Alors que Blade vient juste de lancer sa Shadow Ghost, l'heure est particulièrement bien choisie pour nous intéresser à son service. Mais si nous ne manquerons pas de revenir en détail sur le nouveau boîtier de l'entreprise dans ce test, commençons tout d'abord par faire un état des lieux du service.
Comme chacun sait, le concept du cloud computing est assez simple. En l'échange d'un abonnement mensuel, un utilisateur dispose d'une machine dématérialisée qu'il peut utiliser comme bon lui semble. Naviguer sur Internet, faire du montage vidéo, et bien entendu jouer : tout ce que vous pourriez faire sur votre propre ordinateur en réalité.
Toute la question est donc de savoir si la stabilité du service est suffisante, et si les limitations techniques ne sont pas trop nombreuses pour ne plus avoir à s'encombrer avec une énorme tour logée sous le bureau.
Shadow : présentation du service et des tarifs
Shadow est un service onéreux, qu'on se le dise. Une grille tarifaire en partie justifiée par l'orientation computing et non pas exclusivement gaming de l'entreprise. D'ailleurs, à l'heure où sont écrites ces lignes, Blade a légèrement repensé et simplifié son offre. Si l'on pouvait auparavant opter pour un engagement trimestriel facturé 34,95€ mensuels, cette proposition a disparu au profit d'une offre d'essai de trente jours facturée 29,95€. Le prix de l'abonnement sans engagement a également perdu 5€ dans l'exercice : 39,95€ par mois.Mais à quoi a-t-on droit pour ce tarif ? Sur le sujet de la fiche technique, Shadow est relativement transparent, même s'il se garde bien de donner les références exactes de ses composants.
Nous avons donc accès à un ordinateur sous Windows 10 équipé d'un processeur Intel Xeon de 24 coeurs / 48 threads. Dans les faits, ce processeur est alloué à plusieurs clients simultanément ; vous ne bénéficiez que de 4 coeurs / 8 threads dédiés. Côté RAM, votre machine virtuelle embarque 12 Go de DDR4 cadencée à 2 400 MHz. Le stockage de base est de 256 Go en SSHD, extensible à 1 To contre 2,95€ / mois supplémentaires. Enfin, la partie graphique est assurée par une carte équivalente à la GTX 1080. Les performances de cette dernière sont bien entendu dédiées pour chaque client.
Enfin, et c'est loin d'être négligeable : en utilisant Shadow, vous bénéficiez de la connexion Internet qui dessert les serveurs de l'entreprise. Autrement dit, à vous la fibre à 1 Gb/s, et donc le téléchargement de jeux très volumineux en quelques minutes seulement !.
Précisons également que Shadow est disponible sur une grande variété de plates-formes. PC, Mac, Linux, iOS, Android : presque tous les systèmes d'exploitation actuels disposent de leur application dédiée permettant de profiter du service.
Blade propose également la Shadow Ghost en remplacement de son ancienne box, pour permettre aux utilisateurs de se créer un setup ultra compact. Plus besoin d'un PC, Mac, ou d'un smartphone pour accéder au service, la Shadow Ghost permet de connecter en HDMI une TV ou un moniteur, et les périphériques en bluetooth ou en USB.
La Shadow Ghost est disponible à l'achat pour 119 €.
L'idéal est bien entendu de bénéficier de la fibre optique. Mais jouer de façon fluide est désormais possible à partir de 15 Mb/s. Shadow permet même d'encoder le flux vidéo en H.265 afin de soulager la bande passante, au détriment de la latence (et de l'utilisation d'un équipement relativement récent).
Pour de la bureautique simple en revanche, le service est parfaitement accessible et fluide dès 2 Mb/s.
Quid des paramètres d'affichages ? La solution de Blade est des plus souples en la matière, au sens où le service s'adaptera à votre matériel. Le boîtier Shadow Ghost (anciennement Shadow Box) vous permet de brancher périphériques et écrans, mais dans le cas d'une utilisation via un ordinateur, Mac, smartphone ou tablette, le service ajustera le flux en fonction de ce qui se présente à lui. La fiche technique Shadow indique ainsi être capable de gérer un flux 4K jusqu'à 60 Hz et de grimper jusque 144 Hz en Full HD.
Enfin, en ce qui concerne les écrans compatibles G-Sync ou FreeSync, Shadow ne les prend pas en charge. Pour la simple et bonne raison que les serveurs intègrent déjà "une solution anti-tearing directement dans son architecture", indique la FAQ du site.
Premiers pas avec Shadow
L'installation de Shadow est d'une simplicité déconcertante. Une fois l'exécutable récupéré sur le site officiel, il vous suffit de vous connecter à votre compte et de configurer Windows exactement comme vous le feriez au premier démarrage d'un ordinateur. Au passage : votre ordinateur a beau être hébergé dans le cloud, cela ne vous soustrait pas à l'utilisation d'un antivirus pour autant.Une fois votre session configurée ma foi... il s'agit d'un ordinateur sous Windows ! Comme dit plus haut, dès lors que vous disposez d'une connexion d'au moins 2 Mb/s, vous pouvez profiter d'une expérience bureautique décente.
