« Une tentative manquée d'intimidation ». Le compagnon du journaliste du Guardian Glenn Greenwald a été arrêté puis interrogé pendant neuf heures dimanche à l'aéroport international londonien d'Heathrow. Glenn Greenwald est le seul journaliste à avoir eu un contact direct avec Edward Snowden dans le cadre des révélations du scandale de la surveillance de la NSA. Il a multiplié les publications depuis le 5 juin dernier, levant le voile sur la portée des programmes d'espionnage des autorités américaines.
Lui et la réalisatrice Laura Poitras seraient aujourd'hui les deux seules personnes à avoir accès à la totalité des documents détenus par le lanceur d'alerte, qui a depuis trouvé asile en Russie.
David Miranda rentrait d'un week-end à Berlin. En transit à Londres pour rejoindre Rio de Janeiro, il a été interpellé sur le fondement de l'article 7 de la loi antiterroriste, un texte controversé qui permet aux autorités d'arrêter, fouiller et interroger pendant neuf heures au total un individu potentiellement suspect, sans autorisation préalable. Et ce dans l'ensemble des aéroports, ports et frontières.
UK authorities detain @ggreenwald's partner for 9 hrs & confiscate laptop etc under s7 Terrorism Act http://t.co/Rb8fNxEwgm
— alan rusbridger (@arusbridger) August 18, 2013
Les autorités britanniques ont donc procédé à son interpellation à l'aéroport à 8h05 dimanche, et ne l'ont relâché qu'à 17 heures. The Guardian fait savoir que sur les 2 000 personnes détenues sur le fondement de ce texte, 97% d'entre-elles ont été relâchées avant la première heure. Une seule personne avait jusque-là dépassé les six heures d'interrogatoire.
Relâché, l'homme s'est vu confisquer son ordinateur, téléphone portable, carte mémoire, caméra, DVD et autre console de jeu. Son vol avait été payé par The Guardian, tandis qu'il avait rencontré au cours de son passage à Berlin Laura Poitras, avec qui Greenwald avait travaillé sur la masse de documents confiés par Snowden. D'après le New-York Times, David Miranda avait en sa possession des documents liés à l'affaire Snowden, destinés à Greenwald.
« L'effet opposé de celui attendu » par les autorités
Scotland Yard s'est contenté de confirmer l'interpellation d'un homme dimanche à Heathrow sur le fondement de la loi antiterroriste, entendu pendant neuf heures. De son côté, Glenn Greenwald a fait savoir dans une tribune publiée sur le site du Guardian qu'il avait reçu un appel ce lundi matin en provenance d'un officiel de la sécurité de l'aéroport d'Heathrow pour lui faire savoir que son compagnon avait été entendu pendant neuf heures dimanche.
« Il s'agit là d'une attaque profonde à la liberté de la presse et au processus de récupération d'informations », a réagi le journaliste. « Détenir mon compagnon pendant neuf heures, tout en lui refusant un avocat, avant de saisir une large partie de ses biens est clairement destiné à envoyer un message d'intimidation à ceux qui ont écrit à la NSA et le GCHQ (Government Communication Headquarters, les autorités de renseignement britanniques). Les pratiques du Royaume-Uni posent une sérieuse menace pour tous les journalistes ». Et d'ajouter: « cela ne fera que nous encourager à continuer de façon agressive ».
Dans un communiqué, le ministère brésilien des affaires étrangères a condamné l'interpellation de l'un de ses citoyens, pour qui « aucune charge ne pouvait légitimer une telle mesure ». Un député britannique se demande de son côté si des ministres étaient oui ou non au courant de l'opération, alors qu'il était presque impossible, même sans connaissance du dossier, « que le partenaire de Glenn Greenwald pouvait être considéré comme un suspect terroriste ».
Amnesty International a également dénoncé condamné l'interpellation de David Miranda. « Il est tout à fait improbable que David Michael Miranda, un citoyen brésilien en transit à Londres, était détenu par hasard, étant donné le rôle joué par son compagnon en rapportant la vérité concernant le caractère illégal de la surveillance de la NSA ». Le communiqué ajoute : « l'interpellation de David était illégale et inexcusable. Il a été arrêté sur le fondement d'une loi qui viole le principe d'équité ».