Bruno Le Maire, le 4 juin 2020 (Capture d'écran)
Bruno Le Maire, le 4 juin 2020 (Capture d'écran)

22 membres fondateurs, parmi lesquels plusieurs grandes entreprises françaises, collaborent à ériger « L'Airbus du Cloud », avec l'ambition de réussir et ainsi d'effacer les échecs passés. Ce jeudi, on en a appris plus quant à la structure du projet.

Face aux géants mondiaux du Cloud computing que sont Microsoft Azure, Alibaba Cloud, Amazon Web Services ou Google Cloud Plateform, l'Union européenne est en train de préparer sa réponse : Gaia-X, l'infrastructure européenne des données.

Le projet européen initié par la France et l'Allemagne, et emmené par plusieurs grandes entreprises, s'est dévoilé plus en détails, jeudi 4 juin, à l'issue d'une conférence de presse donnée par le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, et le ministre fédéral allemand de l'Économie et de l'Énergie, Peter Altmaier.

L'intérêt de garantir la transparence et l'interopérabilité

Animé par la question de la souveraineté des données européennes, le projet Gaia-X est porté par plusieurs principes directeurs, détaillés dans un long rapport sur les écosystèmes et les besoins des utilisateurs.

Le premier de ces principes concerne la protection européenne des données, « un élément central de la politique numérique allemande et européenne », note le rapport, comme on a pu le voir ces deux dernières années avec l'émergence du RGPD. « Nous avons travaillé dur ces dernières années pour rendre ce projet possible », a d'ailleurs rappelé Peter Altmaier.

Plusieurs notions phares, comme l'ouverture, la transparence, l'authenticité, la confiance, la modularité et l'interopérabilité, le libre accès aux marchés, la création de valeur européenne et la convivialité, sont également prônées par Gaia-X et par l'ensemble des parties prenantes du projet.

L'idée de Gaïa-X est aussi de convaincre des bénéfices qu'un tel système pourra représenter pour l'utilisateur. Il sera ainsi impératif que soit mise au point une solution d'infrastructure Cloud qui permettra aux entreprises participantes de booster leur compétitivité. Ainsi, depuis le Sommet numérique du 29 octobre 2019, les cas d'utilisation ont été élargis à 40, répartis dans différents groupes de travail comme la santé, la finance, le secteur public, l'énergie, la mobilité, la vie intelligente, l'industrie ou l’agriculture. Nous en reparlons un peu plus bas.

Aperçu de la structure de Gaia-X
Aperçu de la structure de Gaia-X

Bruno Le Maire a souligné l'intérêt de conserver ces données au sein de l'Union européenne. Au-delà de la question légitime de la souveraineté, ce sont toutes les industries de la zone qui pourront en bénéficier. « Pour développer la conduite autonome », prend comme exemple le ministre français, être doté d'un Cloud européen sera indispensable.

Gaia-X développera des solutions Cloud personnalisées

Les avantages de Gaia-X, si le projet prend définitivement vie, seront nombreux. D'abord, un Cloud européen facilitera clairement les stratégies multi-cloud, ce qui permettra « aux fournisseurs de SaaS ou à tout client du Cloud de conserver le contrôle des coûts, de résister aux fluctuations géopolitiques ou aux crises planétaires, ou d'assurer un approvisionnement dynamique en fonction des besoins », a réagi Yann Lechelle, le directeur général de Scaleway, qui participe au projet.

À l'échelle européenne, Gaia-X permettra d'intégrer des offres modulaires supplémentaires et donnera la possibilité aux clients européens de piocher parmi un ensemble d'offres locales, qui répondront strictement à leurs besoins, le tout en offrant une transparence au niveau de la confidentialité et de la protection des données.

Le consortium proposera des offres IaaS (où l'infrastructure est externalisée, louée) et SaaS (dédiées aux applications, plutôt pour les utilisateurs) qui pourront provenir directement des fournisseurs, mais qui devront respecter des critères bien particuliers, de façon à pouvoir basculer d'un Cloud à un autre. Les services Cloud qui seront intégrés par Gaia-X devront rester accessibles via des API ouvertes.

Par ailleurs, il n'est pas indiqué que des acteurs comme Amazon, Microsoft ou Google seront exclus. Du côté de Bercy, on espère même qu'ils prendront part à l'aventure, afin que la dépendance de l'Europe vis-à-vis d'eux se transforment en collaboration.

Ce que Gaia-X va véritablement changer pour les utilisateurs

L'un des points importants est de tendre vers la personnalisation de la solution et du traitement de ses données. Insistons sur ce point. À titre d'exemple, chaque utilisateur décidera de l'endroit où stocker ses données, mais aussi de qui peut les traiter et dans quel but, selon la classification des données de l'utilisateur. Ce sont les fameuses solutions modulaires dont nous parlions plus haut.

Le logo de Gaia-X

Dans le détail, les utilisateurs pourront accéder aux applications d'IA et aux pools de données à l'aide d'une infrastructure de données fiable et sécurisée.

Les données pourront être échangées entre les entreprises, traitées, évaluées et monétisées, le tout dans des réseaux de création de valeur. « Les opportunités de partage de données et de services peuvent favoriser les innovations, exploiter les synergies et permettre le développement et l'extension de nouveaux modèles commerciaux », nous précise-t-on du côté de Gaia-X.

« C'est un nouveau succès pour la France, l'Allemagne, l'Union européenne et l'ensemble de ses citoyens », a salué jeudi Bruno Le Maire, ne manquant pas de citer quelques-uns des 22 « membres fondateurs » de Gaia-X, parmi lesquels Atos, Bosch, Amadeus, OVH, Orange, Deutsche Telekom, Docaposte, EDF, 3DS Outscale (filiale Cloud de Dassault Systèmes), Siemens, SAP, Safran, Scaleway, BMW Group, Beckhoff ou IMT. Chacun des membres posera 75 000 euros sur la table dans un premier temps.

D'ici septembre que le projet Gaia-X devrait franchir une nouvelle étape, avec la création attendue d'une structure juridique qui devrait prendre vie sous la forme d'une association, sans doute de droit belge. C'est en 2021 que les premières offres de services Cloud pourraient être commercialisées.

Source : conférence de presse