Une application Shadow est préinstallée, et vous permet de régler quelques paramètres à la volée. Bande passante allouée au service (dans mon cas : 70 Mb/s), encodage H.265 (mode faible connexion), USB over IP (uniquement sur Windows pour le moment), etc. Un véritable tableau de bord pour votre PC dans le nuage en somme.
Aussi vous l'aurez bien compris : ce PC, aussi immatériel soit-il, vous appartient le temps de votre location, et vous pouvez en faire ce que vous voulez. Que votre usage soit professionnel, créatif ou vidéoludique, libre à vous d'installer tous les logiciels que vous souhaitez, sans restriction particulière à noter du côté de Shadow. Gardez simplement en tête que 256 Go de stockage, c'est peu. Vraiment peu, notamment pour les joueurs gourmands, qui ne pourront installer que quelques titres sur leur machine. Mais à 3€ à peine l'extension de stockage à 1 To, on aura vite fait de repasser à la caisse pour être tranquilles.
Shadow en jeu : une différence quasiment imperceptible
Abordons le gros du sujet. En partant du principe que la communication de Shadow est essentiellement tournée vers les joueurs, il y a de fortes chances pour que ce soit spécifiquement ce sujet qui vous intéresse ici. Sans plus de cérémonie, nous devons bien avouer que Shadow est un service en tout point bluffant.Utilisateur de macOS au quotidien, je ne cachais pas ma fébrilité à l'idée de faire de mon MacBook une véritable machine de jeu. Pourtant, la transition s'est opérée sans à-coups, tout naturellement. Une fois l'utilitaire installé et ma ludothèque Steam retrouvée, j'ai pu lancer toute une variété de titres sans constater la moindre latence. En jeu, il est possible de pousser tous les curseurs à leur maximum sans jamais descendre sous la barre des 60 images par seconde, même sur les jeux les plus gourmands (Metro Exodus et Anthem notamment).
Il me faut néanmoins faire un petit aparté à destination des joueurs qui, comme moi, espèrent jouer depuis un ordinateur portable Apple (attention au mapping des touches du clavier). Il ne vous aura pas échappé que l'écran des MacBook Pro dispose d'une définition un peu bâtarde (2880 x 1800 pixels ici). Et en dépit de toute la bonne volonté de Shadow, leurs PC dans le nuage sont avant tout conçus pour du Full HD. Augmenter la résolution en jeu se traduira ainsi par des latences élevées, ou à du stuttering des plus gênants. Seule solution pour nous : jouer en mode fenêtré en 1920 x 1080, ou opter pour un ratio d'écran 16:10 et un affichage en 1920 x 1200.
Si Shadow est parfaitement utilisable en Wi-Fi (connexion 2,4 GHz, passez votre chemin), on ne saurait que recommander une utilisation filaire par câble Ethernet.
Lors de nos tests, les phénomènes de stuttering et la récurrence des lags étaient plus prononcées en Wi-Fi qu'en câblé. Si vous désirez jouer en ligne, ce sera donc un prérequis absolu.
Il reste également un point à aborder : celui du jeu en ligne. Si le Shadow excelle pour le traitement des jeux solo, qui demandent rarement une précision au cordeau, la chose n'est pas aussi simple dans les jeux compétitifs en ligne.
Le problème n'est même pas celui de la latence qui, nous l'avons dit, est parfaitement maîtrisée et imperceptible dans une majorité de cas. Le problème est plutôt l'imprévisibilité du réseau. D'une partie à l'autre, impossible de prévoir si votre machine virtuelle va être en mesure de retransmettre le signal de façon égale tout au long de la partie.
Exemple typique : sur deux parties de Apex Legends d'affilée, la première s'est déroulée sans accroc, là où la seconde m'a bêtement coûté la vie à cause d'un lag important pile au moment d'ouvrir le feu sur l'ennemi. Les aléas de la technologie, qui ne remettent pas en question la fiabilité du service proposé par Blade, mais qui font s'interroger sur les cas d'usage de leur solution. Remplacer son ordinateur fixe pour du cloud computing, pourquoi pas. Mais en aucun cas (pour l'instant) pour se lancer dans une carrière d'esportif professionnel.
Sur iOS et Android, l'expérience se passe également sans accroc majeur. Difficile de rester de marbre quand votre bureau Windows apparaît instantanément sur votre tablette, juste en lançant une application. Bien entendu, il vous faudra prévoir des périphériques sans-fil pour pouvoir interagir avec l'interface (n'essayez même pas de vous débrouiller avec le tactile), mais la simple possibilité de déporter votre écran sur un smartphone ou une tablette est une idée géniale en soi. Petite frustration néanmoins : Shadow ne permet pas la connexion simultanée via plusieurs machines. Se connecter au service via un iPhone coupera forcément votre connexion depuis votre ordinateur, et vice-versa.
