En 2022, le gouvernement a respecté l'une de ses promesses : supprimer la redevance télé. Mais il n'a pas cru bon de décider quel mode de financement allait le remplacer.
En attendant d'en trouver un, c'est une fraction de la TVA qui est devenue le mode de financement de l'audiovisuel public. Cette solution devait n'être que temporaire, mais dans une interview accordée au Monde, la ministre de la Culture a indiqué envisager de la pérenniser. Si les dirigeants de l'audiovisuel public sont globalement pour, des juristes s'interrogent sur la faisabilité de ce changement.
Une solution temporaire qui semble plaire aux dirigeants
Lorsque le gouvernement a annoncé en grande pompe la suppression de la redevance pour l'audiovisuel, il a omis d'établir un moyen clair de remplacer cet impôt par un autre afin d'assurer la viabilité des chaînes du service public. Sauf que, toujours en place, les gouvernants actuels doivent composer avec un problème qu'ils ont eux-mêmes créé. En attendant que quelqu'un ait une meilleure idée, ils se sont donc contentés d'affecter une fraction de la TVA en remplacement de cette redevance, sans remplacer l'impôt lui-même.
Cette solution qui ne devait qu'être temporaire et remplacée en 2024 pourrait finalement devenir le choix définitif de l'exécutif, selon la ministre de la Culture Rima Abdul Malak. Les acteurs de l'audiovisuel public en seraient plutôt satisfaits. Alors qu'ils devaient jusque-là soumettre tous les ans leur budget au bon vouloir du ministère des Finances, ils en auraient désormais un sur lequel l'exécutif n'aurait théoriquement pas la main.
La TVA, un impôt inégalitaire et déconnecté de l'audiovisuel
Cette formule pose néanmoins plusieurs problèmes, à commencer par le fait que la redevance n'est pas remplacée. Cela signifie un impôt en moins, et donc une coupe dans le budget d'un service public. Lequel ? Entre l'hôpital, l'Éducation nationale, les transports et les indemnités chômage, le gouvernement Borne a montré qu'il avait l'embarras du choix.
Par ailleurs, la TVA, qui est la première source de revenu de l'État français, est un impôt inégalitaire, dans la mesure où le même taux (généralement 20 %) s'applique à tous de la même manière, indépendamment du niveau de revenu, du patrimoine ou de la situation familiale. Une étude de l'Observatoire des inégalités a par ailleurs démontré que cette taxe représentait 11,5 % des revenus des plus pauvres, contre 5,9 % de ceux des plus riches. Par conséquent, s'appuyer davantage sur une taxe fixe et identique pour tous est largement contreproductif dans un effort de lutte contre les inégalités.
Enfin, des juristes s'interrogent sur la faisabilité d'une telle méthode : la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) impose un lien entre un impôt et son utilisation. Pour certains juristes, lier une taxe sur la consommation au financement de l'audiovisuel public semble donc très compliqué si l'on souhaite respecter l'intention des législateurs.
Sources : Les Échos, Le Monde, Observatoire des inégalités