'esprit des technologies de communication telles que la 3G/4G ou le Wi-Fi. L'expérience montre qu'elles ne sont pas les mieux adaptées à tous les cas. Un capteur n'a pas forcément besoin de débits importants pour transmettre un message d'une dizaine d'octets comme une température ou des coordonnées GPS. Si l'objet connecté est mobile, un bagage par exemple, la taille et l'autonomie du module de communication deviennent critiques. Personne n'imagine recharger régulièrement sa valise pour être certain qu'elle réponde une fois perdue.
Le concept Bag2Go d'Airbus doit être rechargé tous les deux mois malgré son importante batterie.
Toutes ces questions de prix, d'encombrement et d'autonomie du module de communication, Nigiloc, une start-up Dacquoise, les a soupesées avant de développer son service de géolocalisation de vélos ou de scooters volés. C'est finalement vers le réseau radio de Sigfox que l'entreprise s'est tournée. Pour mémoire, celui-ci permet de transmettre de petites quantités de données sur de longues distances. Ses antennes couvrent des zones de 100 à 200 km, contre moins de 10 km pour les réseaux GSM. Aujourd'hui, un millier d'entre-elles suffit pour couvrir la France entière.
Un budget vingt fois moins élevé qu'avec du GSM
La technologie Sigfox est également très économique. En GSM, il faut compter en moyenne une vingtaine d'euros pour le modem et 5 euros par mois et par objet pour le forfait, sans compter la gestion informatique de l'ensemble. Avec Sigfox, l'abonnement chute à environ 3 euros par an avec un modem minuscule qui revient autour de un euro ! Seule contrainte : ne pas avoir à transmettre plus de 12 octets de données utiles par message.
Mais pour localiser un deux-roues, Nigiloc n'avait besoin d'envoyer qu'une coordonnée GPS. 12 octets suffisent largement. « Le service Sigfox était le moins cher, explique Gilbert Wilhelm, fondateur de Nigiloc. En outre, la batterie de notre module dure deux ans, contre six mois en GSM. Enfin, il est suffisamment petit pour être entièrement dissimulé, ce qui n'est pas le cas avec le GSM ».
Son service de géolocalisation combine au final plusieurs technologies. Celle de Sigfox, mais également un GPS, un composant Bluetooth 4.0 ainsi qu'un accéléromètre. Le module de NigiBike se dissimule dans le cadre du vélo où il est invisible. Au départ, ce dernier est associé, en Bluetooth, au smartphone du propriétaire ou de ses proches (jusqu'à 5). Lorsque le vélo ou le scooter est remué, l'accéléromètre s'active et transmet l'information au module Bluetooth, qui vérifie si l'un des mobiles avec lesquels il est appairé se trouve à proximité.
Si c'est le cas, cela signifie qu'il s'agit du propriétaire, donc le module NigiBike se « rendort ». Dans le cas contraire, il alerte le module Sigfox. Celui-ci transmet alors un message préformaté à la plateforme de Sigfox, qui l'aiguille vers celle de NigiBike. Cette dernière prévient le propriétaire par SMS ou messagerie.
Le module de communication de Nigiloc se niche dans le cadre du vélo.
Parallèlement, le module NigiBike envoie à intervalles réguliers, via Sigfox, la position GPS du deux-roues. Lorsque celui-ci s'immobilise, on connaît alors sa localisation définitive. Il suffit de la transmettre à la police. Naturellement, tout cela suppose que le propriétaire du deux-roues ait souscrit au service NigiBike dont l'abonnement s'élève à 49 euros annuellement.
Sigfox devra affronter une rude concurrence
L'ambition de Nigiloc ne se limite pas aux deux roues. La start-up réfléchit à un module générique, de très petite taille, que les utilisateurs glisseraient eux-mêmes dans des objets qu'ils veulent protéger, tels que des bagages, des objets d'art, des caméras professionnelles ou même des vêtements de luxe.Le français Sigfox n'est pas le seul à proposer une solution économique pour connecter les objets du quotidien à internet. Le groupement Weightless, vient de lancer une offre similaire avec 5 km de portée, une autonomie de 10 ans et des modules vendus moins de 2 euros. Mais paradoxalement, c'est peut-être la technologie LTE, l'autre nom de la 4G, qui pourrait se poser en principal concurrent. En effet, le 3GPP, l'organisme technique qui définit les standards des réseaux cellulaires, s'intéresse de près aux bas débits. Fin septembre, il a publié ses priorités pour les prochaines évolutions.
Au menu : réduction des coûts, de l'encombrement, portée plus longue et communication directe entre appareils. Bref, pouvoir répondre, avec un seul standard, à l'ensemble des applications aujourd'hui couvertes par la 3G, le Wi-Fi et les réseaux de type Sigfox ou Weightless, développés spécialement pour l'Internet des Objets. Cette future édition du standard (Release 13) est attendue pour mars 2016. Restera ensuite aux opérateurs à s'entendre pour mettre en oeuvre un réseau mondial comme le déploie aujourd'hui Sigfox. Si concurrence frontale il y a, ce ne sera donc pas avant trois ou quatre ans.
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