Shadow Ghost : quelle expérience pour la nouvelle box ?
Nous avons bien entendu prolongé l'expérience sur la nouvelle box de Blade, la Shadow Ghost. Cette nouvelle box se veut plus compacte, plus silencieuse et moins énergivore que la génération précédente. Blade propose un petit boitier (182x123x50 mm pour un poids de 190g) avec refroidissement passif et connectique assez complète :- Port HDMI 2.0 : 4K UHD 60Hz / 1080p 144Hz
- Wi-Fi 802.11 : a/b/g/n/ac Dual Band
- Bluetooth : 4.1
- Ethernet : Gigabit
- 2 USB 3.0 + 2 USB 2.0
- Entrée/sortie audio : jack 3,5 mm
Pour le test nous avons connecté la Shadow Ghost à un moniteur 4K, et à un combo clavier/souris bluetooth (via des dongles USB). La box est connectée à internet via un câble ethernet pour des conditions optimales, mais elle peut également se connecter au wifi (5 Ghz fortement conseillé).
Une fois celle-ci démarrée via l'interrupteur présent sous le boitier, elle recherche automatique les dernières mises à jour. Il est possible de switcher de canal de MàJ, entre les versions stables, ou bêtas plus récentes mais parfois buggées. Il est ensuite possible de se connecter à son compte Shadow via un écran de connexion semblable aux autres clients :
L'expérience qui s'en suit est parfaitement similaire à nos tests sur les autres clients, mais dans un silence total. Le boitier étant dépourvu de ventilateur, la Shadow Ghost saura se faire complètement oublier dans votre salon.
« Seule une lueur rouge sous le boitier vous rappellera qu'un PC gamer se déchaîne pour vous quelque part dans un datacenter. »
Et il faut reconnaître que c'est un véritable bonheur de jouer sur sa TV de 55", confortablement installé manette en main au fond de son canapé. Avec une bonne connexion fibrée, on s'est permis de pousser le débit jusqu'à 70 mb/s pour une compression vidéo (H264) imperceptible sur une TV en Full HD (1080p).
A titre d'exemple on a comparé Shadow of the Tomb Raider sur la Shadow Ghost et sur PS4 Pro : la qualité d'image et le framerate avec tous les réglages à fond sont supérieurs sur la box de Blade ! Une petite remarque cependant, il n'est pas plus possible de faire du multi-écran avec la box qu'avec les clients logiciels.
Shadow, est-ce que c'est rentable ?
Bluffante, la technologie déployée par Shadow n'en est pas moins coûteuse. On l'a dit : un abonnement annuel vous coûtera 29,95€ par mois, soit 360€ l'année. En gardant à l'esprit que la machine fournie par Blade équivaut à un PC fixe d'une valeur de 1 500€, il vous faudrait à peu près quatre ans pour dépenser autant d'argent via l'abonnement.C'est une belle somme, mais n'oublions pas que l'entreprise s'engage de son côté à mettre à niveau les composants de ses machines sans surcoût pour l'utilisateur. La chose s'est d'ailleurs vérifiée récemment, où les GTX 1070 originelles ont été remplacées par les GTX 1080 (pour l'heure, le passage aux GPU Turing n'est pas prévu).
Shadow : l'avis de Clubic
Disponible depuis plus de deux ans, Shadow a pris du galon et a clairement gagné en maturité depuis son lancement. Toujours pourvu d'un support impeccable, et fort d'une communauté animée et réactive, Blade n'a pas volé son titre de fleuron du cloud computing grand public.Disponible sur à peu près toutes les plates-formes possibles et imaginables, Shadow fonctionne comme un charme dès lors que vous disposez d'une connexion d'au moins 15 Mb/s (les fonctionnalités bureautiques sont parfaitement fonctionnelles à partir de 2 Mb/s). Idéale pour les professionnels en déplacement, les créatifs à gros besoin de puissance de calcul (et d'upload !) tout comme aux joueurs désireux de s'essayer aux dernières nouveautés, Shadow est une solution que l'on ne peut que recommander. Nous sommes en revanche dans l'obligation d'émettre une réserve quant à la pratique du jeu en ligne compétitif. Si la latence est imperceptible la majorité du temps, il n'est pas impossible que le lag et autre stuttering fassent leur apparition en cours de partie. Vous voilà prévenus.
Reste le sujet du prix. Oui, Shadow est cher, et vous demandera d'investir au moins 29,95€ mensuels pour profiter d'un ordinateur haut de gamme. Mais au-delà de la prouesse technologique, on trouve également une licence Windows, un support technique aux petits oignons et l'assurance d'upgrades matériels sans surcoût au gré des évolutions du marché. Quand bien même vous ne souhaiteriez pas investir à long terme dans Shadow, libre à vous de souscrire à un mois par-ci par-là. En plus, vous pouvez désormais l'essayer pendant 30 jours sans engagement. Ne serait-ce que pour vous convaincre que, oui, le cloud computing est une réalité, ce serait dommage de vous priver.