Internet, terre de tous les possibles, et donc de tous les dangers si rien n'est fait ? Peut-être est-ce en substance ce qu'il faudra retenir du discours prononcé par Nicolas Sarkozy pour l'ouverture du e-G8 Forum, dont les conclusions devraient être présentées au G8 en fin de semaine. Après avoir loué la puissance créatrice des nombreux entrepreneurs présents dans la salle, le président de la République a insisté sur la nécessité de responsabiliser cet écosystème mouvant, auteur d'une « troisième révolution » en marche.
Vous avez changé le monde avec l'imagination de l'inventeur et l'audace de l'entrepreneur, a lancé Nicolas Sarkozy, invoquant une modification profonde des notions mêmes d'espace, de temps, de connaissance et de perception de l'Histoire, mais aussi un « vecteur d'une puissance inédite » pour la liberté d'expression.
Après l'emphase vient la raison. « Votre action se lit donc à l'échelle de l'Histoire et s'inscrit dans une dynamique de civilisation », a ensuite embrayé le chef de l'Etat.
« Nous (chefs d'Etats, ndr) devons accompagner une révolution qui est née au coeur de la société civile pour la société civile et qui a un impact direct sur la vie des Etats. Car si la technologie est neutre et doit le rester, on voit bien que les usages d'Internet ne le sont pas. Aujourd'hui, penser Internet relève d'une véritable responsabilité historique et cette responsabilité ne peut être que partagée ».
Responsabilité, le mot est d'importance. La suite du discours de Nicolas Sarkozy n'aura de cesse de souligner cette notion, insistant, « même si je sais que le mot n'est pas apprécié chez vous », sur l'importance des valeurs et des règles, « afin de ne pas laisser la révolution que vous avez lancée véhiculer le mal, sans entrave ni retenue » .
« La transparence totale, celle qui ne laisse jamais l'Homme en repos, se heurte tôt ou tard au principe même de liberté individuelle », ajoute-t-il avant d'évoquer la protection de l'enfance, la défense du droit d'auteur, ou la sauvegarde de la puissance créatrice des artistes, légitimant de ce fait, bien qu'elles ne soient jamais nommées, les lois Loppsi et Hadopi.
« Les Etats souhaitent engager avec vous un dialogue pour qu'une voie équilibrée puisse un jour être trouvée entre vos intérêts, ceux des internautes qui vous plébiscitent chaque jour et ceiux enfin des citoyens et contribuables de chaque Notion qui ont aussi des droits. », a finalement invité le président de la République.
La France, tête de pont d'une régulation plus stricte d'Internet ? Bien que ce dans son discours sous-tendu par de constantes allusions à l'Histoire, Nicolas Sarkozy ait insisté à de nombreuses reprises sur cette nécessaire « responsabilité » des acteurs du Web, il s'en défend. « Certains m'ont dit : ils vont penser que tu veux les contrôler. Il va de soi que cela n'a pa de sens », a-til argué lors d'une brève séance de questions réponses. « Est-ce qu'évoquer la question de la sécurité face au au terrorisme, c'est vous nuire ? Est ce que vous dire que vous êtes des créateurs et que ce que vous avez créé doit être respecté, c'est vous nuire ? (...) Moi je ne crois pas. Ce qui saurait vous nuire, c'est de ne pas reconnaitre en vous des citoyens responsables ».
Cette responsabilité passerait donc par la mise en place d'un effort coordonné entre Etats et entreprises privées, afin d'établir les garde-fous nécessaires à la protection des libertés fondamentales, sans tomber dans les travers d'une « réglementation définitive », qui ne serait pas adaptée au numérique. « Personne ne peut contrôler Internet », conclura le président. Ce qui ne doit pas empêcher d'essayer.