Le patron de Facebook s'est entretenu avec Thierry Breton lors d'un débat organisé par le think tank européen CERRE, lundi. L'occasion d'aborder plusieurs dossiers importants comme la désinformation, le cadre réglementaire et la gestion de la crise par les grandes plateformes numériques.
Le Centre on Regulation in Europe (CERRE), laboratoire d'idées spécialiste des systèmes de régulation des industries numériques et de réseau, a réuni lundi 18 mai 2020 le président-directeur général et fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, et le commissaire européen en charge du Marché intérieur, le Français Thierry Breton, lors d'un débat diffusé en live sur YouTube. Les deux dirigeants, pas toujours du même avis, ont trouvé des points de convergence.
Mark Zuckerberg appelle l'UE à réguler pour devenir l'exemple à suivre aux yeux du monde
L'actualité la plus chaude du côté de Facebook reste la modération et la gestion de la désinformation. Si les deux personnalités sont d'accord sur la nécessité d'une régulation, la méthode les oppose. Ce fut l'un des points les plus discutés entre Mark Zuckerberg et Thierry Breton. Le commissaire européen a prévenu le patron de Facebook que les grandes entreprises technologiques, dont les réseaux sociaux, pourraient bientôt être soumises à des règles plus strictes si elles ne renforçaient pas leurs efforts en matière de lutte contre la désinformation.
« Au final, en tant que P-D.G., vous êtes le seul à être responsable, personne d'autre ne l'est », a noté Thierry Breton, qui a rappelé avoir déjà invité le « Zuck » à se conformer aux normes européennes, liant la désinformation au dossier épineux de la réglementation.
À ce sujet, Mark Zuckerberg adopte toujours une position inverse. Le patron de Facebook affirme que ce n'est pas à sa société de participer à la réglementation et appelle l'Union européenne à être le modèle du monde en procédant à la régulation des nouvelles technologies, et que celle-ci devienne un standard pour le reste du monde. Le dirigeant cible notamment la Chine, et s'inquiète « de voir ce modèle se répandre dans les autres pays », tout en affirmant que « le meilleur antidote serait d'avoir un cadre réglementaire clair qui proviendrait des démocraties occidentales, et qui deviendrait le standard partout dans le monde ».
Pour apporter une justification à sa suggestion, Zuckerberg prend comme exemple le RGPD, repris par plusieurs pays dans des versions parfois presque équivalentes.
Thierry Breton met la pression sur Facebook et les grandes plateformes
Thierry Breton, lui, maintient sa position en ce qu'elle encourage les plateformes à faire plus pour lutter contre la désinformation, dont des efforts dans la lutte contre les fausses informations diffusées en masse avec le coronavirus. « C'est un énorme problème. Nous discutons avec de nombreuses personnes, dont Mark, et j'apprécie vraiment les efforts. Parfois, cela a fonctionné, parfois non », a expliqué l'ancien ministre.
L'UE, qui prépare une loi sur les services numériques via la Commission européenne et qui pourrait être un sévère obstacle aux géants américains de la technologie en limitant certains de leurs pouvoirs, maintient donc la pression. Le texte devrait toucher aux contenus haineux mais aussi, et ce détail ennuie sans doute bien plus Mark Zuckerberg, aux abus de position dominante des grands entreprises du numérique.
Thierry Breton a aussi profité de son entretien avec Mark Zuckerberg pour féliciter Facebook mais aussi les autres plateformes, comme YouTube, Disney+ ou Netflix, d'avoir contribué à maintenir les réseaux en état de marche au plus fort de la crise de maladie à Covid-19 en basculant notamment de la résolution HD à la qualité standard quand cela était nécessaire, et en étant qui plus est très réactives. L'appel de l'ancien patron d'Atos avait effectivement été entendu en « moins de 24 heures » en Europe.